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Demo Night #1

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En très bref...

Se tenait lundi soir la DEMO NIGHT #1, organisé par le Gamelier (néologisme à double nationalité mélangeant atelier et game), au CRI (acronyme bruyant de Centre de Recherches Interdisciplinaires)


Le principe est simple mais efficace : vous venez avec un trailer de votre jeu et votre jeu, on regarde d'abord tous les trailers éventuellement commentés, puis c'est la fête, on peut tester tous les jeux en mangeant des bonbons. (offerts).


La plupart des jeux sont donc inédits et certains méritent le détour.


Je retiens notamment "Wikigalaxy".


http://wiki.polyfra.me/

Les articles de Wikipédia transformés en systèmes solaires d'une immense galaxie. Une façon unique d'explorer notre site universel bien aimé, mais ce "jeu" n'en est pas un. Owen Cornec, son auteur, encore étudiant, n'a aucune piste pour le gamifier et n'a pas trop trop l'envie. 





Mais vous vous souvenez du gars d'Oculus Rift avec qui j'avais "échangé"à la Gamescom ? Ben j'ai mis ces deux là en contact. Explorer wikipédia en oculus, ce serait pas super cool ?! J'espère que ça va se faire !!

Sinon j'ai également vu : Hero.Coli


http://dsynbio.com/

Voici un jeu d'évolution/exploration en 2D dans lequel on joue une cellule qu'on peut upgrader (vitesse, perméabilité des membranes...etc...). 





Mais là où le jeu à la thématique scientifique un peu hermétique se transcende, c'est qu'il n'est pas simplement une thématique scientifique : il est très très proche des mécanismes biologiques. Ainsi, il faut comprendre la mécanique des altérations génétiques employant ADN, Ribosomes, et tout un tas de termes précis pour vraiment évoluer dans le jeu. La portée éducative est vraiment intéressante.

Le jeu ne sera hélas pas commercialisé mais vous pourrez y jouer gratuitement.


J'ai également relevé ELEMENTA, donc j'avais déjà entendu parler.


C'est un jeu d'échange très polish où l'on joue le rôle d'une planète qui fait des échanges avec les planètes proches pour créer un réseau de dépendance qu'il faut équilibrer. Désolé pour la photo, je l'ai prise sur le vif et je n'ai pas trouvé d'autre lien pour le jeu.




Le jeu manque d'une condition de victoire et peut-être d'une narration (ah, j'aimerais qu'il parle de la migration excentrique des civilisations vers la périphérie de la galaxie comme c'est développé dans le génial Un Feu sur l'Abime de Vinge !) mais on est pas loin d'un très bon titre agréable à jouer.

Etaient présentés également :


Save me Tako : un plateformer style gameboy aux niveaux procéduraux





Fireworks Command Ship : un mélange entre missile command et match 3





Soul Harvest : un Starcraft/Dota au look retro qui se passe en ENFER





Cosmos Cleaner : un shooter arena new wave




3,5 conférences du Game Summit en quelques mots, photos (et commentaires)

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Jeudi dernier j'étais en province, plus précisement à Montpellier, c'est à dire fichtrement loin de la rive gauche.



loin
Le musée Fabre de Montpellier faisait une expo dédiée aux jeux vidéo et Out There avait été sélectionné parmi de nombreux autres, waouh !



Spot the astronaut
Du coup j'ai demandé à voir le conservateur qui s'est occupé de l'expo et Marie Lozon de Cantelmi m'a très gentiment accueilli (et elle avait joué à Out There, bravo !) Elle m'a expliqué que le musée était attentif à toutes les formes d'arts et que le domaine du jeu vidéo, récent au regard de l'histoire de l'art était intriguant mais nécessitait une attitude prudente. A ce titre, elle suit de près des travaux entrepris notamment par le MoMA où se trouve une aile permanente dédiée aux jeux vidéo, accueillant entre autres, fierté nationale, Another World de Eric Chahi.

Vive Marie !

A ce titre, ce n'est pas la première expo "jeu vidéo" du musée : Eric Chahi avait exposé ici des gouaches tirés de Another World. Si le jeu vidéo est un tout difficile à circonscrire, et non résumable à ses seules caractéristiques graphiques, les illustrations graphiques permettent de faire pour l'instant le pont entre conservation classique d'un musée et le devenir du jeu vidéo en tant qu'oeuvre d'art. En dépit du caractère imposant de l'expo, Mme Lozon de Cantelmi reconnait que le support, des toiles, dénature quelque peu le support initial du jeu (des pixels), mais que le budget, pour cette première expo, était de 4000 €. Ecrivez au Musée Fabre et félicitez les afin qu'ils aient plus de budget et que nous soyons nombreux à venir à Montpellier ! Sinon se tenait en même temps le "Game Summit", un cycle de conférences. Je n'ai pas pu tout voir, et tout n'était pas intéressant, mais voici quelques infos : Nous avons eu d'abord un talk de Julien Villedieu, directeur du SNJV (syndicat de Jeu Vidéo). 




1 embauche sur 2 est un CDI les enfants
Je vais rapporter les points factuels qu'il a énoncé suite à une étude "sans précédent" qu'ils ont menée, le "baromêtre annuel du JV en France" : - il y a 200 à 300 entreprises du JV en France - 75% d'entre elles sont des développeurs purs, nous manquons donc d'éditeurs - les 2/3 se considérent "indépendantes" - lorsqu'elles rencontrent le succès, il est difficile de le répéter (rarement deux succès de suite) - l'état va octroyer un fonds d'investissement de 38 M€ sur 10 ans - 70% des contrats de travail de la profession sont des CDI - Le secteur recrute 350 personnes par an, correspondant à 10% de sa masse salariale - 1 embauche sur 2 est un CDI - l'Europe est le deuxième marché de consommation du JV - 15% des investissements donnés par les entreprises françaises sont dédiés à l'Export - le CA augmente chaque année en moyenne de 10% - le marché est en hypercroissance et en hyperinstabilité - nos deux ministres (Mme Lemaire et Mme Pellerin) ont néanmoins "déclaré leur amour" aux JV Ensuite j'ai assisté à une conférence de Susan O Connor, qui a participé à l'écriture de titres comme Bioshock, Tomb Raider (le dernier) et Far Cry 2 (et j'adore l'écrire de Far Cry 2 !) autant dire que c'est pas un poids léger de la scène.



Le monde se divise en deux : ceux qui estiment que Far Cry 2
n'est pas le meilleur FPS du monde, et moi.

Susan est un peu comme moi dans la mesure où elle a une obsession et la défend bec et ongles quitte à basculer dans la mauvaise foi absurde. Sa conviction c'est : le JV se concentre beaucoup trop sur la technologie et pas assez sur l'histoire qu'il veut raconter. Personne n'a bondi mais moi si : je ne suis pas technicien et le gros de mon travail est justement de raconter des histoires dans les jeux vidéo. Mais dans un monde parfait j'aurais un rôle minime ; le jeu vidéo est plus que la somme de ses parties et l'histoire n'est qu'une partie, la technologie est très importante, pas plus, pas moins mais justement exactement autant que l'histoire. Sinon, de façon assez laborieuse également, Susan a exposé sa vision de l'évolution du jeu vidéo qu'elle juge comparable à l'histoire de la création de fiction à la télévision. Elle estime que "la télévision en tant que business model de la fiction créative est un système moderne et viable" pour les jeux vidéo et que "dans la TV au moins, on sépare technologie et histoire" (note de fibre : c'est discutable) Voici son argument : - au début de la télévision se trouvaient peu de canaux (aux USA, juste 3). - ils produisaient du média de masse, des séries TV à l'humour grossier (note de fibre : c'est discutable) - ces séries étaient estimées "ridicules" ou "pour les idiots" (note de fibre : c'est discutable) - après il y a eu un peu plus de chaines et les séries ont été un peu meilleures (Susan cite Magnum) (note de fibre : je ne vois pas le lien de cause à effet) - après sont venues des tas de chaines du cable qui ont d'abord proposé de la basse qualité (du catch et de la real tv) puis se sont recentrées sur un marché de niche - ces nouvelles chaines, comme HBO, agissent comme des "indépendants du jeu vidéo" et alimentent leur marché de niche avec des séries de qualité (note de fibre : je ne vois pas le lien de cause à effet) "Le jeu vidéo suivra cette voie" dit elle enfin. Dieu vous entende ! Elle termine sur l'affirmation suivante :
MASS APPROACH TO DESIGN VIDEO GAMES LIMITS THE AUDIENCE

Et là, pour le coup, je suis complètement d'accord. Une autre conférence qui m'a particulièrement intéressé est celle de Charles Cecil, l'auteur célèbre de la série Broken Sword et dont je retenais surtout la sentence fracassante au milieu des années 90 : "le point n click est mort". 


Je lui en voulais d'avoir dit cela, parce que pour moi le point n click n'a jamais été, dans son âge d'or, les Broken Sword (qui sont venus plutôt après la vague LucasArts / Sierra) et que sa condamnation amère était pour moi plus le constat de la rentabilité déclinante de sa licence que le véritable constat de la situation du jeu d'aventure dans la deuxième partie des années 90. L'avenir bien entendu lui a donné tort, mais il en a été le premier bénéficiaire. Donc voici son histoire un peu plus développée. Donc Charles commence en 1981 avec un jeu d'aventure appelé "Adventure B" (parce que la A était nulle, déclare t il), marketée ensuite sous le nom de INCA CURSE, une aventure textuelle avec, il l'avoue, plein de fautes d'orthographe. C'était l'époque, explique-t-il, de la première scène Indie, avec les "bedroom workers", c'est à dire des codeurs qui faisaient tout le boulot dans leur lit. Une époque où il vendait ses jeux un par un, dans des boites, directement avec le client. Son premier "gros jeu", c'est bien entendu Lure of the Temptress (très reconnu sur la scène internationale, avec un système, je crois me souvenir, d'intelligence artificielle des PNJ qui vaquaient tous à leurs activités). Ce point'n'click qui n'a rien à envier à la plupart des jeux d'aventure de l'époque à coûté 10 000 £ de budget en développement. Puis après est venu Broken Sword, largement plus ambitieux. Milieu des années 90, la PS1 arrive. C'est l'arrivée de la PS1 qui a tué, selon Charles Cecil, la scène indie de l'époque.
"PLAYSTATION KILLED ADVENTURE GAMES"

"La playstation a eu tellement, mais tellement de succès, qu'elle a redessiné le marché du jeu. Les gens voulaient des jeux 3D, des jeux à l'ambiance viscerale. Certes on pouvait continuer à faire des jeux d'aventure et il y avait toujours un public...mais les commerçants ne voulaient pas les mettre sur leurs étagères.""Tout devait être en 3D. Cela avait plusieurs conséquences : déjà, il y avait cette histoire d'uncanny valley et ce n'était pas super satisfaisant. Ensuite cela portait le budget de réalisation des jeux à 1 million, voire 4 millions de £, soit 100 fois plus que nos premiers jeux. Les risques étaient considérables.""Comme on avait besoin de beaucoup plus d'argent, on devait s'adjoindre le concours d'éditeurs et de financiers. Le contact avec les joueurs était rompu. Comment faire du bon travail dans ces conditions ? C'était la fin de la scène indie." Pour Charles Cecil, la scène indie revient sous le terme NEO SCENE INDIE avec l'arrivée de l'iPhone en 2007. L'iPhone permet selon lui : - de démocratiser le jeu (avec les écrans tactiles, on peut toucher des non gamers hardcore) - donc d'augmenter le marché potentiel et permettre le développement de niche - itunes permet de commercialiser facilement un jeu, sans passer par un réseau de distribution - l'ére 2.0 du social média permet un feedback en direct des joueurs C'est le retour de la scène indie. Concernant le feedback, Charles cite un exemple : "Nous avons annoncé Broken Sword 5 sur Steam avec des DRM. Je me suis fait incendier sur Twitter, par environ 2500 personnes. C'est très peu par rapport à nos chiffres de vente, mais j'ai eu cette relation personnelle avec eux, et nous avons publié le jeu sans DRM. Nous avons enfin renoué avec nos clients." Entre autres informations, Charles Cécil déclare également : - que selon lui, c'est une bonne chose de mettre un jeu gratuitement sur un jour (comme le fait parfois Amazon ou Apple), car cela génére un pic de vente suite à la mise en ligne. - que le Kickstarter, c'est trop génial (grrrr) car cela met en "otage" les joueurs qui veulent vraiment jouer à votre jeu : ils créent d'eux mêmes un buzz pour que les financements soient atteints car si ce n'est pas le cas, le jeu ne sera jamais publié. - les allemands n'utilisent pas de carte de crédit, alors il vaut toujours mieux avoir un compte Paypal pour qu'ils payent. Enfin, toujours dans la lignée de Susan, il conclut sur la scéne Neo Indie comme une période d'opportunité unique : "N'importe quel programmeur médiocre aurait pu faire Angry Birds. Le fait de ne pas avoir à se focaliser sur la technologie pour faire un hit colossal rend cette période unique."



Charles Cecil prend en illustration cette très ancienne carte du monde.
Il déclare que celle-ci ne ressemble pas au monde actuel MAIS permet d'avoir
des repères suffisants pour trouver la localisation de grandes cités antiques.
Pour lui, la connaissance du code est similaire : on peut arriver à ses fins,
sans pour autant faire quelque chose de parfait.

Sinon en deux photos, le talk d'Harmonix (Guitar Hero) montrant et d'une l'évolution de leur chiffre d'affaire :


Et de deux, la complexité des relations de droits d'auteurs pour un jeu comme Guitar Hero :


Grimnir, une fonte pour Skyrim

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Suite à mon très lointain article sur les polices de caractère dans les jeux vidéo (http://fibretigre.blogspot.fr/2012/01/ces-classiques-typos-des-jeux-video.html) on m'a contacté pour me présenter Grimnir, une fonte à votre disposition pour rendre votre Skyrim plus lisible et plus cohérent dans son propre univers, développée par JB Morizot (Twitter : @jb_morizot)




Voici Grimnir en action :




Pour installer Grimnir, voici la procédure :


Télécharger le fichier fonts_en_mod.swf ici: https://github.com/jbmorizot/Grimnir/raw/master/fonts_en_mod.swf

Copier le fichier fonts_en_mod.swf dans le dossier common/Skyrim/Data/Interface 
(chemin de  l’installation via Steam, mais ça dois toujours être plus ou moins ça). 
Ne SURTOUT PAS supprimer le fichier fonts_en.swf (ou quelque soit son nom) 
car il contient les autres typos du jeu (daedrique, draconique, celle des livres, etc.).

Le moment "risqué" : ouvrir le fichier fontconfig.txt file 

(surtout garder une copie si on veut revenir au Futura de base) et ajouter sous la ligne 2 

 fontlib "Interface\fonts_en_mod.swf"

Ensuite supprimer les occurrences de "Futura Condensed" et les remplacer par "Grimnir" 

Typiquement le fichier ressemble à ça (les modifications sont en gras), un copier-coller est peut-être le plus simple :

fontlib "Interface\fonts_console.swf"
fontlib "Interface\fonts_en.swf
fontlib "Interface\fonts_en_mod.swf"
map "$ConsoleFont" = "Arial" Normal
map "$StartMenuFont" = "Dragon_script" Normal
map "$DialogueFont" = "Grimnir" Normal
map "$EverywhereFont" = "Grimnir" Normal
map "$EverywhereBoldFont" = "Grimnir" Normal
map "$EverywhereMediumFont" = "Grimnir" Normal
map "$DragonFont" = "Dragon_script" Normal
map "$SkyrimBooks" = "SkyrimBooks_Gaelic" Normal
map "$HandwrittenFont" = "SkyrimBooks_Handwritten_Bold" Normal
map "$HandwrittenBold" = "SkyrimBooks_Handwritten_Bold" Normal
map "$FalmerFont" = "Falmer" Normal
map "$DwemerFont" = "Dwemer" Normal
map "$DaedricFont" = "Daedric" Normal
map "$MageScriptFont" = "Mage Script" Normal
map "$SkyrimSymbolsFont" = "SkyrimSymbols" Normal
map "$SkyrimBooks_UnreadableFont" = "SkyrimBooks_Unreadable" Normal
validNameChars "`1234567890-=~!@#$%^&*():_+QWERTYUIOP[]ASDFGHJKL;'ZXCVBNM,./qwertyuiop{}\\asdfghjkl;'zxcvbnm<>?|¡¢£¤¥¦§¨©ª«®¯°²³´¶·¸¹º»¼½¾¿ÄÀÁÂÃÅÆÇÈÉÊËÌÍÎÏÐÑÒÓÔÕÖרÙÚÛÜÝÞßàáâãäåæçèéêëìíîïðñòóôõö÷øùúûüýþ ÿ "




Rendez-vous à Winterhold !





Sexe, Drogue et Jeux Vidéo : un Molyneux Rock'n'Roll à la cité des sciences en 20 citations

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Hier il y avait la conférence de Peter Molyneux, auteur de Populous, Powermonger, Black & White, Fable...et personnalité rayonnante du monde du jeu vidéo, connu pour ses promesses extravagantes.



Le créateur nous a raconté sa vie...et de nombreuses anecdotes croustillantes. Et oui, c'est ma traduction donc si c'est pas au mot près, désolé.

Voici une sélection de ses anecdotes les plus insolites :

"J'ai fait de l'exportation de haricots en boite vers le Moyen Orient. Alors voyez-vous, c'est surprenant, il y a un fort besoin de tas de choses au Moyen Orient. Mais pas de haricots en boite, apparemment."



"J'ai cru que j'allais tellement vendre d'exemplaires de mon premier jeu (Entrepreneur) que j'ai appelé la poste locale en leur demandant de renforcer leurs équipes. J'ai défoncé ma boite aux lettres pour que l'entrée soit très grande et que le facteur puisse déverser mes milliers de commandes. J'en ai vendu 2 copies. Et je pense que ces deux copies ont été achetées par ma mère."



"J'étais pas du tout dans le jeu vidéo. J'étais dans la base de données. On crevait la faim. Et puis un jour Commodore nous envoie une voiture avec chauffeur et nous invite dans le plus grand restaurant. Ils nous offrent les 6 premiers Amigas sortis de l'usine. Et ils nous demandent de faire des jeux. En fait, ils s'étaient trompés de boite, ils nous avaient confondu avec une grosse boite presque homonyme qui faisait des jeux. Alors j'allais faire quoi, garder ces Amigas qui ne m'appartenaient pas ? Bon, ben c'est ce que j'ai fait."



"Je suis nul en code. J'arrivais même pas à faire bouger des personnages, c'est dire le niveau."



"Electronic Arts nous appelle. Populous allait sortir dans 48h. Il nous dit "on veut tester votre jeu avant de le mettre en boite, donnez nous des cheatcodes". Et là je me dis, mince, on a pas écrit la fin de Populous. Donc voilà, la fin de Populous a été écrite en 48h, et oui, c'est une fin pourrie."


"Electronic Arts m'appelle et me dit "Ca fait quoi d'être millionaire ?". Je comprends qu'on a tout vendu et je reste bouche bée. Alors ils poursuivent en disant : "Sinon je sais pas si vous avez lu votre contrat, mais va falloir nous faire la suite en 6 mois. Et oui, on vous paiera dans 9 mois." Les enfoirés."



"Donc je vais au pub avec David Braben (l'auteur d'Elite) et d'autres créateurs de jeu et on parle code. Ils codent tous en assembleur. Et moi, en C. Ils se moquent de moi. 5 ou 6 bières plus tard, je rentre saoul au bureau, et j'efface tout le code de Powermonger en C, et je recommence en assembleur. La pire idée du monde si vous voulez mon avis."



"Il ne faut pas laisser interférer la réalité avec le développement de jeu. Powermonger aurait pu être le premier RTS. Mais voilà, des gens sont venus et ont dit : "mais comment le Dieu-joueur informe ses troupes de leurs déplacements ? Ca n'a pas de sens, de juste cliquer." Alors j'ai créé un système de pigeon voyageur. Quand vous vouliez que votre troupe se déplace, vous envoyiez un putain de pigeon voyageur qui prenait du temps pour qu'elles se déplacent. Heureusement qu'on pouvait tuer ce pigeon - c'était atroce."



"En Angleterre, c'est très grossier de venir à l'heure en soirée. Alors pour ceux qui venaient en avance, j'avais préparé un grand bol de Chili et je le recouvrais d'un ingrédient spécial (de la drogue). Et qui se pointe pile à l'heure ? Le responsable ventes d'Electronic Arts. Et il se jette sur le Chili. Et il prend juste le dessus du Chili, là où il y a mon saupoudrage maison. Le mec a terminé la soirée au fond du jardin, enveloppé dans du papier aluminium."



"Un shooter en 3D, mais oui. J'aurais pu donner une kalach au héros et j'aurais été tellement riche. Mais voilà, j'ai pris trop de drogue alors au lieu d'une kalach je lui ai donné un TAPIS VOLANT. Magic Carpet."



"Quand j'ai dit à l'équipe qu'on allait développer un jeu sur les parcs d'attraction (Theme park) ils se sont insurgés en disant "On ne veut pas amuser des enfants dans des poussettes, on veut les renverser ou leur tirer dessus !"



"Je trouve les James Bond super tristes. Le méchant investit énormément d'argent à faire une base super cool dans un volcan, il a des armes nucléaires et James Bond arrive l'air de rien, tire une balle et tout est détruit. C'est vraiment triste. C'est là que j'ai eu l'idée de Dungeon Keeper."



"Au début de Lionhead, on avait pas de bureau. Le boss de Sega est venu me voir et donc je l'ai reçu dans ma cuisine. A un moment, il se fige et transpire. En fait, le caniche de ma femme de ménage était en train de s'exciter (et de se finir) sur sa jambe. Et là, quand j'ai vu l'ADN de ce chien sur la jambe du boss de Sega, je me suis dit, Peter, tu dois trouver des vrais bureaux."



"Lionhead, le nom vient du hamster de mon associé. Le jour où on a annoncé la création de Lionhead aux journalistes, on leur a proposé de voir le hamster. Et bien il était mort."



"Pour Black & White, il nous fallait un codeur hors pair. On a fait passer un entretien de recrutement à des tas de types qui n'avaient pas la carrure. Puis finalement on a reçu un certain Jean Paul. Un français. On lui dit "pouvez-vous faire un monde immense procédural en 3D" ou "pouvez faire de l'animation en morphing", bref des tas de questions de plus en plus audacieuses, et à chaque fois il répond "oui". Alors on l'embauche. En fait, le mec ne savait pas parler anglais, mais juste dire "oui". Mais il s'est bien débrouillé."



"C'est horrible pour une équipe de dev d'avoir un salaud comme moi toujours à proposer des idées."



"On m'a menacé de mort pour ne pas avoir tenu ma promesse qu'on pouvait planter des arbres dans Fable. Empechez moi de parler aux journalistes, bon sang ! Je suis nul en PR !"



"Je voulais que ma copine couche avec moi. Je lui parlais de jeux vidéo - oui, pour draguer, je parle jeux vidéo - et je lui dis "ben, venons chez moi, je te montrerais mes jeux", mais bien sûr le message était "viens chez moi on couchera ensemble". Bon, une fois chez moi, je lui montre mes jeux. La fille n'y arrive pas, elle s'énerve et balance la manette contre un mur. C'est là que j'ai eu l'idée du combat avec une seule touche dans Fable II."



"Kinect, c'est Minority Report. Ca fait rêver mais en vrai c'est hyper fatiguant. Je rêve d'un Kinect où on pourrait être assis et il capterait nos moindres mouvements de doigts ou de main. Oui, c'est une souris. "

"Merci public pour les royalties, merci public pour les insultes, j'adore changer d'avis !"


Police de caractères et développement de jeu vidéo, le cas The Crew

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La création d'un jeu vidéo passe souvent par l'externalisation de compétences, c'est souvent le cas pour la musique et le traitement du son, parfois pour le graphisme, parfois aussi pour ces choses que les développeurs détestent, à savoir la communication et les relations presse.

Ici nous allons parler d'un aspect relatif au graphisme : la police de caractères.


Beaucoup de jeux utilisent du texte à plus ou moins fort usage, et de façon plus ou moins habile.

Sans TV HD, impossible de lire les sous titres du jeu non doublé en français Red Dead Redemption ou même de Dishonored.



Les noms de rue dans Unity sont en arial alignés selon une règle kabbalistique, et vous sautent dessus comme un assassin pour vous poignarder les deux yeux.



Une police de caractère ayant de la personnalité peut vendre, comme celle de Sunset overdrive qui a été repris sur le store de Sony et qui a fait indirectement de la pub pour le jeu, ou encore la fameuse "typo de diablo" (l'Exocet), qui signe l'identité du jeu.

J'ai rencontré JB Levée, boss de Production Type, qui a élaboré la police de caractère du MMO The Crew que vous verrez en illustration ici.



Ce jeu édité par Ubisoft et réalisé par Ivory Tower (des français), a choisi de faire réaliser sur mesure sa (ses) police(s) de caractères.


Entre utiliser  une police de caractères gratuite (sur Dafont) et se faire faire quelque chose de custom (travail qui se chiffre en milliers d'euros pour les petites productions) il y a un grand écart que la majorité des indés ne prendront jamais.


Pourtant le système "gratuit" pose des problèmes. Par exemple sur Out There, une majorité des retours concernait un F minuscule trop grand et qui gênait la lecture. De même, la police de caractère russe n'est pas celle officielle des autres versions. Ce n'est pas un cas isolé dans le jeu indépendant - et encore pour nous, nous avons daigné traduire le jeu dans d'autres langues.


Après vient l'achat de licences : il faut compter "quelques centaines" d'euros pour avoir les droits sur une police de caractère en particulier souvent vendu par les "triple A" de la police de caractère (Monotype). Mais de la même façon qu'il existe des jeux vidéo indépendants, il existe des créateurs de caractères indépendants et ils peuvent proposer des arrangements intéressants.


 Quand The Crew (ou d'autres grands noms) commandent une police de caractères, c'est pour avoir une identité et la sécurité de son adaptation dans les différents alphabets ; mais aussi c'est un support technique pour que les fontes tiennent et gardent leur lisibilité dans les différents usages opérés sur l'écran. Enfin, c'est pour une raison simplement économique : le coût d'exploitation d'une licence de police de caractère appliquée à la vaste distribution du jeu dans tous les pays revient plus cher que la création d'une fonte.


Si vous souhaitez quelques adresses de créateurs de caractères sympathiques, n'hésitez pas à m'envoyer un message sur Facebook !

Chemical Knights / GoG / The Witcher

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Vendredi (et non jeudi, comme quoi les habitudes...) JV Magazine, en association avec JV.com et la Cité des Sciences présentait une fois de plus une de ces merveilleuses masterclass, cette fois-ci avec Marcin Iwinski, papa de The Witcher, de GOG et du futur Cyberpunk 2077.

Si vous êtes sur Paris et que le monde des jeux vidéo vous intéresse, vous devez être présent (ce billet n'est pas sponso...), ce qui se dit, et qui bien sûr doit être décrypté à travers une certaine langue de bois des invités, est passionnant, que ce soit au niveau du dev, de la communication, de la distribution...ou tout simplement de l'état d'esprit : dans presque tous les parcours de vie de grands noms que j'ai pu suivre aux Masterclass, c'est souvent l'histoire de petits gars partis de rien qui finissent par sortir Mass Effect ou The Witcher.



La vidéo complète sera bientôt publiée sur jv.com et toutes vos questions sur l'open world très beau de The Witcher auront probablement leurs réponses, mais ici je vais plutôt vous parler de GOG.

Marcin explique dans sa masterclass que l'Europe de l'est et la Pologne en particulier subissaient un piratage sauvage (qu'on peut voir aujourd'hui de façon institutionnalisée en Chine). Tout comme en Chine aujourd'hui, avant GOG, il n'y avait pas de notion d'original ou de piratage dans le domaine des jeux vidéo. On achetait un produit pour un prix, qu'importe si l'éditeur obtenait l'argent à la fin.

Le génie de Marcin a été de vendre officiellement les jeux et de monter en qualité les localisations. Là où on jouait à des jeux traduits en Russe avant, GOG proposa rapidement des jeux traduits en polonais, avec livret inclus, et suivi de service après vente, pour un prix identique.

La solution légale était donc moins coûteuse et plus qualitative que le piratage...vous avez entendu Hadopi ?

A la fin de la masterclass, grand prince, Marcin a offert à toutes les personnes présentes un code de téléchargement sur GoG de The Witcher 1 et The Witcher 2.

Et ce code, je vous le donne : 6A83EB76

Bravo au premier qui pourra télécharger le jeu gratuitement !

Sinon, après la Masterclass se tenait une Game Jam à la Cité des Sciences autour de trois périphériques : L'Oculus Rift, un appareil à electrodes qui bouge votre bras malgré votre volonté, et un capteur de mouvements / accéléromètre.


Il fallait imaginer en 20 minutes un jeu à partir de l'un ou plusieurs de ces 3 périphériques sur le thème "Science in Motion". J'étais dans une équipe composée de Chérif-et-son-pote (je connaissais Chérif qui est un excellent codeur et qui enseigne dans plusieurs écoles aujourd'hui).

On avait deux codeurs et pas de graphiste, que faire ? Qu'à cela ne tienne !

Je leur ai pitché ce (super) jeu : CHEMICAL KNIGHTS !

Les chemical knights sont un duo de chevaliers au service du bien qui désassemblent les molécules pour sauver des vies.

C'est un jeu multijoueur éducatif basé sur l'accéléromètre.

Vous avez une molécule, par exemple, une molécule d'eau, et un joueur attrape un atome (oxygène), l'autre joueur attrape un autre atome (hydrogène), ils se mettent dans le bon angle et tirent chacun de leur coté, et poc ! Ils ont deux atomes séparés.

Bien entendu, s'ils se coordonnent mal (ils ne peuvent pas voir le "grip" de l'adversaire) et qu'ils attrapent le même atome, ils coupent l'atome en deux ce qui provoque une EXPLOSION NUCLEAIRE.

Il y a 3 niveaux à Chemical Knights, comme vous pourrez le voir dans ce somptueux document de game design :



1er niveau : 

Un sous marin est bloqué au fond de la mer. Les gens n'ont plus d'oxygène et plus de carburant pour remonter. 

Les chemical knights doivent désassembler des molécules d'eau de la mer (H2O) pour faire du dioxygène (O2) pour sauver les marins et du du dihydrogène (H2) pour qu'ils remontent.

En temps réel ils voient le nombre de personnes en train de mourir (de 50 personnes vivantes à 0) donc il faut sauver au moins 1 personne.

2ème niveau : 

La soirée au Macumba a été très arrosée. Les fêtards, ivres morts, sortent de la boite et rentrent en voiture. Bien entendu, ils vont avoir un accident et MOURIR.

Heureusement, les Chemical Knights sont là pour désassembler les molécules d'alcool en sucres et acides gras et désaouler hyper rapidement les gens.



3eme niveau

Une puissance ennemie a empoisonné notre cher président et a inversé la chiralité des molécules dans son sang. 

Les chemical knights doivent transformer des molécules levogyres en dextrogyres le plus rapidement possible pour sauver la FRANCE !

Bon j'espère que Chérif-et-son-pote ont bien bossé pour que vous puissiez un jour vous aussi, sauver des sous marins, des fêtards, et la France.

Gerardmer 2015

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Bonjour,

J'ai été sélectionné pour être jury SyFy à Gerardmer, le festival international du film fantastique.

Bon j'ai un ADN très SF, et avec le temps, j'ai compris que si la SF était l'art des grandes idées (et si l'homme devenait immortel ?) le Fantastique est au contraire l'art de la "petite histoire" - mais celle qui justement, touche personnellement.

L'équipe qui s'occupe de la sélection est au top du top et si vous voulez être sélectionné ou avoir de bonnes surprises pour les prochaines occasions, disons que suivre le compte @canalsat sur Twitter serait un bon début de stratégie.

A mes cotés au Jury, casting 5 étoiles, Jack Parker, dont je croise la route inévitablement, passionnée de fantastique et probablement future poids lourd de la critique de film fantastique en France, mais aussi l'équipe de Brain Damaged, super magazine sur la culture fantastique composés d'oiseaux de nuit dont je croise aussi le chemin, souvent dans des lieux insolites - souvent dans des bureaux déserts à 1h du matin (true story).

Alors il y aussi Dailymars, que je connais moins mais qui me donne envie de manger du chocolat et The Place to Be.

Au grand Jury, y aura du très lourd, avec Christophe Gans, président du Jury, Alexandre AJA @AlexandreAja, Franck KHALFOUN @Fknyla, Marie KREMER, Gregory LEVASSEUR, Alysson PARADIS, ROB et Christa THERET @TheretChrista.

Christophe Gans, je trouve ça cool car finalement il a fait un film sur Silent Hill, ce qui montre que le domaine du JV se rapproche du film non pas dans une dimension quantic-dreamesque, mais plutôt dans l'approche sensible.

Je vous mets les comptes Twitter comme ça vous pourrez suivre leurs impressions en direct et elles seront beaucoup qualitatives que mes divers chouinements sur la température, la nourriture ou le fait que la rive gauche me manque.

Et voici les films de la sélection que j'aurai à juger :

CUB premier film de Jonas Govaerts



à mon avis ce film va traiter d'un mignon petit louveteau,
ça tombe bien j'ai toujours adoré les films avec des animaux 


EX_MACHINA 1er film de Alex Garland



Waouh, on dirait Portal 3


GOODNIGHT MOMMY 1er film de Sverin Fiala & Veronika Franz 



Oooh une histoire avec des masques, j'adore les déguisements



HONEYMOON de Leigh Janiak



à vue de nez, on dirait une comédie romantique
entre deux passionnés d'horticulture, original



IT FOLLOWS de David Robert Mitchell



Cette jeune fille semble attachée, une comédie romantique
sur le bondage ?


JAMIE MARKS IS DEAD de Carter Smith



Regard mystérieux


THE MAN IN THE RED JACKET de Aik Karapetian 



y a marqué orange sur l'affiche, je sais pas pourquoi, débrouillez vous avec ça


THE SIGNAL de William Eubank



La tagline est parfaite pour cette sélection


THE VOICES de Marjane Satrapi 



okami


THESE FINAL HOURS de Zak Hilditch 



"the best film of the year" sur l'affiche, bon, je vais quand même vérifier hein


Bon vous avez compris que cette présentation se voulait un peu alternative et humoristique, j'essaierai d'être à la hauteur de ces films brillants - même si comme le disait le critique dans Ratatouille : la meilleure critique du monde sera toujours inférieure au plus médiocre des plats.

Assassin's Creed 5 et le sang de la noblesse

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Hello,

Je voulais dire quelques mots sur le prochain Assassin's Creed.

J'aime beaucoup cette licence car elle est très précise dans son aspect historique (quand on enlève la surcouche scénarisée) ; je prends plus de plaisir à jouer à d'autres jeux, mais j'en apprends moins !



J'attends le prochain Assassin's Creed au tournant, non pas parce qu'il se passe chez moi, mais surtout parce qu'il se situe dans une époque charnière qui reprend les thèmes de ce qu'est fondamentalement AC.

AC, avec son animus, reprend l'hypothèse (non scientifique) de la "mémoire génétique". En gros, vous vivez des évènements, ces évènements sont d'une façon ou d'une autre mémorisés dans votre séquence génétique, et quand vous avez un enfant il hérite d'une partie de cette séquence génétique. Ainsi, comme un livre, votre histoire se transmet par votre descendance.

C'est intéressant car cette hypothèse non scientifique rejoint un fantasme ancien sur lequel s'est fondée le royalisme et la monarchie (et la noblesse), c'est à dire que le pouvoir, ou plutôt la qualité d'un homme se transmettait du père au fils, au même titre que la couleur des cheveux et, selon certaines conditions, la couleur des yeux.

Placer AC à la révolution française, c'est placer toute la question de la mémoire génétique dans un contexte historique : la révolution française n'a pas de démarche scientifique, mais elle dit en gros (et à terme, parce qu'on ne change pas en un jour mille ans de croyances) : c'est pas parce que vous êtes fils de titulaire du pouvoir que vous le serez vous même. Le pouvoir du sang, c'est fini.

Or notre héros peut vivre ses aventures grâce précisément au pouvoir du sang.

Peut-il légitimement soutenir les valeurs des révolutionnaires ? AC maintient toujours une ambiguité entre les camps, plaçant le conflit entre deux factions secrètes.

Il y a bien d'autres choses que j'aimerais voir dans un AC, à commencer par le fait qu'un homme vive à travers l'animus la vie d'une femme (et ses élans amoureux pour des hommes par exemple), ou alors qu'il ait un ancêtre schizophrénique avec la conscience de cette invasion mentale virtuelle ; j'imagine un dialogue intérieur entre ses itérations du passés et pourquoi pas des conflits.

C'est dans tous les cas une belle aventure avec beaucoup de potentiel.

Global Game Jam 2015 : les jeux des étudiants parisiens

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Le jeu vidéo est un secteur bizarroïde, aux mutations très rapides, où partir en dernier donne parfois une bonne chance d'arriver premier.

Il n'est pas rare de voir des étudiants de deuxième année triompher face aux troisième année, et des étudiants tout simplement moucher de leur talent des professionnels accomplis.

A ce titre, j'avais été, en tant que Jury de l'ICAN l'année dernière, stupéfait par la qualité des projets étudiants rendus, et j'avais même poussé personnellement certains projets en vue de publication. Par ailleurs Kawiteros, projet étudiant, va être publié chez Neko - et d'autres comme Stonk ou Phostain, méritent dores et déjà leur place sur les stores.

Cette année on m'a proposé d'être Jury à la Global Game Jam parisienne de l'ICAN / ESGI.

Pour les non initiés, les Jam sont des petits rendez-vous, en général le week-end, où des développeurs se mettent au défi, seuls ou en équipe, de réaliser en 48h un jeu.

Les jeux sont rarement finis, donnent parfois lieu à des succès spectaculaires. C'est souvent un "bon moment" passé car la création est un exercice agréable, et qu'en 48h, on ne fait pas les finitions laborieuses et interminables qui constituent 99% de la difficulté de faire un jeu.

La Global Game Jam se veut l'évènement incontournable des Jam : c'est simultané, mondial, et brasse en prix des (dizaines, centaines ? de) millions d'euros. Cela devient une institution professionalisée, presque effrayante de pouvoir.

Mes co-jury étaient : Maxence, le Game Designer d'Amplitude, l'ex boss de l'Ican, Maxime de Capital Games et un professeur de Game Design de l'Ican / Esgi.


Le vendredi à 18h nous nous sommes tous réunis dans l'amphi de l'ESGI pour voir les "Keynotes" de la GGJ. J'ai retrouvé des jeunes étudiants avec qui j'avais travaillé (voire mon post sur Capture) et d'autres que j'ai encouragé à publier leur jeu.

La Global Game Jam impose un thème, souvent hyper vague ("je suis ce que je vois"), et je pressentais un truc un peu centré sur les thèmes brûlants du Gamergate, comme la diversité de représentation des héros.

Voici les trois Keynotes :


Les keynotes consistent en :

1) un message dégoulinant de pathos du style "vous êtes venus, vous faites partie de notre grande famille", avec des images de Mitu, la codeuse britannique qui court sur une plage

2) un message pseudo-cool de deux créateurs de jeux brésiliens - mais au look 100% hipstero-san-franciscain -qui ont grand peine à nous dire qu'il faut faire des jeux passant le Bechdel test, puisqu'ils ont du mal à dire Bechdel 

3) un message (second degré ?) bizarroide de Reiner Knizia, créateur de jeu de société allemand qui a été honteusement tiré de son puzzle pour dire que "demain, les jeux de société s'intégreront à la réalité et au virtuel" dans un clip au rythme si lent qu'il ferait passer un épisode de Derrick pour une partie de Super Hexagon.

Et enfin 4) le thème.

Sur les keynotes, je dirais qu'on subit la grande maladie (dont on s'extirpe péniblement, mais petitement, j'en parlerai plus tard dans mon article sur la Casual Connect Amsterdam) du "tout américain". La britannique a fait un jeu sur une référence culturelle 100% américaine, les brésiliens auraient été plus convaincants à parler de problèmes sociaux brésiliens que des problèmes du Gamergate, et l'allemand...non l'allemand est bien.

La Global Game Jam se veut globale mais bute encore sur l'incapacité des américains à imaginer des cultures aux problématiques et aux enjeux différents de ceux qu'implique leur mode de vie. 

Mais ce n'est pas grave : la salle, constituée à 95% d'hommes, a reçu les keynotes avec le sourire et parfois quelques rires.

Le thème nous a donc été enfin dévoilé :

WHAT DO WE DO NOW ?

C'est vague mais c'est cool (et ca me rappelle un peu les maîtres de jeu dans les jeux de rôle qui exposent une situation et disent "et maintenant vous faites quoi ?"

Et la grande compétition a commencé...(moi je suis parti à 404 pour l'enregistrement).

Je suis repassé le lendemain pour faire un point avec les équipes.


Ils avaient tous une idée précise de leur jeu et accusaient un peu la fatigue. Une équipe s'était lentement éclatée et avait abandonné le navire.

Il y avait aussi quelques pros venus tenter leur chance.


Et le surlendemain, après des siestes improvisées de nos valeureux codeurs sur des matelas gonflables, et près de deux jours et demi de travail ininterrompu, on a pu commencer l'évaluation des jeux.

Les voici un par un :

BackStab Bros : 

est un jeu multijoueur de plateforme, semi-coopératif, semi-compétitif, puisque des obstacles majeurs doivent être résolus à deux, mais qu'un seul peut gagner la course (avec un stage final en mode double dragon où les héros s'affrontent). Et bien le jeu fonctionne, il est drôle, on prend du plaisir, il manque de lisbilité - mais il reste très sympa !





Real Tiki Strategy :

Bon perso, ce jeu était un peu mon préféré. C'est un RTS (comme Dune 2) où on entre des ordres au clavier. Comme dit Maxence "il y a un vaste territoire encore inexploré par les créateurs qui est le typing game" (cette phrase est drôle mais je rêve de faire un jeu de baston / typing game). 



Ce qui m'a enchanté est l'aspect autonome des unités qui partent en mode "Yolo" quand on ne s'occupe plus d'elles, mais aussi le travail sur l'univers : à la base l'univers était med-fan-boring avec des gobelins, des orcs, etc...et il a été reskinné pour utiliser les esprits de la mythologie polynésienne, les tikis. C'est pas la super classe ?




Ice Field Madness :

...est un jeu ambitieux, car bim, c'est un party game avec non pas un jeu, mais 4 ou 5. Maintenant des mini jeux avec des pingouins...on a déjà vu ça, non ? Les jeux fonctionnent, il y a même un feedback très bien foutu et drôle entre chaque jeu. Il y a du boulot derrière.





Each Planet :

...est un jeu intéressant, hybride, un peu jamais vu...un jeu de Jam quoi. On commence avec une série de questions posées au joueur, dans l'univers du petit prince : "J'ai trouvé une rose, dois je en prendre soin ?". 


Suivant les réponses, un univers est créé sur une minuscule planète et un pouvoir est attribué au joueur : il peut être géant et tout écraser sous son passage, pleurer des larmes qui font pousser des baobabs, ou simplement sauter. L'expérience est intéressante et surprenante.


Game of Life :

est un jeu basé sur le cellular automata bien connu, transformé en RTS, mené par une équipe de professionnels. Le jeu est ultra polished et se fend d'un tutorial, d'unités à débloquer, etc...il a le réel potentiel d'un jeu professionnel qui pourrait très bien se vendre. En tant que jury, le lien avec le thème était...discutable. Tout le monde vient parfois plus ou moins avec ses jeux déjà en tête aux Jams mais le grand écart était un peu grand à mon goût. Il reste un des jeux auquel j'aimerais rejouer !


Prizombies :

Au départ Prizombies s'appellait "Prisoner's Rainbow". Le pitch : vous êtes le dernier survivant d'une apocalypse zombie et vous devez vous échapper d'une prison glauque. Je leur ai dit "pourquoi rainbow ?" Et l'un d'entre eux a dit que c'était juste un nom cool. Comme j'étais déçu qu'il n'y ait pas d'arc en ciel, ils ont du préférer changer de nom que de rajouter un arc en ciel.


Bref, l'ambiance sonore est top, le jeu est difficile et fonctionne bien. 
Un peu sinistre et pas très Bechdel ou codeuse-britanique qui fait coucou de façon mignonne avec sa main-compliant mais idéal si vous attendez la fin du monde en écoutant du death metal.


Là Maxime explique qu'il déteste le jeu, mais que comme il est bien
codé en Unity, il adore en fait


Gleam :

Gleam est épatant techniquement. 


Un FPS dans le noir, où avancer "fabrique" le monde de façon musicale et en 3D, avec des effets à la Tron. C'est un "music FPS" selon ses auteurs. C'est beau, impressionnant, le rapport avec le thème est étrange, je m'interroge sur le devenir de ce jeu (la Gaité Lyrique serait ravie de l'exposer j'en suis sûr).




Drunken Dragon :

Drunken Dragon est l'histoire d'un lendemain de cuite d'un héros qui se retrouve à poil enchainé à un dragon dans la neige. Donc il est obligé de rester près du dragon parce qu'il le réchauffe, mais pas trop près non plus sinon il le mange. Un platformer-puzzle ardu, avec une fin "philosophique" (les deux protagonistes finissent par s'aimer).



Crash :

Crash est un jeu surprenant qui se rapproche de Frog Fractions. Ca commence en parodie de platformers où le gentil doit tuer des méchants avec une arme invincible. Mais le méchant fait crasher le jeu, et le jeu se poursuit dans divers niveaux en utilisant l'interface windows (par exemple on doit fermer des fenêtres dans un temps imparti). Le jeu provoque de nombreux rires et fait passer un bon moment, sans être très ambitieux.


Là il faut éviter le logo Chrome qui rebondit de partout


Build Your Team :

Les créateurs avaient l'ambitions de faire un grand castelvania like avec des personnages les ressemblant (tout simplement) et ils ont essayé de s'en rapprocher un maximum. Il leur manque clairement 2 jours ou 2 semaines de travail en plus mais le résultat fourni en aussi peut de temps reste honorable. 



What do we do Now :

C'est la triste histoire (vraie) d'une équipe de trois qui se fait abandonner par son codeur, puis par un autre developpeur. Mais le dernier restant n'abandonne pas et fait un petit jeu avec Construct...un jeu de plateforme avec une vraie fin, qui explique le problème d'être abandonné par le codeur. Bravo à lui pour avoir quand même livré un jeu !

The Moron Escape :

Est un jeu lui aussi fait tout seul par un jeune développeur motivé qui voulait relever le challenge. Alors on a un jeu en vue du dessus à la Monaco où deux cambrioleurs doivent voler un musée. Plus on hacke les services de sécurité, plus votre partenaire débile dit des choses du style "What do we do now ?" et du coup se fait repérer par la police. Le jeu est encore embryonnaire mais convaincant, marche de bout en bout, avec même une séquence de voiture à la fin !



Bad Day for a Spy :

Un espion doit s'infiltrer dans un batiment secret. Il est talentueux donc invisible. Problème, il a des gaz, et du coup, ses bruits et ses odeurs le font détecter aux gardes. Mais il peut retourner la situation en les utilisant justement pour les amener dans certains endroits...


Le jeu est très solide et fonctionne. Créé par des étudiants spécialisés en IA, le jeu est riche en situation émergentes et il y a même un petit coté suspens qui prend aux tripes (si je puis dire). 
Cela étant...comme je leur ai expliqué en sortie de Jam, leur principe, qui est une sorte de blague, est un peu décevant. Il est sûr qu'un jeu avec ce thème puisse marcher, en revanche, imaginons qu'il marche, les auteurs seront-ils "les gens qui ont fait un super jeu sur les pets" ? 


Neurones Fiesta :

Ce jeu est déprimant (c'est ce que j'ai dit au débriefing final) pour les créateurs dans mon genre : en 48h, ces développeurs ont fait un jeu polished, fini, multijoueur à 4, inédit, costaud en level design, et amusant. Il s'agit d'une course en allers-retours de pensées dans les neurones où on peut se rentrer dedans. Un bon jeu, point final.



Me, myself and I

Encore un jeu étonnant techniquement et conceptuellement mené par l'équipe qui avait fondé Capture. 


Voici un shoot visceral à la Binding of Isaac, à part que l'écran est coupé en trois et montre trois facettes du même monde, que l'on peut basculer d'une ambiance à une autre en toute fluidité. Dans la partie "heureuse" du monde, les ennemis sont différents que dans la partie paranoiaque par exemple. Au final, si le jeu est réussi techniquement, l'idée de base ambitieuse ne se retrouve pas dans le gameplay, très peu lisible. Dommage, gros potentiel.



Play Time 

Ce jeu fait par un membre de l'organisation (tout seul) est basé sur un niveau de Mario. En une phrase que j'ai dit lors du débriefing : "Ce jeu m'avait l'air moche et chiant, et j'y ai joué, et bien il est moche mais assez amusant". Le concept est pas mal : toutes les 10 secondes, on ne peut plus bouger et si un ennemi vous touche, vous perdez du temps ou de la vie. Et ensuite pendant 10 secondes, c'est vous qui pouvez bouger et toucher les ennemis. Au final le jeu est assez complexe.


Avec les jury on a fait une shortlist.

Certains jeux s'imposaient largement techniquement. Nous avons tous eu chacun une sorte de véto et un peu de mal à aboutir à un consensus. Finalement c'est un jeu qui était tout en bas de notre shortlist qui s'est imposé, car il a réuni un petit peu de chacune de nos opinions.

Nous sommes retournés dans l'amphi et nous avons repassé les jeux un par un, en expliquant chacun les points forts et les points faibles de chaque jeu.


Et nous avons attribué deux prix :

Le "prix du courage" est allé à What do we do now, le jeu très modeste du créateur, qui, en dépit du fait que son équipe l'ait lentement laché, n'a rien abandonné, ce qui est la première valeur de ceux qui veulent réussir dans le métier.

Le prix du meilleur jeu a été attribué à Each Planet.

En plus de son approche hybride unique, le jeu a un ADN "français" avec sa revisitation sans le dire du Petit Prince. C'est cette petite touche qui fait appel à un classique sans l'adapter à la lettre, qui a vraiment influencé le jury dans ses délibérations.



La question de la culture sera certainement un enjeu pricipal des jeux vidéo des années à venir.

Mais bravo à tous, la qualité était là - j'espère être à vos cotés, en jury ou créateur, l'année prochaine.


Gagnez des exemplaires de Out There Omega et des T-shirts magnifiques en nous parlant de l'espace

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Nous recevons régulièrement des petites nouvelles, des extraits de journal ou même des dessins sur Out There.

Comme c'est bientôt la sortie de Out There Omega et que c'est la fête tous les jours, en plus de vous remercier personnellement, nous avons décidé de vous récompenser avec, régulièrement, des cadeaux sous forme de clefs Out There Omega (pour vous ou à offrir) ou des T-Shirt Out There Omega et croyez moi ils sont supers cools !


Nous prenons tous types de production - y compris des jeux vidéo ! - envoyez nous tout ça à contest@miclos.com

Parlez nous de ces immensités vides et hostiles à l'homme, infiniment désespérantes, où nous errons tous dans le noir, à la recherches de la flamme des illusions de ces anomalies appelée vie et intelligence.

Parlez nous de ces géantes bleues et rouges, inconcevable en taille pour l'homme, d'où surgissent des lances de feu longues d'un système solaire, répandant une mort instantanée  - faites nous trembler ou rire avec l'étrangeté puissante de ce que peut-être la vie intelligente, incompréhensible et amorale, sur une autre planète.

Au plaisir de vous lire/admirer bientôt !

Dans les coulisses de Gerardmer 2015 : la vie du Jury Syfy, Terreur et Beauté d'une sélection de haut niveau

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Plongez dans votre enfance.

Souvenez-vous de ces affiches de films sombres, au nom terrifiant, vus au détour d'une salle de ciné ou d'un vidéo club VHS ; la mention "Avoriaz". Une nomination ou un prix qui labellisait le film comme étant fantastique et terrifiant.

Avoriaz n'est plus, mais Gerardmer prend la suite : une station de ski perdue dans les Vosges avec son bon mètre de neige en Janvier, et une semaine où toute la communauté se tourne vers l'horreur et le fantastique.

Attention, ça va neiger

Canalsat / Syfy sont partenaires de l’événement (et pour cause) et disposent d'un prix spécial en marge du prix du "Grand Jury". Et il y a donc un Jury "Syfy" auquel j'ai eu l'honneur de compter cette année parmi d'autres membres éminents que je citerai bientôt.

Contrairement à ce qu'un communiqué de presse a laissé sous entendre, ce jury n'a pas été sélectionné sur concours : je ne suis pas super qualifié a priori pour ce type de tâche, mais à un moment, l'équilibre entre mes rapports de ce présent blog, mon activité en ligne et ma présence dans le monde de la SF 2014 ont légitimé ma présence.

A vrai dire quand j'ai reçu la nouvelle, j'ai voulu proposer à Jack Parker de prendre ma place. On m'a alors dit qu'elle faisait aussi partie du Jury. "Je n'aurais pas pu mieux sélectionner...", leur ai-je alors répondu.

Par un mercredi froid de Janvier, le hype train vers Gerardmer est parti, occupé par le staff de Canalsat, les différents Jury et VIP, et organisateurs.

C'est là qu'on a fait connaissance les uns des autres. Voici la présentation du Jury Syfy, attention !

Yann aka "Docteur No" aka "The Critic" : Docteur No est un puits de science cinématographique, qui comme un saumon sauvage des salles obscures remonte à contre courant de la critique et travaille chez Dailymars. Il faut l'écouter défendre avec des sanglots dans la voix le génie de Lone Ranger "une fable glauque qui ose des thèmes durs face à un public de pop corn movie" pour comprendre le personnage. Sa persona publique est celle de quelqu'un qui descend les films : en vrai, il les aime beaucoup, et je l'ai souvent trouvé plus bienveillant que cherchant la faille dans les films que nous avons vu.
Son film préféré est : Citizen Kane, (ouuuh le snob !)

"Mais non je suis pas snob, Citizen Kane est la transition vers un cinéma moderne, c'est le premier film meta !"
--- Docteur No


Le Docteur No vous observe

Asma aka "The Brain" : patronne de Brain Damaged, accompagnée de son disciple PJ, qui a des idées bien arrêtées sur les films (par exemple elle pense que Cloud Atlas est bien) et qu'il est malavisé de contredire (par exemple en disant que Cloud Atlas n'est pas le meilleur film du monde). Passionnée, elle a beaucoup d'énergie, je pense qu'on devrait la mettre dans un réacteur nucléaire on obtiendrait de bonnes performances, et ce serait écologique.
Son film préféré parle de nuage, je crois.

"C'est même pas la peine de dire du mal de Cloud Atlas, vous avez tort."
--- Asma

Jack Parker aka "La petite fille maléfique" : bon, vous devez connaître ce personnage public passionné de film de genre. Gerardmer a été pour elle le lieu d'une rencontre assez unique et d'un AVC, je vous laisse découvrir plus tard.
Son film préféré est The Faculty par Robert Rodriguez

"Si je vois Robert Rodriguez, je fais un AVC direct."
--- Jack Parker


Jack Parker, avant l'AVC

Nicolas aka "l'Otak": Il fait deux mètres, bosse chez SallesObscures, et il a un truc (qu'on a pas découvert), mais il a réussi à voir 27 films sur la semaine. Vendredi, il a notamment commencé à 9h du mat pour terminer à 5h du matin le lendemain, dormir une heure, puis repartir au ciné. Et si en fait il était un ours qui hibernait pendant les séances ?!
Son film préféré est l'Histoire sans Fin.

"J'ai dit que mon film préféré était l'Histoire sans Fin, parce que Asma a déjà dit Cloud Atlas."
--- Nicolas (qui voulait certainement faire plaisir à Asma)


Nico à petite échelle (normalement il fait 2 m)

Entre Asma et moi, il s'est passé un truc spécial. Bon déjà parce que je l'ai appelée Alba, puis Bianca, etc...j'avais du mal a retenir son prénom et du coup je faisais beaucoup de phrases indirectes pour éviter de dire son nom. Et puis j'étais pas un grand fan de Cloud Atlas...mais vous savez dans les films, deux personnages se rencontrent, il se battent, ils se détestent, puis ils deviennent amis...enfin, je crois. 

Dans le trajet vers Epinal on a beaucoup discuté. Au bout d'une heure, Docteur No m'avait donné déjà deux pages de carnets de films à voir pour compléter ma culture générale, dont Birdman dont il chantait l'éloge (ce qui était intéressant, car il a un peu un profil d'aigle). Le film n'est pas encore sorti, don't ask. 

Dans le même compartiment nous avions les boss de MakeUpForever, un institut spécialisé dans le maquillage. Karine (dont le film préféré est Soleil Vert) ne regarde pas vraiment les films d'horreur comme une spectatrice piégée dans l'intrigue : elle regarde les maquillages.

"Le plus beau maquillage que j'ai jamais vu, c'est la scène de scalp dans Saw 4 : les cheveux et les veines sont parfaitement réalisées. Cette scène gore me donne des émotions proches de la perfection. Mais le succès d'un bon maquillage n'est rien sans le talent du réalisateur qui donne le bon éclairage et filme sous le bon angle."
--- Karine, Make Up Forever

Et pour le maquillage le plus nul ? "Di Caprio dans J. Edgar, horrible !"

On est arrivés à Epinal dans en longeant une sorte de haie d'honneur où des locaux attendaient des autographes de VIP, mais pas de nous. On est montés dans un car en route vers Gerardmer, et Docteur No a pu nous faire un exposé sur les meilleurs films de Nazixploitation, peut-être parce que Asma ou Jack Parker m'avaient traité de nazi à un moment.

"En matière de Nazixploitation, je vous conseille Nazis At The Center of The Earth, pur chef d'oeuvre d'inventivité."
--- Docteur No


Météo : neige

Notre hôtel s'appellait la Marmotte. C'est amusant, parce que rapidement on a fait le lien avec l'hôtel de Dale Cooper dans Twin Peaks, mais très rapidement, les coincidences étaient anormalement nombreuses : en plus de la déco identique, on y servait des tartes à la myrtilles et des cafés excellents. J'avais peur de rêver de sacs souriants et de géants silencieux.


Voici la marmotte


On a reçu plus de cadeaux à ne savoir qu'en faire (comme une formation de ski), et les gérômois sont très gentils et assez fiers de leur festival, venant parfois de loin pour aider à l'organisation.

On a eu un brief long de Suzy et de Romain qui bossent tous les deux à Universal / Syfy.


Ici c'est Universal et c'est serious business.

On nous a mis en garde sur notre devoir de réserve : jusqu'à la remise des prix, ils nous était impossible de partager notre sentiment sur les réseaux sociaux, ou même aux proches. 
Ils nous aussi parlé du line up prometteur de Syfy pour 2015 : 12 Monkeys, Haven (que j'aime beaucoup, Dr No aussi), mais surtout "The Expanse", que Romain nous a vendu comme étant un Game of Thrones dans l'univers de Blade Runner. 
Voilà, j'espère que vous êtes bien hypés !

Le temps de se réchauffer, on est partis vers la cérémonie d'ouverture. En tant que Jury, nous avions nos places réservées pour toutes les séances, que nous y allions ou non, et nous étions très bien positionnés bien sûr.


Vous voyez le 1993 ? C'était là

Ah, Gerardmer c'est pas bien grand, mais le travail logistique est impressionnant : 800 bénévoles disponibles jour et nuit pour nous transporter sur un simple appel. On se fait très rapidement au taxi gratuit, surtout quand tombe dru la neige - il faudrait quelque chose comme ça à Paris !


Les commerces avaient le bon goût de se mettre aux couleurs du festival

"Avoriaz, c'était une sorte de folie sauvage. On t'amenait dans un hangar perdu dans la forêt, et il y avait une fête avec le son à fond et des mecs déguisés bizarres, c'était à moitié flippant. Ici, à Gerardmer, l'ambiance est plus...familiale."
--- Nicolas, vieux de la vieille

Et effectivement on a d'abord eu un discours d'un adjoint au maire qui parlait subventions.

Puis un discours d'un représentant régional ambiance mariage de province, qui commence avec une inspiration et les mots :"L'héroic-fantasy..."

Alors plusieurs choses : l'héroic fantasy, c'est pas pareil que le fantastique, mais c'était pas trop son problème (on a cru au second degré au début). Bon, ensuite il a dit : fan-ta-sy, avec le ta de ta braguette est ouverte, zorro, et ensuite s'en est suivi la définition wikipédia de fantasy. A mes cotés, Dr No et Nicolas ont fait simultanément un facepalm d’anthologie, celui qui vient du coeur, incontrolable, et ils enfonçaient leur tête dans leurs mains comme s'ils pouvaient s'y enterrer et oublier qu'ils étaient en train d'entendre des trucs comme "la Lorraine terre d'accueil du 7eme art".

Nous avons eu d'autres discours, notamment celui de Christophe Gans qui expliquait qu'un des fondements de son amour pour le cinéma était Duel de Spielberg, et qu'il associe Duel aux festivals comme Avoriaz ou Gerardmer maintenant. Allions nous voir le futur Duel dans les jours qui venaient ?


Le premier film présenté, en ouverture était...

EX MACHINA


Le premier film de celui derrière l'écriture de Sunshine et "du futur film Halo" déclare un Gans qui s'identifie comme un grand gamer.

Bon, pour chaque film, je vais pas forcément vous spoiler mais insister sur des points qui m'ont marqué - ce qui est une forme de spoil. Donc attention, pour chaque films, spoilers.

SPOILERS

Ex Machina démarre tellement vite que j'ai eu très peur de ne pas suivre. Il se passe une tonne de trucs en 30 secondes puis après, comme un long logarithme, il s'étend....lentement...vers l'infini (ou le zero, à vous de voir). Ex Machina est beau (comme beaucoup de films que nous verrons), beaucoup trop lent vers la fin, et dispose de la scéne de perforation par couteau de cuisine la plus onctueuse de l'histoire du cinéma. Il parle avec maturité de Google, Facebook, intelligence collective et IA. On s'ennuie un ptit peu quand même.

FIN DES SPOILERS 
Et après le film, on s'est fait conduire à une grande soirée avec plein de types très importants de la région et surtout des petits fours de grande qualité car réalisés par une école hôtelière locale. J'ai découvert ce plat très mystique qui est la tartine de maroeilles, qui reste dans la bouche pendant 4 ou 5 jours comme un fantôme.


L'antre des petits fours



"Moi, je bois pas. D'ailleurs, je n'ai jamais bu d'alcool, style je me souviens plus de ce que j'ai fait la veille. Sauf cette fois où j'ai terminé à l'hôpital. Impossible de savoir ce que j'avais fait. Très mystérieux..."
--- Docteur No en mode confidences


La cachette secrète des cigarettes de Jack


L'équipe presque au complet

Après une nuit à rêver d'IA maléfiques, au petit dej, Docteur No nous briefe : attention, le film de ce matin est autrichien.

"Les films d'épouvante belges, néérlandais, autrichiens...sont souvent des trucs de malade. Je pense qu'il y a une étude psychologique à l'échelle nationale à réaliser avec ces pays."
--- Docteur No, dans le dessous des cartes

On parle aussi d'autres films :

"Oui-Ja, le film d'horreur d'Hasbro - je dois en dire plus ?"
--- Jack Parker, pas très pub de jouet

"Oui-Ja, c'est pas un film mauvais, c'est un film de "rien". Je pense que devant un écran noir j'aurais plus de questions personnelles qui viendraient à moi que devant Oui-Ja."
--- Docteur No

Il est intéressant de voir que je suis cerné par des fanatiques du film de genre, qui par conséquent n'ont pas trop de temps pour se pencher sur d'autres sujets. Quand on parle de Jennifer Aniston, Docteur No bondit :

"Jennifer Aniston ? Ah oui, cette actrice qui a joué dans Leprechaun. Vous saviez d'ailleurs que Leprechaun était un film produit par la WWE pour promouvoir un catcheur nain ?"
--- Docteur No à qui vous pourrez offrir votre coffret de Friends

Bien que le film soit à 11h, Nico et moi avions arrangé avec le service presse un petit rendez vous avec Alex Garland, le réalisateur de Ex Machina pour lui poser quelques questions. Hélas, la série d'interviews qu'il devait faire débordait un peu à chaque fois et notre tour arriverait après la projection du film autrichien. Donc je me suis installé derrière lui discrètement pour capter quelques unes de ses phrases.

"La maîtrise des sociétés futures se fera par des réseaux sociaux, appartenant à des sociétés privées, et donc en dehors du système démocratique. On ne vote pas le fonctionnement de Google."
--- Alex Garland

"Je n'ai pas peur de l'intelligence artificielle. L'ennemi de l'homme restera l'homme."
--- Alex Garland

Avec Nico on file pour le début de Goodnight Mommy.

Voici un film allemand "familial" (les membres de l'équipe font partie de la même famille) basée sur une télé-réalité allemande dans laquelle des personnes ayant subi une chirurgie esthétique reviennent dans leur famille - provoquant diverses réactions.

Veronika, l'une des réalisatrices, a simplement dit :

"Je ne vous dirai rien sur le film."
--- Veronika, qui déjà parlait allemand, donc...

Le noir se fait, les hurlements de loups montent dans la salle, ponctués au final par un rire diabolique comme à chaque séance (sauf une, et il nous a bien manqué).

GOODNIGHT MOMMY


SPOILERS

Ce film est très beau. Beaucoup de plans sont O_O waouuuh...
Sinon, il joue sur une astuce assez sympathique. Nous avons deux jumeaux, et très rapidement, mais assez subtilement, on comprend que l'un des jumeaux est mort. Mais ce n'est qu'un premier "secret" de l'histoire et tous les twists sont des faux twists édulcorés pour faire place à la réelle problématique du film. Traumatismes, perte des repères, mondes imaginaires, certitudes et perceptions, folie, mensonges, relations avec les parents...prisme de la compréhension du monde par l'enfant...il y a des volumes encyclopédiques à écrire sur la profondeur potentielle du film. La mise en place se pose avec des fondations en granit, pour que décolle dans la folie pure la dernière demie-heure qui est inoubliable d'horreur.

FIN DES SPOILERS

Et le bon Docteur No avait raison, quels frappadingues ces autrichiens !

Après la séance, on nous a conduit à un restaurant avec buffet à volonté.

A un moment, Robert Rodriguez est arrivé.


Là c'est quand Jack (sweat bordeaux) réalise que Rodriguez
(point noir au loin) est dans la même pièce

Jack Parker a commencé à trembler. Je peux vous dire ce qu'il a mangé : du jambon avec de la mousse au chocolat. En même temps. L'Amérique.

Quand il passe avec son jambon-mousse à coté de nous, Jack montre la chaise vide à coté d'elle et dit : "On a une place pour vous si vous voulez"...mais bon il préfère s'asseoir à coté de Gans et du grand jury, allez savoir pourquoi !


Tweet tweet tweet Rodriguez, AVC...

En fait après son exotique repas, il acceptera de faire des photos avec elle, ce qui est peut-être le plus beau jour de sa vie (et son premier AVC). Moi je lui ai donné ma carte et une copie de Out There, mais il a pas tweeté dessus :-(


Météo : neige

Avec Nico on est ensuite allé à la conférence de presse de Robert Rodriguez.

Ces conférences sont assez frustrantes parce qu'elles sont traduites en consécutive, c'est à dire que on pose une question à Robert, la question est traduite en anglais, il répond en anglais, sa réponse est traduite en français. Du coup les 45 minutes de conférence ne représentent que 25 minutes d'interaction réelle.


Un petit mot sur Robert Rodriguez pour faire très court : c'est un réalisateur de films cultes (Une nuit en Enfer) bien réalisés, mais avec des tous petits budgets. Son film préféré est Le Parrain.

Quelques citations prises sur le vif :

"Pour moi, la Fantasy est un genre présent depuis toujours et qui sera toujours présent."
--- Robert Rodriguez

"Il n'y a pas un seul film de cinéma de genre dans lequel je ne voie pas quelque chose de complètement nouveau."
--- Robert Rodriguez

"Je me lance dans la télévision, car elle me permet de travailler un format auquel je suis très attaché : le storytelling long format. J'aime beaucoup de type de narration, même s'il est important qu'à un moment les choses se finissent."
--- Robert Rodriguez

"J'ai ma chaine de TV et je peux ENFIN faire exactement ce que je veux. Si je veux m'asseoir face à un réalisateur et lui poser des questions pendant 5 heures, je peux !"
--- Robert Rodriguez

"Mon genre préféré est la Fantasy, et je donne le sens suivant au mot Fantasy : c'est le domaine d'altération de la réalité que l'on perçoit, comme lorsqu'on est enfant."
--- Robert Rodriguez

"Mon objectif est de raconter des histoires qui ressemblent  la réalité, tout en étant purement imaginaires. Cela vient de mon premier job en tant que dessinateur de BD."
--- Robert Rodriguez

"J'ai toujours eu plus d'imagination que d'argent."
--- Robert Rodriguez

"Notre secret est d'avoir toujours fait croire que nous avions plus d'argent que nous en avions réellement."
--- Robert Rodriguez

"J'ai réussi à boucler mes premiers films avec des tactiques de guérilla. Et aujourd'hui, je fais la même chose pour maintenir le même niveau de créativité. "
--- Robert Rodriguez

"Je viens sur le plateau de tournage avec ma guitare."
--- Robert Rodriguez

"Un effet spécial est réussi si on sort du film et qu'on dit "il n'y avait pas d'effet spécial dans ce film""
--- Robert Rodriguez

"Je suis réalisateur mais aussi directeur photo. A ce titre, je me considère comme la lentille à travers laquelle va passer l'oeil du spectateur."
--- Robert Rodriguez

"Quand j'ai rencontré Clooney à l'époque d'une nuit en enfer, celui-ci n'était pas une star. Il était en transition entre un futur indéterminé et Urgences. Mais on sentait le potentiel. Je le sentais. Et je l'ai filmé, moi assis, lui debout, donc en légère contre plongée, pour le faire accéder à cette stature de star qui est aujourd'hui la sienne."
--- Robert Rodriguez

 Le temps de retourner à l'espace Lac, commence CUB, un film belge avec des scouts.

L'auteur monte sur scène et dit "J'ai voulu retrouver un certain esprit des goonies". Waouh !
Pour lui, Avoriaz/Gerardmer représente ce territoire étrange sur les cartes où il y a marqué "Icy sont les Dragons" 

CUB


SPOILERS

La promesse des premières parties de Cub est très alléchante. Des scouts, une ambiance goonies, une usine imposante désaffectée...le film reste inventif mais reste sur une ligne de simplicité qui fait rester sur sa faim (cela reste une histoire d'enfants et de croque-mitaine). Il nous manque, je pense, le grand voyage que l'on pressent en début de film. La musique est très cool.
Une petite remarque : ce film est un petit peu (ressenti personnel) "raciste". Par deux fois dans les deux grandes parties du film, les héros (belges flamands), civilisés, propres, amicaux, sont confrontés avec des méchants (belges wallons) austères, idiots, meurtriers. Après, le fondement de l'histoire aurait pâti d'une écriture plus grise dans ce manichéisme.
A noter que dans cette histoire d'horreur et d'enfants, des enfants (et un chien) se font tuer. La mise à mort des enfants est à chaque fois très pudique, non pas que je recherche les détails sanglants et morbides, mais qu'une fois de plus si le parti pris était inédit, son exécution ne va pas au bout des choses, donc on ne sait pas vraiment si c'est si inédit que cela.


FIN DES SPOILERS

Et donc, on passe un bon moment avec Cub !

Avant le film du soir, Robert Rodriguez monte sur scène pour un hommage. Il porte un grand chapeau, et du coup j'ai la réponse à la question : "Quelle est la pire place au cinéma ?" Réponse : derrière Robert Rodriguez et son grand chapeau.


C'est là que Jack s'est aperçu d'une chose :

"Le point commun entre tous les films, c'est qu'à un moment, il y a une scène où quelqu'un court dans une forêt. Mark My Words."
--- Jack Parker, prophétesse

(Et elle avait raison. Etrangement, ce fut le cas)


Petite discussion avec les membres du Jury "Jeune". Leur car s'était renversé
avant l'arrivée dans la salle (je crois)

En revanche, les films présentaient un autre point commun, plus de l'ordre de l'écriture. 

Si l'horreur était présente, le point de vue était souvent inversé par rapport au film classique - cet état culminant dans Voices de Satrapi. Pour prendre un exemple simple : un psychopathe tue une victime. Un film très classique présenterait l'histoire coté victime et appuie sur l'horreur de la scène.
Un film avec une approche différente présenterait l'histoire coté criminel. C'est ce qu'on a eu dans les années 90 avec ces insupportables serial killers qui avaient des raisons plus ou moins idiotes de justifier leurs actes. 
Mais là, dans les films présentés en 2015, on rentre dans la tête du bourreau et dans son monde parfaitement logique - c'est lui qui raconte l'histoire. L'acte en lui-même est parfois en arrière plan, c'est son inéluctabilité par l'approche de logique interne du meurtrier qui le teinte d'horreur.


Etalage technologique permanent du Docteur No

Sur ces beaux débats, on passe au film du soir

THE SIGNAL

J'ai pas aimé du tout. Pour moi c'est un truc niveau fanfiction, avec un budget acceptable. 

SPOILERS

Et pourtant ca commence hyper bien...avec une entité / pirate informatique qui discute avec les gens au travers des captchas. C'est même génial comme idée ! Et puis ça bascule dans un trip amoureux, un trip blair witch, un trip zone 51 - aliens, un trip half life, et le grand final grand-guignolesque DBZ / Dark City. Ouais, comme la fanfic de Kenshindu78 qui essaie de tout mettre dedans.
Et malgré tout cela, tout est mou, avec un Laurence Fishburn qui paarle touuuut douuucement qui preeeend des nooootes à deuuux à l'heuuuure et qui a un regard mystérieux. 

FIN DES SPOILERS

Très pénible.

A un moment Asma doit s'absenter deux minutes de la salle. Quand elle revient elle me demande ce qu'elle a manqué. Je lui réponds "franchement, je sais pas ce que tu as manqué, mais à quoi bon se poser la question ? C'était probablement nul."

"On rentre dans la phase du syndrome de stockholm de la critique. On passe trop de temps avec les films, et on commence à les aimer de façon irrationnelle."
--- Asma, qui ne négocie pas avec les terroristes

Dans une tempête de neige qui redouble, on nous emmène dans un restaurant isolé, à travers des chemins perdus dans la forêt.

On a un repas délicieux, mais à table, nous jouons à un jeu d'énigmes. Il faut (et ce sans aide extérieure) demander à son voisin de droite "4 films...avec Bruce Willis" (par exemple), en augmentant à chaque fois. Et bien trouver 4 films avec Tom Selleck c'est pas évident !

Une Suzy épuisée viendra ensuite nous voir - la logistique et l'organisation sont des choses délicates, mais moins encore que la difficulté de faire un plan de table correspondant aux désirs de chacun. Telle personne veut être à coté de tel VIP, etc...un casse-tête à la Game of Thrones qui a puisé dans ses réserves.


Inutile de dire que j'ai fait un scandale

On ne peut pas partir aussitôt que prévu : un arbre est tombé sur la route, et nous voilà, coincés, de nuit, dans le restaurant isolé. Dehors des cris de loups...non en fait, et puis on avait moins peur des loups que de ne pas tomber de sommeil.

Et pourtant demain Nico manquait au petit dej : il était déjà parti dans un énième marathon de films. Pour être sûr de ne rien manquer (3 salles tournent en continu à Gerardmer) il avait vu quelques films d'avance.

Et coucou, qui rencontrons-nous ? Dedo :-) fidèle spectateur
de Gerardmer !

On a commencé ce matin à 11h avec

THE MAN IN THE ORANGE JACKET



"Le film fait 1h11, s'il est nul, au moins on se fera pas chier longtemps."
--- Le public derrière

SPOILERS

Moi j'ai bien aimé. Mais j'aime les films courts. Les premières secondes sont belles. Après il y a une idée intéressante. Et puis...ca sombre dans l'espèce de long métrage étudiant qui a oublié d'avoir une fin. A un moment le tueur prend une faucille et un marteau, si vous êtes fan de la Cité de la Peur, ca peut faire son effet.

FIN DES SPOILERS

Et au final c'était bof.

Christophe Gans m'a confié qu'une des qualités du film est que son réalisateur (letton) se battait vraiment pour qu'il soit diffusé et présenté dans des festivals en dépit des mauvaises critiques constantes. 

Je regrette qu'il soit pas meilleur, je voulais faire un discours avec un jeu de mot sur letton-laiton et dire "ce film était un alliage de bonnes qualités".


Nazixploitation partout

Ensuite on a vu...

JAMIE MARKS IS DEAD

Je le sentais bien. Mais je suis connu pour proverbialement me tromper.

SPOILERS

Twilight avec des fantômes. 
Chiant.
Long.

FIN DES SPOILERS

C'était pas très bien, certaines scènes ont fait rire là où il fallait pas rire. 
Une réplique du film : "Tu as un joli pénis."

Disons que nous étions en plein après midi et que des ronflements sonores s'entendaient dans toute la salle...

Et juste ensuite on a enchaîné avec...

THE VOICES

On savait que ça allait être bien. Même si Ryan Reynolds...

SPOILERS

C'est une comédie très drôle, très très finement écrite, qui nous met dans la peau d'un tueur psychotique, mais en bon psychotique, il ignore voire nie sa nature. Plein de bonne volonté, il veut revenir du "bon coté" mais la réalité est quelque chose de sombre...
Toutes les répliques et détails sont utiles, tout est finement amené. 

NO SPOILERS

Au final, c'est un grand film avec un budget conséquent qui marche sans faillir sur le sentier au sommet de la falaise, très dangereux, de la comédie horrifique sans faire un pas de coté. 
On passe un très bon moment et le film n'est pas dénué d'un caractère instructif sur la nature de la psychose, rendant plus humain que jamais ces horribles tueurs qui hantent les films des années 80.

Cette nuit là, je n'y étais pas, mais c'était non stop une nuit spéciale et un peu folle.

Elle a commencé par Oui-Ja (personne n'aime), What We Do in The Shadows, comédie de vampires-colocs que tout le monde a adoré...

"Si What We Do In The Shadows était en compétition, j'aurais été obligée de vous tuer dans votre sommeil si vous n'aviez pas voulu lui donner le prix."
--- Jack Parker, qui dormait dans la chambre à coté

...puis une animation, vers 2h du matin, avec bataille de boules de neiges et de bonbons dans la salle avant la projection de Zombeavers - une histoire de castors zombies.

Ce fut l'occasion de bien faire la fête pour les autres au Grand Hôtel, point de chute régulier des Jury et VIP.


"Ecrire saoul, se relire sobre."
--- PJ, disciple d'Asma, qui se reprend une absinthe

Docteur No, Asma et Nico se retiraient chaque jour pour écrire, quelques heures, sur les films vus. Car en plus d'être Jury, ils étaient les envoyés spéciaux de leur publication sur les lieux.

L'avant dernier jour nous avons vu un très grand film en compétition :

IT FOLLOWS

Très bien filmé, musique de Disasterpeace qui renforce l'ambiance Carpenter.

SPOILERS

Au coeur du film, il y a une idée forte qui s'inscrit dans l'imaginaire ado de l'Amérique : la culpabilité liée à la sexualité, les MST et de plus grands thèmes religieux US : l'inceste comme péché originel, la fatalité de la punition, l'absence de rédemption pour les péchés les plus atroces...etc...
C'est très bon et de plus ce film qui ne fait pas si peur vous terrorisera après la séance : et si cet homme qui marchait vers vous était le monstre d'IT FOLLOWS ?

NO SPOILERS

On avait déjà eu d'excellents échos du film, mais en sortant, nous savions que nous avions un film de tout premier plan. La salle était extatique.

Dans l'après midi, je suis allé à une conférence de Christophe Gans sur les films de la Hammer. Il y avait aussi Christophe Lemaire de MadMovies.


"Christophe Gans, tu lui poses une question sur le cinéma et il est en pilote automatique, il peut te parler pendant 7h sans relance, le mec sait tout."
--- Docteur No

Voici quelques notes prises encore une fois sur le vif :

"La Hammer avait une recette imparable, mélangeant acteurs de qualités et starlettes nous faisant fantasmer."
--- Christophe Gans

"Nous citons tous, pour ceux qui les ont vus, ces films, car ils nous ont marqué. Lee et Cushing nous ont marqué, et dans nos oeuvres, et dans nos vies. Pourquoi croyez-vous qu'on les retrouve dans Star Wars ?"
--- Christophe Gans

"La légende de la Hammer s'est bâtie sur les critiques. Non pas les critiques positives, mais au contraire les critiques hyper intellectualisées de ses détracteurs, Telerama par exemple, qui comprenaient ce qu'étaient ces films : des aventures sur le territoire de la subversion, comme l'était le Rock'n'Roll. La Hammer glorifiait des thèmes libertaires (comme le fait de s'affranchir de la Nature ou de nier l'existence de Dieu), ce qui horrifiait avant tout les catholiques. "
--- Christophe Gans

"La Hammer, c'est le basculement des dogmes vers des idées libertaires, et ce avec des acteurs vénérables aux cheveux blancs."
--- Christophe Gans

Le soir nous avons pu voir deux autres films, un en compet et l'autre "plaisir".

Le film de compétition était 

THESE FINAL HOURS

SPOILERS

Alors ça, je connaissais pas : un film pré-apocalyptique. La terre va s'embraser dans 12 heures, que font les gens en attendant ? Sujet palpitant, pas super bien traité, desservi par des acteurs mouuuais mais...le générique de fin était pas mal :-)

FIN DES SPOILERS

L'acteur de ce film ressemble beaucoup à KeenV, c'est à dire un peu à un demeuré, ce qui casse un peu le propos intense propre à l'histoire.

Pendant ce film, une certaine scène a tiré des rivières de larmes à deux membres du Jury dont je ne peux pas dire les noms car elles m'ont promis de m'assassiner si je le disais. Donc vous ne saurez pas qui.

Et on a enchainé presto avec...

JUPITER ASCENDING

Bon, on m'avait dit que c'était pas très bon. 
En réalité c'est très mauvais (sauf les décors). Oh la la...

Réplique réelle du film : "Je peux léviter avec mes bottes grâces aux équations différentielles."

Et ben, voilà un scénariste qui n'a pas passé son bac scientifique...

Le gros suspense du film était : Sean Bean va-t-il mourir ? (La réponse est : je vous la dirais pas, spoilers, mais sa carrière est bien morte maintenant).

"C'est épouvantable. Les Wachowski ne vont jamais s'en relever."
--- Docteur No en phase optimiste

"Je suis certain que ce sera un super film à regarder bourré dans 20 ans pour bien rigoler."
--- Jack Parker qui essaie de trouver du bon en toute chose

"Pitié."
--- Asma, laconique


Jack Parker, maintenant amie de Rodriguez, fuit les photographes

Jupiter Ascending a longtemps fait débat dans notre groupe - pour nous détendre et surtout qu'Ecran Large (juste devant nous) a publié dans l'heure qui suivit un article assez élogieux, parlant d'une claque comparable à Star Wars de 77. Jack Parker a trouvé une formule assez sympa :

"Cette comparaison est assez malvenue. La Princesse Leia est un personnage autonome, qui n'a besoin de personne pour la sauver, et qui dicte ses volontés. Mila Kunis dans Jupiter est une cendrillon sans aucune volonté qui passe de prince charmant en prince charmant en espérant trouver le bon. Quelle régression dans les modèles."
--- Jack Parker, plutôt Leia que Jupiter

Comme des zombies (héhé) on a regardé le lendemain le dernier film de la compet, Honeymoon avec Rose "tu ne sais rien Jean Neige" Leslie.

HONEYMOON 

Allez pas de spoilers. Histoire convenue niveau mauvais épisode de X-Files, beaucoup trop de bisous au début et pas assez à la fin. 

La veille, à la suite de la conférence de Gans sur la Hammer, j'ai pu avoir une minute avec lui. (oui, je lui ai donné un exemplaire de Out There !). Je lui ai demandé si on pouvait avoir 20-30 minutes avec le Jury pour débattre - après tout nous étions aussi des professionnels. 

Il m'a dit pas de problème, voyez avec le service presse - et Suzy de Syfy nous a tout arrangé !


Donc le lendemain, nous voilà dans cette salle dédiée du Grand Hotel avec Gans qui parle à coeur ouvert de la sélection, des films en France, etc...

"En tant que Grand Jury, nous avons à coeur de récompenser le potentiel d'un réalisateur. L'idéal est de confier le prix à quelqu'un de prometteur, pour qu'il fasse des films merveilleux plus tard. Ca n'a pas toujours été le cas : Avoriaz a préféré récompenser Hidden que Robocop à l'époque, et pourtant, Verhoeven a aligné les chefs d'oeuvre ensuite."
--- Christophe Gans

"Je comprends que vous n'aimiez pas Prometheus. Mais Prometheus a une qualité unique, c'est que Ridley Scott arrive constamment à ne pas faire ce qu'on attend de lui. Et en ceci, Prometheus est une réussite admirable."
--- Christophe Gans

"La maladie du cinéma actuel, c'est que les gens ne veulent pas être surpris."
--- Christophe Gans

"La construction d'un financement français est telle aujourd'hui qu'un film interdit au moins de 12 ans ne peut pas trouver de financement. Nous sommes devenus intellectuellement des putes de Babylone...et au final, nous allons tous avoir des comédies jusqu'à ce qu'on en crève."
--- Christophe Gans

Il a fallu débattre entre nous du film qui remporterait le prix Syfy.


Asma, notre présidente démocratiquement élue par tirage au sort

Il y avait 2 voix pour It Follows et 2 voix pour Goodnight Mommy. Et ils se sont tournés vers moi.

J'ai privilégié le second car je n'en voyais pas les limites. Comme disait le docteur :

"Le problème de It Follows, c'est paradoxalement sa maîtrise absolue du film. Chaque plan est maîtrisé et veut nous démontrer que le réalisateur est partout. Il n'y a aucune respiration qui permette techniquement de nous plonger dans le film."
--- Docteur No.

Et Goodnight Mommy, justement, était plein de "détails", comme une enquête que nous pourrions faire post-visionnage, qui renforcent la cohérence de l'histoire. Enfin, je ne voyais pas de Jury autre que le nôtre récompensant ce très beau film.


Lorraine, quiche et région, amie de disciple d'Asma
ET maquilleuse pro maquille Jack et Asma avant le grand soir !

Lors de la cérémonie de clôture, les jeunes ont pourtant récompensé GoodNight Mommy.

Nous aussi, et Asma a fait un très beau discours, émouvant. Le réalisateur est venu, tremblant et joyeux, chercher son prix.


:'-)

Les critiques (spécialistes presses) ont donné leur prix à It Follows, sanctionnant un discours énergique qui louait "le meilleur film d'horreur depuis des mois, enfin !"

Le Grand Jury a récompensé trois films : ex-aequo Ex Machina et The Voices pour le prix du Jury et le Grand Prix est allé à It Follows, sans grande surprise.

Avec Nico j'ai enclenché sur le film de clôture, Oculus (un film sur les miroirs) qui m'a terrorisé (peut-être parce que je n'étais pas concentré sur la question "ce film est-il bien ?").

Nous avons fait la fête jusque tard, joué à divers jeux et nous sommes parti le lendemain enveloppés de neige vers Nancy.


Jack en mode "fête"

C'était une expérience unique et je veux remercier Canalsat et Syfy pour m'avoir permis de la vivre.

Si vous êtes amateur de films de genre, manifestez-vous auprès de ces entités (par exemple en vous rapprochant de leurs comptes twitter). Il n'est pas impossible que vous soyez vous aussi sélectionnés l'année prochaine et que vous viviez aussi la neige, la gentillesse des géromois, et les territoires inexplorés et libertaires de films qui vous hanteront effroyablement et qui vous combleront de joie.

Pour terminer, quelques mots de nous tous en vidéo :


Pourquoi apprendre le latin ou le grec est aussi important que les maths au collège et au lycée

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Bonjour,

Le ministère de l'éducation nationale souhaite modifier le statut de l'enseignement du latin et du grec et transformer, modulo quelques formules administratives, l'option linguistique en option optionnelle.

C'est somme toute logique : il y a quinze ans, dans un lycée régional accueillant 2000 personnes, nous étions 5 à faire du grec, et 3 latin-grec. Une observation rapide de l'évolution sociale montre que les langues mortes ont peu marqué l'actualité récente - monopoliser un professeur pour 4-5 élèves est une absurdité économique dans une société qui se veut rationnellement économique.

A ce titre, les atermoiements numériques des nostalgiques de leurs heures de latin sont bien peu de choses face à la logique financière et cet article n'a pas pour but d'interpeller nos élus sur la nécessité du latin-grec.

En revanche, j'aimerais vous interpeller vous, futurs parents et peut-être élèves de cinquième, sur l'intérêt important de vous tourner (ou de faire tourner vos enfants) vers l'étude du latin comme du grec, au même titre et avec la même importance que les mathématiques ou le code informatique.

Je ne vais pas gaspiller votre temps précieux dévoué à l'économie en parlant de la poésie ou de la culture, ou même de l'exercice de la rigueur intellectuelle, je n'ai pas vraiment la nostalgie de la France du 19e, je vais donc être comme nos élus abjectement pragmatique et vous dire les résultats concrets que vous pouvez en attendre au 21e siècle.

Le grec et le latin vous permettent de comprendre tous les mots en français, notamment ceux utilisés en science et de façon essentielle en médecine (les jargons techniques comme ceux du bâtiment sont plus délicats) mais aussi dans le domaine administratif, législatif et notarial.

Une céphalée, une exophtalmie, une obligation in solidum, la différence entre ontologie et oncologie, la nuance d'intuitu personae, tous ces termes sont limpides avant même que l'on vous donne pour la première fois leur explication.

Un mot complexe comme hydrogenolyse semble comme tomber en morceaux et apparaître avec la plus grande évidence, il n'est pas un mot désignant un phénomène chimique mais son explication, à tel point que pour l’helléniste, lui apporter une définition revient à écrire une tautologie.

En connaissant les briques de langage que constitue le lexique latin-grec, c'est autant de mots de notre culture moderne dont on a pas à apprendre la définition, et surtout c'est se reposer sur la logique et les outils de l'esprit pour comprendre un terme plutôt que la mémoire "bête" - en termes mathématiques, la connaissance des radicaux latins grecs vous permet d'accéder à tous les termes modernes issus de la multiplication de ceux-ci, plutôt que d'empiler dans votre tête, comme une addition, chaque nouveau mot appris par coeur.

La culture moderne utilise a l'envi le préfixe meta comme ultime définition de l'approche alternative à l'approche directe : et pourtant l'étude du grec nous apprend aussi le para, le dia, l'endo, l'epi, le syn, l'hypo, l'hyper (l'origine du très geek über)...autant de façons d'appréhender un problème, autant de façons de contourner un obstacle et de le prendre par le bon coté pour en venir à bout.

L'apprentissage de ces langues mortes ne va pas sans la compréhension de la pensée de l'époque.

Il y a une poignée de principes essentiels : meden agan, gnothi seauton, l'épicurisme et le stoicisme, aux fondements beaucoup plus profonds que la définition des magazines de société. Ces principes, vous les croiserez fatalement dans votre vie, dans vos angoisses ou dans des séminaires de formation qui seront des insultes à votre intelligence. Faites en vos outils personnels le plus tôt possible dans votre vie. Dans cette société compétitive qui veut optimiser l'éducation, creusez la différence.

Je sais que les gens détestent la transversalité, mais pour l’helléniste, elle est omniprésente, car la connaissance d'une langue morte n'est pas une discipline indépendante, mais une loupe pour regarder le monde. Le meden agan (le principe fondamental de la société grecque comme quoi tout doit être dans la juste mesure) propose quelque chose d’étonnamment similaire au principe thermodynamique d'équilibre de la Loi Le Chatelier par exemple (mais bien d'autres observations naturelles).

Un malaise de notre société est la perte d'énergie et de temps consacrés à réinventer ce qui existe déjà. Se passer des écrits grecs rapportant les mots de Socrate nous condamne à dépenser une énergie folle à les réinventer un jour - et tout le monde n'est pas Socrate.

Il y a 20 ans je déchiffrais mot à mot la question du chant du cygne dans Platon. Dans ce type d'écrit qui a passé les millénaires, chaque mot a son importance et au fil de mon existence ce texte m'est apparu comme un prisme qui décompose la lumière de la vérité : à chaque période de ma vie, une nouvelle signification, plus pertinente, plus profonde.

Bien sûr les élèves suivent une formation de philosophie en terminale, mais dans les écrits qui nous parviennent de l'antiquité, beaucoup d'éléments sont des principes ou des réflexions, dont l'adéquation ou le contraste avec notre société nous édifient ; et pour cause : ils nous viennent d'une époque où divinités et principes n'étaient pas choses indistinctes.

Dans le domaine très modeste de la fiction, je suis, comme tout le monde d'ailleurs et notamment ceux qui réussissent, un escroc intellectuel : je limite ma création au minimum. Je tire mes plus belles répliques de Seneque ou de Virgile sans les sourcer, je calque mes histoires sur des mythes de l'antiquité.

Mais c'est ce que disaient, désemparés, des scénaristes de séries américains venus faire une masterclass aux français : "nous regrettons d'avoir à vous réapprendre vos propres mythes qui constituent le fondement de notre succès".

Il n'y a pas un texte que j'ai étudié à l'époque qui ne trouve correspondance avec le monde que je perçois et qui éclaire mon quotidien. Je vois dans la stratégie de l'extrême droite le discours anti-carthaginois obsessionnel de Caton l'Ancien, qui a gagné sa bataille politique en répétant obsessivement la même chose. Je vois dans les blagues de Cicéron les saillies de nos avocats connectés sur Twitter, et l'omniprésence de l'hubris dans les malheurs que provoque la finance internationale, elle aussi obsessionnelle. Je vois dans le O Tempora O Mores l'espoir que si paradoxalement à l'époque on se croyait déjà en décadence, il est probable que ladite décadence n'ait jamais vraiment existé. Et puis surtout, suave mari magno...

Les mythes ne sont pas des élucubrations obsolètes devenues inutiles à l'heure numérique. L'Illiade a survecu 3000 ans et la croyance des gaulois, puis des francs (et des bretons, etc...) qu'ils étaient les enfants des troyens chassés de leur cité a donné naissance à la noblesse et aux enjeux de pouvoirs sacrés qui ont façonné notre culture. L'épopée des chevaliers de la table ronde commence par la chute de Troie.

Aussi bien dans l'histoire que par nos compétences intellectuelles, nous sommes les maillons d'une chaîne et nous avons autant le droit de tirer sur les maillons du passé que le devoir de construire les maillons du futur. Mais vous savez ce qui arrive aux droits qu'on oublie d'exercer...

Avec de la chance, notre pays ne subira plus de révolution culturelle violente comme on le voit actuellement au moyen orient. Vous êtes donc libre, contrairement aux malheureux habitants de cette région, de vous pencher sur la richesse de votre passé antique qui fait si peur à ces fondamentalistes parce qu'elle renforce votre capacité intellectuelle et vous dote de nouveaux outils de raisonnement.

Car cette réalité antique est, contrairement à des sciences éphémères et contestables (comme justement l'économie), une réalité: vous pouvez aller sur place, en Italie ou en Grèce, et lire de vos yeux ou de vos doigts les stèles millénaires. Vous pouvez porter le flambeau de leur sagesse.

On a beaucoup galvaudé le terme "barbare", qu'on voit parfois dans la bouche d'orateurs peu délicats. Les grecs qualifiaient de barbare celui qui ne parlait pas grec : les mots étrangers qu'il prononçait sonnaient pour eux comme "bar, bar".

Ainsi pour nous hellénistes et latinistes, sensibilisés et édifiés par nos études, ceux qui ne peuvent ou ne veulent comprendre l’intérêt de celles-ci qui ont fait de nous, intérieurement, des êtres épanouis, sont pour nous, au sens propre, des barbares.

Casual Connect Amsterdam en images

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J'ai un mois (ou deux) de retard pour vous parler de la Casual Connect Amsterdam. Comme j'en dis toujours trop, je vais juste vous montrer les photos.

Imaginez que vous êtes chez un ami relou qui va vous montrer ses diapos de voyage. Idéalement vous avez soif ou envie d'aller aux toilettes mais ne vous pouvez le faire QUE quand votre ami relou vous a montré toutes ses photos.





Ça c'est la steambox qu'on a gagné avec notre prix à la Casual Connect Belgrade. Ca fonctionne sous Linux, et pour ceux qui s'inquiètent, oui, Out There tourne dessus !



Ça c'est la Hollande. Ils mettent des moulins partout.


Ça c'est des allemands qu'on a rencontré dans la pré-soirée Casual Connect. Ouais, je peux vous le dire maintenant, on va à la Casual Connect car il y a N soirées pour N-1 jours de salon.
Les allemands ont une particularité, ils ne trichent jamais.



Ça c'est un orgue gigantesque qui était dans la salle où se tenait la soirée. La soirée est très agréable car il n'y a que des développeurs de jeux. On parle de nos petits soucis, notamment de la difficulté de la publication sur l'appstore.



Ça c'est un développeur israélien. Il a fait un jeu sur les maths appelé "le pays de Venn".
"Mon objectif, dit-il, est que les enfants manipulent des triangles et en connaissent les propriétés sans pour autant subir des heures de cours."



Eux, c'est des taiwanais. Leur boite s'appelle Childhood entertainement et ils ont fait un jeu de boxe avec des femmes qui ont des seins qui rebondissent. J'ai vécu un petit moment de solitude avec eux, car, après leur avoir parlé en anglais 5 minutes, ils m'ont dit "pourriez-vous parler en anglais s'il vous plait ? On ne comprend pas ce que vous dites."



Ça c'est les amis de Belgrade : à gauche et à droite les gars de Sileni, et Darko le serbe. Darko dit "La Casual Connect, c'est Casual et on se connecte !"


Ça c'est les français dans un bar à tapas (don't ask). Enfin quand je dis français, le mec du milieu vit à Bangkok et la nana de droite est belge. On a discuté, notamment de Metacritic, car devant les autres on dit pfff Metacritic on s'en moque mais en fait ça nous fait très peur.


Ça, c'est la soirée Pocketgamer. J'ai mis tout mon talent de photographe dedans. La soirée Pocketgamer est connue pour être un désastre, à Belgrade ça c'était terminé dans un bar glauque avec des powerpoints, là, ça avait l'air plus cool. Le lendemain, ceux qui ont tenté le coup ont quand même dit que c'était bof.


Ça c'est Fred (à droite) qui est venu du Japon spécialement pour la Casual. On venait de quitter un dev argentin qui rêvait de manger un kebab pour la première fois de sa vie. Le lendemain, on a appris qu'il avait pas trouvé de kebab mais qu'il avait mangé un falafel pour la première fois de sa vie.


Ça c'est là où on prend notre petit dej dans l'auberge de jeunesse hollandaise qui accueillait tous les dev. Y a pas à dire, les hollandais, question auberge de jeunesse, ils sont au point.



Ça c'est Anna Marsh aka Lady Shotgun qui vient présenter son jeu, un jeu de gestion d'antiquités, avec une équipe 100% féminine basée en France (mais ce sont des britanniques).


Ça c'est le Media Markt, à 10h du matin. Au lieu de louer un écran pour notre Steambox à 200 € / jour, on a préféré en acheter un à 150 €. Là on attend sous la pluie et on se demande si la fête de ce soir sera cool.


Ça c'est un exemple typique d'architecture hollandaise (en face du Media Markt)


Ce mec qui sourit, c'est Jeremy. Un suisse. Il était devant nous au rayon écrans et il voit mon badge Out There et il fait c'est oufffff les mecs (en anglais parce que c'est pas un francophone), en fait c'est Jeremy du jeu First Strike, et on se connaît très bien : on était dans le même humble bundle !
Chargés de nos écrans, on a discuté longuement sur les soucis de publication Steam.


Ça, c'est la lunchbox des exposants. Sympa, non ?


Ça c'est l'équipe Out There au complet, pour la première fois, avec notre musicien au milieu. Cet homme modeste est également responsable de la musique / environnement sonore de The Stanley Parable et Antichamber.


Ça c'est une fille qui joue à Out There Omega.


Ça c'est un sondage à choix multiples en direct. Tu choisis tes options et tu fais passer un fil de couleur. A la fin du salon, les tendances s'affichent physiquement. Super idée.


Ce mec s'appelle Nicola, c'est un roumain. Mais pas roumain dans le sens "retourne jouer à ton jeu vidéo de roumain". C'est un mec qui donne à n'importe qui des leçons magistrales de marketing. Son jeu est un mélange fun de Super Meat Boy doublé d'un party game et il met une ambiance de fou.
A la fin du salon, lui et moi avons fait un pacte : le premier qui s'achète une villa à Miami invite l'autre.


Ça c'est une fille qui joue à Out There (une russe, comme ça on teste la version russe)


Ça c'est une fille qui joue à Out There (une belge)



Ça c'est Michael qui parle à la télé.



Ça c'est le crew des cools guys dans le plus classe restau d'Amsterdam (enfin j'espère vu le prix). 



Ça c'est Florian du jeu Replay (de Neko, des français). Le mec était très nintendo, d'ailleurs il a rapidement dit "Amsterdam ? Osef des putes chuis là pour le streetpass". 


Ça c'était la soirée du jour 1. Bon c'était très hollandais, très Verhoeven. Un DJ passait de la musique techno light pendant que les deux mecs en noeud pap faisaient la robot dance. Derrière, sur l'écran géant, on voyait en temps réel les transactions F2P du monde entier. J'ai discuté avec une californienne qui m'expliquait que les prix des belles maisons étaient les mêmes qu'en France, à part qu'en France, y a moins de tremblements de terre.


Ça c'est Michael et Jeremy qui ont discuté longtemps stratégie de diffusion et pricing.


Ça c'est juste une photo.


Ça c'est un feu piéton. Les feux piétons font tactactactac quand tu peux traverser. Michael traversait partout à la parisienne, ce qui scandalisait tous les hollandais.


Ça c'est un camerounais (qui parle un très bon français) mais qui bosse en Californie et qui nous montre un jeu de la scène Cameroun, un beat-them-all / platform de Kirino games.


A droite c'est ICE PICK LODGE !!! Je suis mega fan de Pathologic et c'était vraiment le grand moment du salon pour moi quand j'ai rencontré Ivan qui m'a expliqué qu'à Ice Pick Lodge, ils aimaient Out There ! Ils bossent en ce moment sur un remake jouable de Pathologic kickstarté au delà de leurs espérances. Vivent les jeux russes qui ressemblent à des jeux russes !


Ça c'est une conférence. 
Un mec explique que dans Assassin's Creed Mobile, tout le monde prenait un personnage assez bizarre appelé "le trickster". Après étude, ils ont compris que c'était le 1er choix offert et que les gens s'en foutaient de choisir un autre personnage.


Ça c'est Maxime Roy de Capital Games. On leur a dit "il faudra un salon indé en France, mec", et ben vous savez quoi ? Je crois qu'ils bossent sur ça en ce moment.


Ça c'est un T-shirt Non aux triple A !


Ça c'est note stand vu de face. A droite c'est Party Hard, un hotline miami avec du hidden in plain sight dedans. Avec une touch ukrainienne. Vous vous souvenez de mon rapport Casual Connect Belgrade dans lequel je parle à des ukrainiens qui faisaient un match-3 random et à qui je disais de faire un jeu avec une personnalité ukrainienne ? C'est eux.


Ça c'est le salon. Cela se passait à la Bourse d'Amsterdam, qui portait le nom moche de Beurs Van Belage.


Ça c'est une fille qui joue à Out There (avec des cheveux violets).


Ça, c'est (sur l'oreille de ce développeur croate) un indice qui vous donne une idée de ce qu'il se passe entre le salon et les soirées.



Ça c'est un data specialist qui s'appelle Datta. Cool non ?
Sinon la boite s'appelle Payment Wall et leur slogan est "Fucking Awesome".
"Nous avons perdu quelques clients avec notre slogan, mais il est trop cool" m'a confié le patron.


Ça, à droite l'autre partie de la team Replay, Danial. Danial n'est pas nintendo-sexuel mais il est snob. Il vous dira qu'il joue à Shadow of the Colossus par exemple. Suspect. On était dans un burger classe et vous savez ce qu'on a fait en mangeant ? Un jeu de rôle à l'ancienne. Avec moi en MJ. Ils sont tous morts.



Ça c'est dans le bus pour aller à la soirée. Amsterdam est pas bien grande et elle était pleine d'un coup de dev du monde entier, et il est arrivé qu'on se fasse arrêter dans la rue parce qu'on nous reconnaissait ! Et là c'est une jeune amsterdamoise étudiante en Game Design qui nous a dit "emmenez-moi à votre soirée !"


Ça c'est la boite de nuit de la soirée 2. Vous savez ces boites de nuit surpeuplée avec de la musique trop forte, des lumières bien beauf ? C'est ça. Et vous savez quoi ? C'était la soirée du siècle. C'était incroyable. Je me suis éclaté.


Ça c'est Michael sur le point de se faire tatouer en fluo le visage pour une nuit qui allait très très longue...



Ça c'est en backroom des écrans sur lesquels on pouvait jouer à Speed Runners, le jeu aimé par PewDiePie (il apparaît même en personnage, bonne stratégie de com, clin d'oeil, sourire) qui avait dépensé pas mal pour la Casual Connect. Certains avaient des stands, eux avaient un salon.
.



Ça c'est quand un commercial m'a donné sa carte alors que j'étais en train de danser. J'allais lui dire que j'étais heterosexuel, mais il a précisé "Si vous avez besoin d'une solution de paiement, pensez à nous !"
Business never stops



Ça c'est ce que je mangeais le matin. Je fais ce que je veux.



Ça c'est quand je suis allé au premier étage pour voler des barres de chocolat dans les conférences google.


Ça c'est Michael qui discute avec l'associée d'Anna Marsh (qui est britannique, et qui réside en France quand même, comme quoi la France a un écosystème créatif séduisant)


Ça c'est ce qu'il y avait dans la lunchbox


Ça c'est les indie Prize. La photo c'est quand on a récompensé une dev espagnole pour ses actions visant à féminiser le milieu professionel du JV.

Jeremy a gagné un prix <3

Les français de Replay (un Braid aux énigmes corsées) ont gagné le prix du public <3

VIVE LA FRANCE

Et Party Hard, les ukrainiens, ont gagné le prix du jury <3

Comme quoi, quand on tente de mettre de la personnalité dans son jeu, on est toujours gagnant.


Ça c'est nous qui discutons avec l'équipe de Vogelsaft, un FPS compétitif asymétrique basé sur la lumière, qui a propulsé en quelques semaines ces étudiants sur la scène pro du JV.


Ça c'est notre amstedamoise de la veille qui ne nous quitte plus et à qui j'ai donné le badge de Danial.


Ça c'est un Rijstaffel,
C'est comme un Mezze mais avec des spécialités hollandaises et indonésiennes. C'est un hymne gustatif dont l'objectif était d'unifier les colonies hollandaises.
Je rêvais de manger ce plat depuis mon enfance quand j'avais lu la fameuse et désopilante nouvelle de Scheckley "Pas de trois du Chef, du Client et du Serveur"
http://www.american-buddha.com/sheckleycanyoufeel.12.htm 


Ça c'est quand on a trop bu, mais cela n'arrive jamais.


Ça c'est quand on était dans un bar après le Rijstaffel. Je ne bois pas d'alcool mais une boisson s'appelait "Le paradis sur terre". J'ai été obligé de le commander.
En me le donnant, le serveur a dit : "préparez-vous à une déception".
On a fini la soirée en se montrant nos tatouages (enfin surtout Kathleen, la belge, qui était la seule à en avoir).




Ça c'est de l'art de rue.
Admirez l'art.



Ça c'est idem.



Ça c'est Harley Quinn



Ça c'était parce que je voulais faire la blague "partout où je pose les yeux, quelque chose me rappelle un jeu vidéo"


Ça c'est Amsterdam. Une ville aux hautes fenêtres, sans chiens ni enfants.
"On se fait un peu chier" m'a avoué une fille du vestiaire.


Ça c'est pour faire la blague "partout où je pose les yeux, je vois des bugs"


Ça c'est pour faire la blague "Voici Gandalf et il fait gris"


Ça c'est ce que j'ai ramené de la CC.
Business never stops.

1 an de travail

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Le 2 avril dernier, j'ai rationalisé ma façon de travailler.

J'ai ouvert un excel dans lequel je mets toutes les tâches du jour à faire. C'est professionnel (comme "écrire une chronique pour 404") comme personnel ("appeler le plombier"), même si le professionnel domine à 90%.

J'y associe un code couleur :
- le vert, c'est quand j'ai réussi à le faire
- le jaune, c'est quand j'ai échoué par manque de temps ou flemme
- le rouge, c'est quand non seulement j'ai échoué, mais en plus je ne pourrais pas le faire plus tard, c'est la fin de la tâche
- le violet, c'est quand j'ai échoué mais que c'est indépendant de ma volonté
- le bleu c'est quand j'ai réussi une tache de longue haleine :-)

Certaines tâches vertes sont reportées chaque jour, comme "contacter des youtubers". Les taches jaunes sont systématiquement reportées à plus tard.

Pas de week-end (je ne note pas la dénomination des jours) car beaucoup de choses importantes se passent le week end : enregistrement, réunions, évènements liés au monde du jeu vidéo...ma vie reste quand même très cool.

Vous verrez des petites plages vertes avec 1 seule tache ce jour, c'était lors de mes déplacements (Boston Pax par exemple). Je me demande si je ne devrais pas prendre des vacances de cette façon de planifier ma vie. Cet excel est devenu, au fil du temps, une sorte de maître invisible...

Voici donc 365 jours avec beaucoup d'échecs et quelques réussites...


VR, Fanfics, FN et mauvaise foi, je crois que le Studio404 de mars brise toutes les limites de la cosmo-énergie

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...d'ailleurs il est sorti en Avril.


Suite à la chronique de Sylvain, je me suis acheté un Oculus.

Mais j'ai pas encore réussi à le faire tourner par manque de temps et pour des raisons expliquées dans la chronique de Daz.

Euh il est possible que le prochain 404 et bien il se passe en public avec une surprise liée au Pérou (don't ask).




Un Livre Dont Vous Êtes le Héros artistique, loin dans les étoiles

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Avis aux collectionneurs !

Comme vous le savez, il y a quelques années désormais, Fanette Mellier, graphiste, m'a demandé dans le cadre de son projet en résidence Médicis de lui écrire un livre dont vous êtes le héros sur le cosmos.

La facture textuelle devait être la plus conforme possible aux standards des années 80, mais c'est sur la forme qu'elle travaillerait.

Le texte a été livré en juin 2011, et nous voilà en 2015 et le livre est sur le point de sortir aux éditions Franciscopolis à 500 exemplaires.

C'est un livre dont vous êtes le héros à la difficulté élevée, à la forme et au fond complexe.

Les thématiques abordées liées au cosmos (solitude, vide, hostilité à la vie, caractère exceptionnel de la vie) se sont naturellement retrouvées dans Out There.

Le livre a une vocation poétique, si tant est que je suis capable d'en produire.

Sans déflorer trop le sujet, voici quelques éléments de visualisation :




Le texte comporte des minis jeux (en haut à gauche) que j'affectionne beaucoup.

Au milieu à gauche se trouve deux points, ce sont des "dés" incrustés en surimpression, qui existent sur chaque page. Ainsi, en ouvrant le livre à n'importe endroit, on peut avoir un lancé de dé.

Il existe un langage alien spécifiquement créé pour l'occasion (en bas à droite).

Par ailleurs il existe une normalisation des éléments liés au livre dont vous êtes le héros avec des effets de soulignement ondulés. Le texte a été très compacté pour donner une mise en page surprenante et "étrange". 

Peut-être qu'avec le dénouement final de l'intrigue, cette mise en page prendra tout son sens...


Voici une partie de la couverture du livre. 

La couverture fait office de carte et d'élément de jeu avec des coordonnées et des étoiles.

Au revers de la converture, qui est en fait une jaquette, se trouve une "encyclopédie des étoiles" qui explique tous les éléments "véridiques", paragraphe par paragraphe, du jeu.


Les règles du jeu sont imprimées à part dans des éléments fiches cartonnées qui sont intégrées dans le livre. 

Ces fiches au nombre de 6 ont leur dos illustré avec des dés. Ainsi, elles peuvent servir d'élément de jeu.

Si vous zoomez sur les points, vous verrez qu'il s'agit de planètes avec de minuscules atmosphères, rappelant le travail de Fanette sur un autre livre (les lunes).


Le livre vous met dans la peau d'un archéologue du futur qui doit comprendre l'histoire d'une civilisation disparue.

Attention cependant, si vous êtes amateur d'objets plutôt classiques, vous serez face à un OVNI qui se veut une expérience plutôt qu'un produit formaté pour la lecture standard de fictions interactives.

Bien entendu il y aura une sortie officielle mais je sais que la communauté des joueurs et des collectionneurs voudrait la primeur des exemplaires.

A ce titre, voici les infos si vous voulez contacter l'éditeur et réserver votre exemplaire :

Editions Franciscopolis / Contact : http://franciscopolis.com/Contact
Le livre "Le Chant des Oubliés"
112 pages

Bien qu'étant un objet artistique, le livre final devrait coûter aux alentours de 20 €.

Merci à Fanette de m'avoir accordé la joie de travailler avec son exceptionnel talent (et j'ai appris beaucoup de choses à ses cotés !)

« Le répit est une illusion.
La prospérité 
d’une espèce passe par son évolution constante,
et 
celle-ci découle de l’adversité qui lui est soumise. Si elle
doit périr face à un obstacle, elle n’aurait donc pas survécu
au suivant. Et qui sait si elle-même n’était pas
l’obstacle de son obstacle, c’est-à-dire, le facteur évolutif
nécessaire non pas pour elle, mais pour l’adversité rencontrée ? »



Une citation de David Hego, Directeur Artistique de la licence Batman Arkham

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Une masterclass encore une fois exceptionnelle de qualité qui recevait le français (né à Cambrai) David Hego, DA sur les Batman de Rocksteady (des jeux dont on peut réellement dire que la DA est fabuleuse, en plus de jouer un numéro d'équilibriste dingue avec des univers très protégés).



Je vais essayer de tirer l'unique chose qui est la plus importante selon moi de cette conférence généreuse qui a débordé en horaire. Elle rejoint une problématique que j'ai dans la conception de jeu (le fait que très rapidement, les joueurs abstraient les notions d'environnement pour se concentrer sur les mécaniques) et propose une solution.

"En direction artistique de jeu vidéo, il y a un problème que j'appelle celui de la normalisation. Aussi stupéfiants soient les environnements que vous créez, à un moment le joueur fait abstraction de ceux-ci. Il nivelle sa contemplation et n'est plus étonné. Pour contrer cela, il faut ajouter une granularité au travail. Il faut mettre le joueur, par exemple, dans un couloir le plus ordinaire possible, le plus ennuyeux, il faut l'endormir. Au bout du couloir, il ouvre la porte, et un nouveau monde extraordinaire se révèle. Il faut, en permanence, créer cet effet de contraste."

Je me demande comment appliquer cela à du gameplay ?

Game of Thrones et GotWar : participer au game design pour Bigger Than Fiction / OCS

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Cet article revient sur le très léger travail que j'ai apporté au projet "GotWar" lancé par l'agence de communication Bigger Than Fiction mandatée par OCS / Canalsat concernant la communication autour de la diffusion de la saison 5 de Games of Thrones.



Il entend présenter pourquoi un Game Designer pourrait intéresser une agence de communication et aussi quelles sont les contraintes particulières liées au fait de travailler dans cet environnement.

BTF a réalisé un case study complet sur le sujet que vous pourrez lire ici :

http://biggerthanfiction.com/realisations/le-retour-de-la-gotwar-4-jours-de-tweet-battles/

L'année dernière, pour la saison 4 donc, BTF avait lancé un jeu-concours qui s'appelait la "GotWar".

Au coeur du système, une sorte de loterie qui fait que des gens s'affilient à une armée du monde de Game of Thrones, retweetent, sont sélectionnés pour gagner des places à l'avant-première, le tout boosté par des équipes de blogueurs et d'influents qui s'affrontent dans une guerre virtuelle.

Cette année, BTF a fait appel à un game designer (moi) pour "gamifier" et scénariser légèrement ce système.

Autrement dit, l'idée était que cette année, les gens ne retweetent pas simplement dans l'optique de gagner quelque chose (même si cette partie est très importante voire même contraignante, puisqu'elle entraîne le concours légal d'un huissier ainsi que la parfaite exécution de la lecture de gameplay pour assurer l'impartialité des résultats) mais aussi pour simplement s'amuser.

J'ai donc découvert le monde étrange de la communication professionnelle.

Le premier contact est que nous avons des consignes générales qui viennent de tout en haut (Canalsat / HBO) et qui sont différentes des principes et des objectifs liés à la création d'un gameplay. Par "différent" je n'entends pas "contraire" mais plutôt comme une consigne éloignée qui a sa raison d'être dans leurs sphères de travail et qui résonne étrangement une fois arrivé dans le domaine de conception.



Ainsi, la consigne générale pour créer un système de game design lié à GoT en utilisant twitter était "4 familles, 4 jours, 4 batailles".

Ce type de projet est effrayant pour un créateur de jeu confirmé. A vrai dire, c'est parce que ces personnes sont comme inconscientes du danger qu'elles arrivent à produire ce type de miracle : entre le lancement du projet et sa conception se sont déroulés 15 jours, un délai inimaginable dans le milieu du jeu vidéo. Mais le rythme des agences est assez fou (les espérances de vies doivent être faibles également).

En terme de sueur, mon travail a été très léger : je suis resté une heure dans un bureau à participer à un brainstorming, j'ai validé ensuite la retranscription de nos conclusions en les commentant, j'ai encore participé une fois à une réunion détaillant les concepts à l'équipe de réalisation.

Pour ce faire, l'agence Bigger Than Fiction a bénéficié de l'accompagnement de Twitter France avec un bot incroyable capable de traiter plusieurs centaines de milliers de tweets par minute.

Lors du brainstorming, l'équipe de l'agence de com était très ambitieuse, je dirais pas qu'ils imaginaient un jeu PS4 mais parfois...c'était pas loin.

L'objectif était de créer un jeu qui associe amusement, viralité et retweet, tout en ayant en tête les dangers d'un effet contreproductif en noyant les timelines sous des tweets redondants (twitter n'autorisant d'ailleurs pas les tweets identiques d'affilée, on a du imaginer des mini astuces).

J'ai immédiatement ressorti l'un de mes très vieux projet que mes tous premiers followers doivent connaître : Adventwitter, qui prenait vos comptes twitter et le transformait en une sorte de pokemon dont les stats étaient basées sur les stats twitters (le ratio followings / followés déterminait la force par exemple). En gros une bio générée à la volée à partir de vos stats + des combats organisés avec ledites stats. Le bot Adventwitta est d'ailleurs toujours actif (mais plus le site adventwitter.com, moi aussi je rogne sur les budgets :) ) et à l'époque, #adventwitter était passé en Trending Topics, donc j'avais une preuve de la viralité potentielle du projet.



La suite a été très facile à conceptualiser...j'ai surtout insisté sur le fait qu'il y ait des arbres généalogiques avec les "Seigneurs Influents" : Madmoizelle, Journal du Geek, Game One.

J'ai même essayé de suggérer qu'à la fin d'une bataille on ait un visuel du chef d'une famille (genre le boss du journal du geek) qui soit décapité mais devant leurs yeux effrayés je n'ai pas insisté sur ce point. :-)



Le principal problème d'équilibrage vient du fait que les joueurs adorent les Starks ou Daenerys et provoquent des déséquilibres dans leur choix de famille...a tel point que la question de ne pas faire figurer ces familles a été posée. On a finalement envisagé un gameplay off de "conseil de guerre" entre les familles.

Autrement dit, ce n'était pas tout le monde se marrave dans le chaos et les plus nombreux (les Starks) survivent, mais plutôt quatre familles qui se disent "hum, les Starks vont dominer, tous sur les Starks". Ainsi les familles influentes dirigeaient la force générée par les comptes twitter qui venaient leur prêter allégeance.

Cette histoire de conseil de famille pouvait générer des situations tactiques émergeantes bizarres dans lesquelles une famille pouvait décider de ne rien faire ou au contraire de taper sur tout le monde au hasard, dans cette incertitude flottante que l'on a dans le jeu de société Diplomacy.

Lors du déroulement du projet, j'ai fait une grosse bêtise, à savoir que j'ai communiqué librement sur celui-ci (en le twittant). Ces projets ont une communication contrôlée à de multiples niveaux et je crois que je ne me suis jamais fait engueulé comme cela ces 4 dernières années. J'ai appris la leçon (et je plains les gens travaillant dans des grosses boites...) mais tout s'est arrangé.

Le projet a été un succès grâce au travail considérable de l'agence et de l'équipe de réalisation qui a produit un jeu fonctionnel dans les temps. L'opération a généré 63 000 RT et a été présenté en case study chez Twitter.

BTF est également satisfait de l'opération et je les remercie de m'avoir fait participer à cette expérience.

En résumé :

+ le Game Design, ca marche aussi en Agence de com (envoyez vos CV !)
+ Focus sur l'amusement, l'environnement de travail saura de toute façon vous tirer vers leurs objectifs (la viralité)
+ les délais sont invraisemblablement courts et nécessitent beaucoup de réactivité
+ Le produit final est moins un jeu qu'une créature manipulable par un maximum de gens
+ C'est assez cool


Gamescom 2014, de l'autre coté du miroir

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D'un coup, tout est devenu grand.

Out There avait été présent à la Gamescom 2013, et ç'avait été une catastrophe : les contacts minces, les promesses envolées, le matériel volé.

Il y a de nombreuses raisons pour lesquelles nous voulions être à la GC 2014, pour les contacts, pour le feedback des joueurs, pour la presse - mais aussi nous avions une revanche psychologique à prendre pour effacer l'immense frustration d'avoir collaboré avec Ubifrance. L'enveloppe budgétaire était importante (environ 7000 €), quatre fois plus que l'année précédente, deux fois plus qu'à la Pax, et nous ne savions pas si nous allions rentrer dans nos frais.

Mais comme je le dis souvent à Michael, et surtout à moi-même qui refuse de sortir et de rencontrer des gens, la première condition pour pouvoir écrire de belles aventures est d'abord d'en avoir vécu.


La GC a commencé Paris Gare du Nord, dans le hype train de la veille aux aurores, qui se remplissait de développeurs et de la petite armée composée de gens très beaux envoyée par Ubisoft. 

Dans l'onctuosité tamponnée des wagons, pas de LAN sauvages ou discussions sur les jeux, ça parlait business, emploi du temps, free to play (dans le cadre de perspectives de marché) et de la soirée Wargaming qui promettait d'être incroyable et à ce titre, on me considérait avec apitoiement quand je disais que non, je n'y étais pas invité (j'étais déjà bien stressé à l'idée d'aller dans un pays étranger pour m'en soucier).

Cologne brûlait de fanions aux couleurs déclinées du jeu vidéo. 


Playstation flottait sur le pont ferroviaire au dessus du Rhin, AMD frappait les devantures des kebabs et les ruelles assaillies par la végétation. 

avec des évènements off aussi présents

Et bien sûr, le bleu ciel consensuel de la Gamescom, entourant une photo consensuelle soulignant l'identité marketing de l’événement, augurant F2P et suites prévisibles.

Nintendo a appelé, ils trouvent votre affiche un peu mièvre

J'ai traversé Cologne à pied pour rejoindre notre appartement AirBnb, afin de bien prendre la mesure de la ville. Nous étions à 45 mn à pied du centre, qui lui était à 20mn de la Koelnmesse où se tient la GC. A noter que la Koelnmesse est quelque chose de grand - il en faut bien 20mn pour en parcourir la longueur.


Un je-ne-sais-quoi dans ma déco de ma chambre
m'a tout de suite positivement interpellé

Cela m'a fait vraiment très plaisir de retrouver l'équipe d'Indie Mega Booth qui nous avait si bien accueillis lors de la Pax. Nous avons eu des petits problèmes logistiques (nous n'étions pas les seuls...) : manque de cables, bannière qui se décrochait, mais dans l'ensemble tout s'est résolu assez rapidement, dans la novlangue propre à la GC qui mêlait français, allemand et anglais (I would like a Frustuck s'il vous plaît).

Michael est arrivé un peu plus tard que moi, et il avait oublié son sac dans le train. "Je crois que Dieu m'aime", m'a-t-il dit de façon exaltée quand les objets trouvés lui ont redonné son sac.

Alors que nous étions en train d'installer le stand, le responsable Europe d'Oculus Rift est venu et nous a dit "J'adore votre jeu !". Je ne sais pas ce qui m'a pris, mais je lui ai répondu :"Je pense que l'Oculus Rift a un grand avenir, mais pas dans le jeu vidéo." Et le pauvre est parti. C'est là que Michael m'a dit "Mais tu es un vrai connard" - et je me suis dit, mais c'est vrai, je suis un sale con.

Je me suis dit, c'est un signe pour que je fasse attention et que je dise du bien de tout le monde. Je suis donc allé tester un jeu en attendant des câbles : Wander. Un jeu sous cry engine, très impressionnant visuellement. J'ai mis le casque et je me suis dit à moi-même : "mec, dis du bien de ce jeu".
Sans caricaturer, le jeu consiste à bouger en vision TPS un homme-arbre hyper lent dans un décor sans interaction - c'est le concept. A part que c'est un MMO. Ouais, le jeu est un MMO contemplatif sans interaction. Alors j'ai dit que le jeu était joli - et je me suis dit que moi, par contre, Dieu ne m'aimait pas.

Le soir nous avons dîné avec l'équipe d'Amplitude, un studio français auteur de Endless Space, ce qui nous a permis de bitcher à la française, c'est à dire non sans amour, sur les jeux présents.


A droite de Michael, Stéphanie qui s'occupe de tout ce qui est com chez Amplitude

J'ai pu longuement discuter avec Maxence "Maximos", Game Designer chez eux et avec qui j'étais Jury à l'Ican cette année (j'aurais aimé vous en dire plus à ce sujet, mais je n'ai jamais obtenu l'autorisation, si un enseignant lit ce message...). 

J'ai posé ma question leitmotiv "quel est votre jeu préféré". Stéphanie s'est excusée et Maxence m'a dit la chose suivante :

- Je vais dire un truc bizarre, mais mon jeu préféré est Soldier of Fortune 2
- Double Helix ?
- Ouais, mais là où c'est bizarre, c'est que j'aime le multiplayer. SoF2 permettait de se pencher, pencher la tête et le corps, et en multiplayer, il y avait une petite "danse" des personnages. En multiplayer compétitif, on a le réflexe de faire un headshot mais là on pouvait pencher la tête et donc...éviter les balles.
- Tu veux dire qu'on peut éviter les balles en se penchant ?
- Ouais c'est fou, et c'est une mécanique que je n'ai plus retrouvée depuis.

Nous avons aussi discuté du caractère très générique des RPG et des stéréotypes donjons et dragons qui semble obligatoire, même pour des productions exotiques.

Je ne comprends pas pourquoi nous n'utilisons pas le matériau librement accessible et fascinant des mythologies disons...disons slaves. L'oiseau de feu, Baba Yaga, les rusalki...ces types là ont des dieux aussi anciens que les dieux summériens et aussi flamboyants que des dieux scandinaves ! Aujourd'hui nous sommes privés de cela à cause d'une stratégie de prise de risque minimum !

Le monde est petit, car dans les 340 000 visiteurs de la Gamescom nous sommes tombés à l'entrée sur l'équipe de ZQSD qui nous a offert ce goodie illustrant à la perfection l'entente franco-allemande :


Rapidement, j'ai compris deux choses essentielles sur les allemands :

1) D'abord, ils font confiance à tout le monde. Ils ne leur viendrait pas à l'esprit, ou très difficilement, qu'on rentre sans autorisation dans un endroit. Du coup il y a certes des vigiles, mais si vous passez d'un pas assuré, personne ne vous arrête. Je suppose que quand un malfrat braque une banque, il déclare :"je sais que braquer une banque est interdit, mais voyez-vous, je suis un bandit, donc il devient parfaitement logique que je prenne sans autorisation votre argent". D'ailleurs cela m'a profité : la veille, j'ai pu rentrer à la GC sans badge et certains français filous ont pu aller dans les backstages de divers gros stands.

2) Chaque français a un deuxième métier, c'est écrivain. Et bien chaque allemand a un deuxième métier, c'est DJ.

Au mec qui préparait la nourriture pour les exposants :

- "Wow, vos sandwichs sont énormes !"
- "En fait, je suis juste là pour aider. J'essaie de percer en tant que DJ"


Au mec qui clouait une toile sur notre table :

- "Wow, on dirait que vous avez fait cela toute votre vie !"
- "Et pourtant c'est la première fois. Je suis dans l'évenementiel mais ma spécialité c'est DJ"

etc...

Et cette passion DJ, vous ne pouvez la comprendre que lorsque vous arrivez épuisé à 8h du matin avec 5h de sommeil dans la tête et que les stands voisins passent de la lambada techno ou un remix dubstep de Skyrim à fond, et quand je dis à fond, je veux dire qu'à l'autre bout du hangar cela faisait des zigouigouis dans l'intestin. Et cela, juste pour le plaisir, deux heures avant l'ouverture de la Koelnmesse.

Dans cette photo se trouve un sémillant journaliste JV français
et un créateur d'un jeu million-seller, saurez-vous les retrouver ?

La palme d'or de la nuisance sonore revient néanmoins au stand EMP qui passait du métal allemand toute la journée, à fond bien entendu, et quand la Gamescom fermait, et que le silence se faisait, ils poussaient un petit peu la sono histoire de pouvoir triper tous seuls. Comment peut-on écouter, 10h par jour, du métal allemand sans devenir dingue ? Aujourd'hui quand je ferme les yeux mon cerveau tambourine encore.

Avant l'ouverture, nous explorons ces immenses stands

J'avais une combinaison orange vif d'astronaute, du coup, suivant mon karma, je suis devenu "le connard en orange" ou "le mec sympa en orange". En tout cas, porter toute la journée une combinaison orange est assez utile : par exemple le matin, pas la peine de dire au taxi qu'on allait à la Gamescom, il comprenait tout seul.

Donc histoire d'optimiser nos contacts, on a pris une hôtesse.


Meet Penny (ce n'est pas son vrai nom)

La première chose que je lui ai dit c'est :

- "Quel est ton jeu préféré ?"
- "Je déteste les jeux vidéo."

Plus tard elle m'a dit :

- C'est quoi ton vrai nom ?
- FibreTigre.
- Non mais ton vrai nom ?
- FibreTigre sera ma seule réponse.
- Pourquoi tu utilises ce nom ?
- Parce que si je fais une bêtise ou que je me comporte mal, mon interlocuteur va détester FibreTigre, mais pas moi. C'est très pratique.
- Si je devais avoir un faux nom, ce serait quoi ?
- Penny.
- Pourquoi tu réponds aussi rapidement ? Pourquoi Penny ?
- Penny dans The Big Bang Theory. Elle déteste les trucs de geeks et elle est avec des geeks, comme toi.
- Mais elle est bête Penny.
- On peut pas tout avoir.

Et du coup je l'ai appelée Penny.

L'indie Mega Booth s'est enrichi de nombreux services (comme du gardiennage) et le décorum est d'un niveau important. Les bannières livrées étaient magnifiques et les stands avaient une vraie classe. Comme à chaque fois Logitech nous offrait claviers et souris, et soundblaster nous offraient des casques.

Une souris top niveau avec un système de poids pour en faire varier l'inertie. Folie !

Être sur l'IMB change vraiment la vie, car on est labellés indépendants de qualité (il y a une sélection) et sur la base de cette sélection, des gens achètent votre jeu.

Par ailleurs, les gros comme Ubisoft ou Blizzard avaient tellement bien fait leur boulot de com, que les journalistes n'avaient pas d'éléments différenciants sur leurs publications : tout le monde allait parler de Far Cry 4 ou de Bloodborne, grosso modo avec les mêmes éléments de base. C'est donc sur l'indépendant que la valeur ajoutée et les informations qu'on ne trouve pas ailleurs pourraient être dénichées.

Ainsi, nous avons eu un nombre important de journalistes qui sont venus nous voir, notamment la radio allemande.


Snipers love Out There

Voici un petit tour des jeux remarquables sur l'IMB, que j'ai pu voir :

La team french :

- Nous
- Amplitude (ils sont cools, achetez leurs jeux)
- The Next Penelope, un jeu de course dynamique réalisé par le dynamique Aurélien Regard
- Seaven Studios pour un jeu musical à la Super Meat Boy. Le jeu m'a convaincu !
- Et enfin, juste à coté de l'IMB, Ghost of a Tale, un jeu de Stealth où on est une petite souris, un one-man game qui représente un travail de titan mais derrière c'est un français de Perpignan ancien directeur de l'animation chez Dreamworks. Le jeu a particulièrement séduit Netsabes de CPC.

Les jeux "rock star"

- Below des mecs qui ont fait Sword and Sorcery. Le bonhomme est petit et l'action un peu molle, mais l'animation est superbe et de nombreuses personnes sont tombées sous le charme.
- Speed Runners : une équipe de Danois fous qui ont fait un jeu fou et hyper jouissif (j'ai acheté leur T-shirt)
- Broforce : bah, c'est broforce quoi
- Super Time Force : bah c'est super time force quoi
- Chroma Squad : Un tactical dans un monde sentai. J'ai adoré, et si l'ergonomie est perfectible, c'est plein d'humour, de challenge et de potentiel. Un hit certain.

Les outsiders

- Gang Beasts : au début je me suis dit "c'est quoi ce projet étudiant du pauvre ?". Mais Valentin d'Indius m'a invité à me plonger dans le jeu et c'est vraiment un des trucs les plus drôles auxquels j'ai joué. C'est une sorte de jeu de catch avec des hommes-animaux mais ils ne se donnent pas des uppercuts de pros, ils se maravent comme des gamins qui se chamaillent. Le jeu est ultra-chaotique, et les situations émergentes permanentes sont très amusantes. En l'état le jeu n'a pas d'intérêt sur le long terme mais il est certain que tout le monde l’achètera pour faire quelques parties.
- Renowned Explorers : un jeu tactique et stratégique charmant.
- The Talos Principle : Un Portal Like fait par les mecs de Croteam (Serious Sam) avec un énorme potentiel.


La danoise cosplayée en runner licorne de Speed Runners
fait une pose Sentai devant Chroma Squad


Concernant The Talos Principle, je m'assieds pour tester le jeu, et un dev me dit :

"Vous connaissez Portal ?"

Alors je réponds malicieusement :

"Je connais Serious Sam."

Et là avec un accent slave hyper sérieux, il répète :

"Vous connaissez Portal ?"

Oui, oui...oh la la...

Je commence à jouer et je bloque sur la première énigme. Je tourne un regard suppliant vers le dev et il me dit avec des yeux durs :

- "Vous voulez que je vous aide ?"
- "Oui"
- "Et bien jamais je ne vous aiderai. Débrouillez vous."

Bon et bien j'ai finalement réussi à faire toutes les énigmes. Il s'agit d'un Portal-like, donc un FPS sans shoot mais à énigmes, avec un très gros potentiel. Les énigmes de la démo qui représentent le prologue du jeu sont bien vicieuses, et j'ai hâte de voir le produit final !

A noter que le narrative designer de l'équipe est celui qui a fait la narration dans FTL. Gage de qualité !

Ma récompense pour avoir fini la démo

Le premier jour, le public ne pouvait pas venir dans la GC, c'était uniquement presse et professionnels. On a rencontré des tas de types incroyables qui aimaient notre jeu et qui nous ont motivé à 2000% pour en faire d'autres, comme le directeur créatif de Daedalic ou le Game Designer de Specs Ops the Line chez Yager, qui nous a dit que dans leur prochain jeu, il y aurait une phase "à la Out There".
Tenez vous prêt !


Contrairement à la Pax, on ne parle plus Kickstarter ou financement participatif...est ce que c'est l'effet Europe ou d'un déclin d'image de ce type de financement ? 

Par contre c'était le royaume du Free To Play...

Le troisième jour nous sommes allés faire un tour dans la business area de la GC. En fait, la Gamescom consacre 4 halls (immenses) uniquement à la rencontre de professionnels. Ainsi Ubisoft ou Wargaming avaient un stand pour les joueurs et un stand pour la presse / business.

La business area, l'endroit idéal pour une cure de silence

Ces intermédiaires professionnels ouvraient des yeux tous ronds quand on leur disait qu'on fonctionnait en modèle premium, comme si c'était dépassé. 

Sur le stand Kalypso, des bières brandées Motorhead

Je suis obsédé par l'idée de lancer Out There en Asie et notamment en Chine, ce qui agace Michael car il estime, probablement à raison, que ce n'est pas une priorité. Mais ces deux milliards de chinois me font rêver ! 2 milliards, ca veut dire que si votre jeu plaît à 0,00001% de la population, vous faites quand même 20 000 ventes !

Bon du coup j'ai rencontré des professionnels de la commercialisation en Asie et ils m'ont dit ceci :

a) Votre jeu est premium ? Bof. Le jeu premium le plus vendu en Chine, c'est Plague, et il est classé dans ses meilleurs jours 50e au classement.
b) Votre jeu se joue d'une seule main ? C'est important. Les utilisateurs asiatiques font toujours autre chose avec leur autre main.
c) Surtout ne traduisez pas le jeu avant de contacter un publisher. Si vous faites cela, votre jeu va être downloadé par des gens qui vont les mettre sur des appstores "alternatifs" où vous ne serez pas rémunéré et aucun publisher ne voudra passer par vous ensuite.

La business area est angoissante...parce qu'il n'y a pas grand monde.

Le stand des jeux iraniens (ils font des FPS)

A moins d'avoir une stratégie de communication très calibrée, je déconseillerai tout indépendant d'être dans ce type de hall car il se prive du feeback du public, ce qui est essentiel, et les journalistes n'y flânent pas : ils passent de rendez-vous en rendez-vous.


Le genre de stand qui fait triper les spécialistes marketing

Le premier jour (bon tout n'est pas dans l'ordre chronologique, ok), le mec d'Oculus est venu nous prendre un t shirt. Du coup, comme je regrettais d'avoir été méchant avec lui je lui ai dit que je l'aimais beaucoup en le prenant dans mes bras.


Girls love Out There

D'une façon générale, on aime beaucoup tous les gens parce qu'on est lucides sur le fait que notre jeu a été fait avec des bouts de ficelle et qu'on est pas toujours très présentables avec notre anglais franchouillard et hésitant, alors on a de la reconnaissance pour ces gens qui viennent nous voir.


Sur l'IMB était distribué un journal gratuit "Independant Amazing",
notez le mini livre dont vous 
êtes le héros en bas.

Le troisième jour, il est arrivé un truc complètement fou et assez instructif sur ce qu'est devenu notre sphère médiatique. Un type se pointe et dit "je représente un youtuber très important (Ali-A), avec des millions d'abonnés, est-ce que vous acceptez d'être interviewé par lui ?"
Alors bien sûr on dit ok.
Un type illuminé se pointe avec une caméra gros modèle, style TV, et à ses cotés, une nana décidée et un petit jeune complètement paumé. A part le petit jeune qui a envie de se cacher quelque part, ils sont tous comme exaltés. L'homme à la caméra, que je soupçonne être le père du petit gars, le dirige avec autorité. Il pose les questions et le petit gars les repose derrière.
A la fin, il y a un rituel, ils doivent se serrer la main avec Michael et Michael doit lui tendre sa carte, mais les deux s'embrouillent et on doit refaire la scène 3 fois. Le gamin a murmuré sans conviction ses questions, mais pour le papa à la caméra TV, c'était top.
Vous avez compris qu'on est dans un schéma à la Jordi avec un enfant-youtuber-star complètement drivé par ses parents. Nous avons rencontré d'autres youtubers (qui n'avaient pas comme lui 4 millions d'abonnés) et la relation était bien plus naturelle.
Faites attention les jeunes, si un jour vous avez trop d'abonnés, vous risquez d'en devenir prisonnier (surtout si vous êtes entouré d'opportunistes qui veulent vous voir réussir !)

A gauche, le gamin, et à droite une partie son "staff"

Le mercredi soir, c'était soirée Gamescom (et oui, surtout la soirée Wargaming). 

Une navette nous accompagne depuis la GC jusque dans un pavillon immense non loin.


Un peu partout, des voitures de collection comme des Delorean ou des Buick, des flippers et bornes d'arcade, de la nourriture à foison (sauf pour les desserts), une piste de danse grande comme une cathédrale, et évidemment, des océans de bière.

Au début de la soirée, on nous donne un "jeton" en plastique (que j'ai gardé) et qui permettait de jouer à des sortes de machines à sous ou autres jeux pour gagner des lots (par exemple un casque audio top qualité). Mais si vous perdiez votre ou vos jetons, que faire ? Et bien vous pouviez en acheter d'autres.

Vous voyez le truc ?

Les mecs avaient fait de l'in-app purchase IRL dans leur soirée ! Incroyable ! Et personne ne s'en rendait compte ! 


On l'a joué à la française, c'est à dire qu'on a passé 100% de la soirée avec des français. C'est dommage, mais on est comme ça, nous autres les français.

D'abord avec Amplitude, où on a parlé Boardgames, jeux de rôles et les tendances du moment. Il faut voir que les boardgames sont d'excellentes souches à game design, notamment pour les jeux 4x qui font la fortune d'Amplitude. Le CEO lui même est un très grand joueur, et c'est une bénédiction des "petites" entreprises d'avoir des dirigeants et des communiquants qui sont avant tout des joueurs et qui donc ont un rapport direct avec leur marché. Cette évidence qui devrait en être une ne se retrouve pas en pratique dans les grandes entreprises.

- "Je suis un ancien d'Ubisoft."
- "Qui ne l'est pas ici ?"

Ils sont joueurs de Magic et je leur ai fait part de mon incrédulité face au succès d'Heartstone, dont la complexité est moindre :

Heartstone a été développé par une petite équipe, dix personnes disons, mais leur génie a été de créer l'interface et les principes de jeu, le feeling, avant le système de jeu. Les cartes qui se collisionnent, les pouvoirs...ils ont fait tout cela et après seulement se sont concentré sur le système de carte. C'est pour cela que tout le monde y joue : il est super intuitif, ultra accessible. Et du coup très joué. Et du coup on trouve tout le temps des joueurs.

Pas mal ont déserté en milieu de soirée pour rejoindre la fameuse soirée Wargaming et son concert de Justice qui selon les rapports était absolument fabuleux.


On a migré du coté d'un autre groupe de français : Seaven Studio, Swing Swing Submarine, un petit peu d'Aurélien Regard et également Mélanie, qui représente Transformice, et puis un peu plus tard, Frédéric Raynal.

Un mot sur "Transformice".
C'est un browser game flash avec des souris.
La boite est à Lille.
Les mecs ont 1,5 MILLIONS de fans Facebook. J'espère que ça vous calme bien.
Ils font tourner une entreprise de 10 personnes en France et payent dûment leurs impôts et leurs charges contre vents et marées. Vous connaissez la sensibilité que j'ai pour les gros chiffres - j'ai du mal encore à m'en remettre. Mélanie en plus est hyper sympa, hyper documentée sur les jeux (ancienne d'Ankama), patriote et loyale (n'importe qui aurait migré à Malte ou au Delaware depuis belle lurette) leur histoire est une aventure entrepreneuriale de malade qui imposerait le respect à de nombreux wanabee entrepreneurs qui se la racontent avec des concepts 2.0 vaporeux. La femme parfaite ?


Mélanie est jury au CNC et vous connaissez mes positions sur les subventions. Nous avons beaucoup discuté sur le système des subventions et leur impact sur la psychologie des entrepreneurs.

Bien entendu je maintiens mes positions sur les subventions, à savoir que selon moi elles produisent un système injuste et d'injustice, qu'elles produisent peu de résultats qualitatifs, qu'elles plongent l'entrepreneur dans une logique de perception de fonds au lieu d'une relation client saine.

Je me suis aperçu en discutant avec Mélanie et un développeur de Swing Swing que dans ma lutte dialectique je blessais des individus alors je m'attaquais à un système. Du coup je me suis senti, une fois de plus, un sale con, et je leur ai présenté mes excuses - et je présente mes excuses à ceux qui me lisent et que j'ai blessé, même si ce ne sont que des mots.

Cela étant...

"Prenez un hôpital spécialisé dans la chirurgie cardiaque. Imaginez que sur 50 malades, seuls 3 survivent. Dirait-on que c'est un bon hôpital ? C'est pourtant un ratio de réussite bien supérieur au Crowdfunding et aux fonds CNC."

"Vous prétendez que vous financez les dossiers les plus solides. Mais si les dossiers sont si solides, pourquoi n'obtiennent-ils pas tout ce dont ils ont besoin à partir de fonds privés ? Les publishers sont nombreux."

Ce à quoi on me répond :

"C'est certes un mauvais système, comme l'est le capitalisme, mais c'est le moins mauvais qu'on ait pour le moment."

Mélanie a pris le temps de m'expliquer et je reconnais que les intentions et les méthodes de la subvention publique ont volonté de clarté et d'intégrité. Mes arguments ont été démontés un par un, et je pense qu'elle a miséricordieusement caché certains faits qui démontaient mes affirmations.

Je campe néanmoins, comme le sale con que je suis, sur mes positions. Mais dans les excuses que je tentais d'aligner, j'ai quand même expliqué que cette position était psychologiquement essentielle pour moi.

Il est important pour moi que j'ai cette croyance passionnée, que ma façon de travailler est la bonne. Parce qu'il est très tentant d'aller chercher des subventions - après tout, nous travaillons pour gagner de l'argent. C'est très dur d'être tout seul, de présenter son jeu au public, de le vendre, d'essuyer des critiques, de repousser les échéances sociales d'un gars de 35 ans pour pouvoir affirmer son travail, et cette énergie je la tire de mes convictions. En revanche il n'est pas acceptable que dans mes affirmations je fasse du mal aux individus. C'était un constat d'amertume, mais quand on est amer, c'est qu'on levelle de la vie.


Mais le moment le plus émouvant de la soirée a été quand William de SwingSwing a parlé de son prochain projet : Seasons after Fall. 
Il a expliqué que c'était un projet plus ambitieux que leurs moyens ne le permettaient, que c'était un projet "kamikaze". Mais ils étaient obligés de faire ce projet, car c'était le projet dont ils rêvaient depuis le début. Psychologiquement, s'ils ne le faisaient pas, ils ne pourraient jamais s'accomplir.
Vous verrez qu'ils y arriveront et que ce sera un grand hit.
Parce que c'est leur rêve. Parce que forcément le public suivra leur rêve - car il est sincère.
Dans combien d'industries peut-on faire ce type de pari fou ?

"Vous pensez que Frederic Raynal devrait changer de coupe de cheveux ?"
"Au contraire, c'est sa marque de fabrique. Et encore, avant il avait des chemises à la Parker Lewis, là il est devenu sobre, on a tout perdu de notre Frédéric d'avant. On veut notre Parker Lewis !"



Aurélien Regard ne court pas après la presse. Coup de chance, celle-ci l'aime bien. Une stratégie qui paye pour lui mais qui est à déconseiller si vous ne gérez pas le tout au millimètre.

Un autre intérêt de la Gamescom est la relation directe qu'ont les développeurs entre eux. 

Une anecdote concernant The Next Penelope, le jeu d'Aurelien Regard. Ce jeu est en HTML5 et il va être commercialisé (si je ne dis pas de bêtises) sur Wii-U. Un responsable Xbox passe devant le stand et demande si le jeu va sortir sur Xbox. Aurélien explique que l'interpreteur HTML5 de la Xbox est trop ancien pour faire tourner son jeu. Le lendemain, le responsable repasse : le problème a été réglé.



La soirée s'est terminé sur la piste de danse grâce à un autre DJ. Mais bon, un développeur de jeu qui danse, c'est aussi gracieux que le commandant Shepard en boite de nuit. Nous sommes donc partis immédiatement car nous avions mieux à faire (dormir).


Le lendemain nous avons fait le tour des "grands" stands avec Michael.

Il s'agissait d'immenses temples aux couleurs des jeux vidéo, avec une animation DJ bien entendu.
5h de queue pour jouer au Lol de Blizzard, Heroes of the Storm
2h pour jouer à Far Cry 4 ou AC Unity
Pour Evolve, c'était même pas la peine.
Pour des parties de 15 minutes
Le hall le plus grand s'ouvrait comme une place gigantesque sur un double panneau FIFA.


D'immenses espaces séparant les étoiles

Ces files d'attentes odieuses étaient là pour créer le buzz bien entendu. Et pour ajouter du vice, les séances se faisaient soit dans l'ombre soit les écrans tournés dos au public, de façon à ce qu'il soit impossible de voir le jeu quand on attendait. Pour créer le besoin.

"Forcément, quand t'as payé 60 € pour entrer dans une convention et que t'as attendu 6h pour jouer 10 minutes, tu vas pas sortir en disant "le jeu est une merde", c'est ta démarche religieuse qui te convainc, pas le produit final."



Un hall avec deux pistes de Skate

Wargaming avait de sacrées bombes en uniforme, proposait des duels aériens fous en Oculus Rift, et avait carrément apporté un vrai tank, un truc mastoc en fonte, sur place. Un truc qui sentait encore l'humidité des tranchées, directement livré depuis une armée de l'est.


Quand les champs de bataille se rencontrent...

Mais tous les jeux n'étaient pas convoités : j'ai joué à un Dungeon Keeper like (enfin même plagié) et à un autre truc, crooks, un jeu d'infiltration dans le cadre de braquages qui doit être génial sur le papier mais dont l'interface complexe ne répondait pas aux besoins d'accessibilité immédiate de gamers surexcités par le dubstep.

Il y a eu un passage magique où on s'est arrêté devant un très beau trailer qui nous a fait envie : Wild.

"Je suis hypé à mort, tu vas voir que ça va être un F2P à la con et on va être hyper déçu."

Le mercredi soir, nous avons refait une soirée avec des développeurs, dans un restaurant mexicain où j'ai mangé des ribs si bons que j'avais du mal à me concentrer. Il n'y avait que des Européens alors j'ai proposé de créer l'Europa Resistance, une guilde de développeurs Européens.

- Quel intérêt ?
- Parce que c'est cool les sociétés secrètes !
- Moi je vis à Paris mais je viens d'Australie.
- Vous avez une scène JV en Australie ? Vous n'êtes pas trop occupé à vous battre contre des serpents venimeux ?

Il y avait Jesus de Pixel Piracy, deux danois de Kapknok qui ont fait Affordable Space Adventures, et William et "Chat", deux français visiteurs mais game dev, actuellement sur un tower defense multijoueur compétitif.


Jesus, Penny, Michael, William, Danois 2, Danois 1

Et leurs jeux préférés...

Danois 1 :

- Mmm c'est Journey.
- Journey ? Journey est bien - l'abolition de la barrière des langages - mais il est léger en terme de replayabilité, non ?
- C'est une vision inexacte de Journey. En fait, en tant que joueur, je suis un spécialiste du glitch. Et Journey est l'un des jeux les plus riches qui existent dans l'exploitation de glitches. Je joue donc sans cesse à Journey, et parfois, je rencontre des gens qui acceptent de me suivre dans mes explorations de glitch pendant 5 ou 6h. C'est l'occasion de créer des amitiés uniques.

Danois 2 :

- Crusader Kings 2. Il y a deux choses très particulières que j'aime dans CK2, c'est que on sait exactement qui on est. Dans Civilization, on est "une entité". Même si on gagne, c'est juste "une entité" qui gagne. Par ailleurs la mécanique de jeu a une courbe de complexité croissante, puis en dents de scie - cela permet une mise en scène de la tension qui est très appréciable, au contraire d'une partie de Civilization dans laquelle la complexité et les événements suivent une courbe exponentielle. Et sinon mon film préféré c'est Cool as Ice avec Vanilla Ice. 

Jesus :

- Half Life 2. Mec. Avant Half Life 2, j'étais blasé de tout. Je pensais qu'on ne pourrait rien faire de plus que ce qu'on avait fait avec les FPS. Et putain, Half Life 2. Tout est parfait.

Le Danois 1 a commandé la chose suivante :

Mademoiselle, je voudrais le burrito le plus épicé au monde. Pour moi, il n'y a pas de limite. Quand vous aurez mis tout le piment nécessaire et que vous vous direz "non, je dépasse les limites humaines", c'est à ce moment précis qu'il faudra en rajouter.

Nous avons parlé par la suite de génération procédurale d'univers, et j'avais en tête No Man Sky. Ma position, déjà expliquée sur les forum JV professionnels, c'est qu'il y a une sorte d'étrangeté froide là où les mathématiques ont créé plutôt que la main de l'homme. Il y a, comme dans Daggerfall, quelque chose de vain et de profondément inhumain à explorer un village généré automatiquement, alors que votre passage ne laissera aucune trace ni en vous, ni dans ce lieu.

Danois 1 avait un avis contraire, et je lui ai dit :

- Dans un univers généré par des chiffres et non la main de l'homme, il n'y a par essence aucune humanité. Or, c'est la trace de l'homme qui rend l'expérience de jeu émouvante ; dans le cas inverse c'est au mieux une expérience.
- J'ai un avis contraire. Dans un univers généré par des chiffres, la trace de l'homme existe par l'algorithmique de création. Mais au delà de la dialectique, un seul contre-exemple suffit : Minecraft. Ses cartes sont générées procéduralement et ça marche.
- Ne vois-tu pas quelque chose de profondément désespérant à explorer un univers que seul toi connaîtra, et ce, pendant quelques heures ?
- Non, je trouve que son caractère éphémère le rend très beau. C'est justement cela, la forme la plus pure de beauté - qu'après la partie, tout ce qui le rend unique disparaisse...comme des larmes dans la pluie.

Et la pluie est tombée fort ce soir-là. J'ai rejoint sur la terrasse William, l'australien parisien du tower defense compétitif, un type ultra brillant. Je pourrais écrire un livre passionnant sur toute sa conversation mais voici deux points en particulier sur lesquels nous avons parlé :

"Je suis programmeur Unity, mais je programme sous Love, ce qui est un peu fou. Aujourd'hui tout le monde va sur Unity mais c'est une erreur. Il faut au moins avoir un langage de secours. Déjà parce qu'aucun langage n'est sans défaut, mais surtout parce qu'un langage en particulier formate la façon de penser. Si demain tout le monde travaille sous Unity, tous les jeux seront plus ou moins pareils, déjà parce que le rendu visuel tendra à être pareil, ainsi que les temps de chargement et autres, mais aussi parce qu'à force, les codeurs penseront pareil. Ils rencontreront les mêmes obstacles et proposeront les mêmes solutions. En bossant sous Love/lua, j'applique une forme de résistance intellectuelle absolument stimulante."

"Il y a deux pôles essentiels de création dans un JV qui correspondent aux deux hémisphères du cerveau, une partie axée sur le langage, qui pourrait se rapporter à la conception, au game design, et une autre sur le visuel, qui pourrait se rapporter à la réalisation, aux graphismes, à l'ergonomie. Je vois le jeu vidéo comme un objet mathématique : on peut le décrire par la géomètrie qui serait donc cet aspect visuel, mais, de la même façon, par l'analyse, ce qui serait le game design. Une bonne équipe de création de jeu doit avoir ces deux éléments."

Le samedi, la Gamescom était sold-out, c'est à dire que les 350 000+ visiteurs seraient présents. Cela a été un jour infernal, j'étais tellement fatigué que je me suis endormi en mangeant des nouilles, et je me suis à moitié étouffé.


Dans le bus, la joie de voir un sac avec un badge Out There

A 22h la GC bruissait de la fameuse soirée Sony : tous les exposants étaient invités. On y est pas allé. En fait, boire des coups, faire la fête...c'est pas trop un truc pour nous.



Il y a eu ce moment où Jennifer, la créatrice de Tengami,
épuisée, s'est effondrée contre un mur. Dans cette position, elle est
exactement comme son héros dans le niveau en hiver au début du niveau.

Si je n'étais pas si fatigué, j'aurais préféré écrire que boire des bières estampillées Sony, mais j'avais juste besoin de silence et de sommeil.


La queue d'attente pour la fête Sony

J'ai pris un taxi à moitié dans le coma et je ne sais pas ce qui m'a pris, le type était turc et je lui ai parlé d'Ataturk et de la Turquie comme puissance militaire et en fait le mec était pour l'islamisation de la Turquie et tout ce que cela entraîne (le complot mondial de la presse et des banques...) et il a pas voulu me lâcher. Je suis tombé sur le lit et j'ai dormi dessus, sans la force de rentrer dedans.

J'ai oublié de vous parler de nos petits déjeuners. Le service de catering avait prévu des sandwichs salami/fromage au petit déjeuner. C'est hardcore, mais on s'y fait.

Le vendredi soir il s'est passé quelque chose de magique.

Deux gars et une fille s'approchent et me disent : ta combi elle est américaine, et vous êtes français. Ce à quoi je réponds que l'ESA ne commercialise pas de combi. Donc on discute ensemble et ces types parlent parfaitement le français (et le russe).
En fait, ce sont des ingénieurs spécialisé support pour astronautes de l'ESA ! Je leur ai dit que j'avais essayé d'envoyer des jeux gratuits à l'ESA mais sans succès. Du coup j'ai repris leurs cartes en disant : "même si vous êtes 18 000, il faut que vous ayez tous gratuitement un Out There à l'ESA !"
Je vais leur écrire demain, souhaitez moi bonne chance !


Dernier répit, allongé sur le canapé de nos voisins,
avant l'arrivée de la foule.

Pour le dernier jour on a fait les boutiques avec Valentin d'Indius et Michael (soit dit en passant, nous pratiquons une politique de l'anti-doritos, c'est à dire que c'est aux journalistes JV d'acheter notre t-shirt). On essayait aussi de ramener des goodies pour Geff, notre développeur qui était resté à Lyon.


Des carrelages de salle de bain aux icônes Portal,
oui, je sais que vous les voulez maintenant.

Valentin me montre une statue d'un dragon de Skyrim à 400 € et me dit que jamais il acheterait un truc pareil à ce prix. Puis il me montre une statue vraiment ultra dégueu d'un zombie-headcrab de Half Life à 300 € :

- "Ca par contre, j’achèterai bien.
- Et t'en fais quoi ?
- Je le mets dans ma chambre !
- Comme ça, si t'arrives à ramener une fille, tu peux être certain qu'elle repart aussitôt.
- C'est vrai. Mais IMAGINE qu'elle reste quand même. A ce moment tu es sûr que C'EST LA BONNE !"

Ce dimanche n'en finissait pas et les joueurs sont restés jouer jusqu'au bout. On a donné les casques et les souris et les claviers à des bénévoles qui avaient aidés l'IMB toute la semaine. On a fait une photo de groupe, on s'est tous fait des hugs - cette accolade sans bise un peu perturbante pour nous français.


Michael rencontre Alexander Bruce

Le soir j'ai retiré enfin ma combinaison orange et nous dinions avec nos voisins : Tengami.

L'équipe Tengami était composée de Jennifer la créatrice (Jeu préféré : Tenchu, mais killeuse à Dota) , sa soeur et son mec, étudiants dans le JV, Lady Shotgun herself, une personne assez influente sur la scène indé et game designeuse de quelques jeux (Alien Isolation, avant que le staff démissione).


Michael, Jennifer, Lady Shotgun, Yossi (de Alpha Muse)


On s'est retrouvé au pied du Döm, cette cathédrale à deux pointes que j'avais visité dans Darklands de Microprose, et j'ai mangé un Rheinquelque chose, c'était du boeuf mariné dans une sauce aux pommes, avec une pomme et de la gelée de groseilles, des pommes de terres et de la compote de pommes - bon faut aimer les pommes.


pom pom pom

Lady Shotgun est britannique mais vit avec son écrivain de mari dans une cabane dans les bois, en France. Son jeu préféré est...Final Fantasy 7.

"Oui, je sais ce que vous pensez. Mais il y a une chose avec Final Fantasy 7. Quand je l'ai terminé...j'ai eu le mal du pays. Il me manquait non pas par addiction ou par perfection, il me manquait sans raison discernable. N'est-ce pas une définition de l'amour ?"

La soeur et le mec de la soeur de la dev Tengami bossaient sur un MMO...sur les bronies. Ils n'ont pas la licence, mais il m'a dit qu'il faisait cela pour se faire la main.


C'était l'anniversaire de Brad de Cosmonautica, et Michael lui
fait une jolie dedicace.

Et dans la pièce voisine il y avait du bruit : en fait, des tas d'indés s'étaient réunis là pour fêter la fin de cette épreuve fatiguante mais gratifiante qu'était la Gamescom.

Alors on est passé de table en table et avec l'équipe organisatrice et avec les devs. Je me suis retrouvé face au créateur de Shovel Knight, à coté du CEO de Croteam. J'ai encore posé ma question du jeu préféré.


En chemise à carreau, Shovel Guy


Le gars de Shovel Knight a dit :

"Super Metroid. D'une façon générale, je ne peux pas supporter les jeux avec le moindre input lag. Pour moi c'est la marque d'une réelle erreur de conception. A ce titre, j'aurais aussi pu dire Bayonetta. ". 

Et Brad, le créateur de Cosmonautica, a dit :

"Excellente référence, et en plus non seulement Super Metroid est cool, mais en plus dire que son jeu préféré est Super Metroid te rend super cool."

Le gars de Croteam avait un peu la tête basse, et il dit :

"Pour moi, c'est Loom. Okay, on a vu Doom, on a fait Serious Sam. Mais Loom, c'est un conte de fées magique. C'est unique."

Il était vraiment ému. Et je me suis dit qu'il éprouvait la même chose que Lady Shotgun quand elle parlait de FF7, ou de Jesus quand il parlait de Half Life 2. Vient un moment dans nos vies où l'on reçoit la joie intense de vivre une expérience unique, et nous nous engageons dans ce métier non pas pour revivre la chose, non pas pour faire mieux, mais tout simplement, pour redonner au monde en retour la joie reçue.

Pour effacer l'émotion, le mec de Croteam lève son verre et dit :

"Okay, j'ai une déclaration à faire. Je dois avouer qu'on a fait Serious Sam parce qu'il y a eu Doom."

Alors Brad a dit :

"Et bien moi mon jeu préféré c'est Bulletstorm, moquez-vous de moi. Et sans Serious Sam, pas de BulletStorm, donc vive Serious Sam !"

Alors Shovel Knight a dit :

"Et bien j'étais GD sur Bloodrayne à la sortie de Bulletstorm, et ouais, on a repris l'idée de nommer les combos."

Donc il était là un peu parce que celui qui lui faisait face, le developpeur de Croatie, avait rendu au monde la joie que lui avait apporté Doom. C'est très lyrique mais oui, il arrive parfois que nous soyons des petits maillons dans la chaîne.

On s'est dit au revoir avec énormément d'étreintes et ces adieux furent des moments très émouvants, sublimés par la fatigue.

Le Bilan de la Gamescom

Plus prosaiquement, la GC nous aura coûté en gros 7000 €.
Nos ventes ont été temporairement multipliées par un facteur de 2 à 4 (pourvu que cela dure !)
Nous avons donné 1000 badges et 1000 flyers, presque 500 cartes de visites.
Nous avons collecté 500 cartes de visites.
Les ventes réalisées pendant la GC couvrent nos frais.
Les contacts sont très prometteurs et diversifiés, allant de publishers à artistes et game designers, journalistes, conférenciers, juristes, distributeurs...et ingénieurs de l'European Space Agency !

A noter que l'Indie Mega Booth est un facteur déterminant dans le caractère positif de l'expérience. Nous recommandons leur grand professionnalisme et nous considérons avoir beaucoup de chance d'avoir été sélectionnés.

Je travaille depuis 3 mois sur le prochain jeu de Mi-Clos Studio (qui n'a rien à voir avec l'espace) et j'espère pouvoir bientôt vous en parler.

La reprise de 404, avec du Leak, du Global Village, de la misogynie, du conservatisme et, comme d'habitude, beaucoup de mauvaise foi

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Pour une fois, tout est presque dans le titre.

A noter qu'on a fait cette émission pour vous les loulous, mais que cette année, bien des choses risquent de changer.




Bonne écoute !
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