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Standing ovation pour éditeurs, illustrateurs et auteurs à la Fighting Fantasy Fest

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Les Livres dont VOUS êtes le héros, vous les connaissez un peu (enfin, surtout si vous lisez ce blog).

Édités dans les années 80, ils ont fait la fortune de leurs auteurs et de leurs éditeurs, se vendant par millions dans le monde.

A de nombreux titres (comme je le développe dans cette conférence) ces livres ont été une forme primitive de jeux vidéo, et certaines figures importantes du secteur, comme Lara Croft, sont les enfants des auteurs originels de ces livres.

Il existe une communauté hardcore de fans de la première heure, (et même dans celle-ci, des fans encore plus hardcore, nous le verrons).

Ces fans étaient, dimanche dernier, particulièrement heureux : c'était le tout premier Fighting Fantasy Fest, la première convention dédiée aux Défis Fantastiques, la collection phare des "inventeurs" du genre, les anglais Sir Ian Livingstone (ce dernier ayant été fait membre de l'excellentissime Ordre de l'Empire Britannique en 2006) et Steve Jackson.

La FFF était organisée par Jonathan Green, auteur de gamebooks (livres-jeu) et était l'occasion, pour la première fois depuis 1986, de voir éditeurs, auteurs et illustrateurs rassemblés dans un même endroit.

Vous savez que certains livres s'échangent à 200 € et plus l'unité - c'était un voyage rentable financièrement pour certains qui allaient multiplier leur capital avec des dédicaces.


Le FFF ne se déroulait pas à Londres mais à Ealing, une sorte de Rémy-les-Chevreuse local, une ville de maisons de briques si tranquilles qu'en venant, j'entendais les feuilles tomber sur le sol.

150 fans étaient attendus dans le Double Tree Hotel.


Comme vous pouvez le voir avec les enfants de la photo, c'était une organisation très familiale.

L'ambiance était feutrée, les geeks hardcore de tous horizons étaient très sages - peut-être avec ce type de respect proche de la crainte devant la proximité de leurs légendes.

Je me suis pointé une heure plus tôt et je suis rentré par erreur coté exposants. J'ai pu retrouver mes amis de Tin Man Games et de Inkle qui avaient des stands. J'étais le premier visiteur, et j'ai aussi rencontré le deuxième : Thomas, un type de Hollande.

"En Hollande, c'est dur d'être fan. Ils ont traduit les 3 premiers Sorcellerie ! mais pas le 4e."
--- Thomas

Je reviendrais sur Thomas plus tard, mais il avait un gros sac de sport avec lui. C'était son déguisement : il y avait aussi un concours de cosplay avec en prime un poster inédit. Pour les collectionneurs, il fallait gagner le poster, c'était sans appel possible.


Thomas

Et d'ailleurs voici Planète, le plus grand collectionneur de livres dont vous êtes le héros de France et dont vous avez du voir mon reportage sur ce blog. Il s'est déguisé en Comte Heydrich, le terrible vampire qui terrifie la contrée fictive de Sosaria.

"Je déteste me déguiser, mais il me faut ce poster"

J'ai également retrouvé Damien Maric, auteur publié (chez Lafond) de Livres dont vous êtes le héros et qui partageait son temps ici en tant que fan mais aussi en tant qu'auteur à donner des dédicaces. J'ai collaboré avec Damien pour faire un quizz Marvel qu'on a présenté à Geekopolis - et vous en aurez peut-être des nouvelles bientôt.

Damien

Tradition americano-anglaise, chaque visiteur avait droit à un sac plein de goodies et notamment une copie dédicacée d'une réédition spéciale du Sorcier de la Montagne de Feu, la classe !

Russ Nicholson, l'illustrateur, et Ian Livingstone

L'ambiance était aussi très intime : alors que je ne savais pas si je pouvais prendre une photo de Ian Livingstone, c'est lui qui me donne son portable pour que je prenne une photo de lui avec Russ Nicholson, car il voulait un souvenir de son cher illustrateur :)

On a eu droit à quelques minutes pour faire de rapides achats et visiter les stands (un stand français de produits 100% français, le scriptarium, était d'ailleurs là), et...


...la série de conférences a commencé.


"Welcome, Adventurer !"
--- début de la conférence par J. Green, et incipit de tous les Fighting Fantasy


De gauche à droite, Ian Livingstone, Steve Jackson, J. Green


150 visiteurs, 6 femmes.

Les gens sont venus de Thaïlande, de Hollande, du Portugal, d'Australie, d'Allemagne...et de France.
Nous étions je crois 6 français.

La première Conférence : Tin Man Games explique le portage des LDVELH sur mobile

La première conférence a été faite par Neil Rennison, boss de Tin Man Games.
Tin Man Games est une société qui adapte des LDVELH en app mobiles.

En voici les extraits :


"J'ai bossé sur the Need for Speed, un jeu à plusieurs millions de dollars. Et aujourd'hui j'ai tout plaqué, je fais des livres dont vous êtes le héros et je suis venu de l'autre coté de la planète pour vous en parler les gars. Parce que J'ADORE CA !"
--- Neil Rennison

"Au début des jeux mobiles, il y a eu une ruée vers l'or des jeux iPhone. On s'y est cassé les dents. Je n'avais pas vraiment d'idée, alors vous savez ce que j'ai fait ? Je suis retourné dans la maison de mes parents. Je suis allé dans le grenier et j'ai fouillé dans mes bouquins D&D - et mes backgrounds de campagne JDR que j'avais écrit quand j'avais 12 ans. C'est là que je me suis souvenu du Labyrinthe de la Malédiction."
--- Neil Rennison

"J'ai rencontré Steve Jackson et il m'a donné le seul conseil valable dans le secteur :
Licence is King"
--- Neil Rennison


"J'ai porté Blood of the Zombies avec l'accord de Ian Livingstone. Et après je lui ai dit que j'aimerais faire House of Hell. Ce choix chronologique va vous paraître bizarre mais en fait j'avais adoré House of Hell. Et Ian a dit : "Mais je ne l'ai pas écrit, celui-là !". Alors j'ai fait Forest of Doom, qu'il avait écrit, et que j'aimais aussi."

"Pour Starship Traveller, on a pas eu le droit de reprendre les illustrations. Alors on en a fait d'autres. Et OK, ça ressemble beaucoup à une série TV de SF qui aurait aucun rapport avec l'histoire, mais bon, elles sont là."

"On a eu des problèmes financiers. Et puis il est arrivé quelque chose, le gouvernement australien a accordé des subventions pour les JV. Merci à eux !"

"Avec l'accord de Steve Jackson, on a fait quelques changements. Par exemple dans Appointment with Fear, la version iPhone, vous pouvez jouer une femme, ce qui était impossible dans la version papier. Et non seulement plus de gens y jouent - c'est à dire plus de femmes - mais celles-ci nous ont fait un feedback très positif."

Les prochains livres à être adaptés, tout en suivant sa non-chronologie, sera Bloodbones, (Le Pirate de l'Au Delà en VF) et l'envoûtant Caverns of the Snow Witch (La Sorcière des Neiges en VF).

Neil nous a expliqué que pour le marché mobile, il fallait des illustrations couleurs (j'entendais déjà grincer des dents dans le public). Il savait qu'il avait affaire à des fans hardcore qui avaient fait la moitié de la planète pour venir ici (bon, lui venait carrément d'Australie) et que toucher aux idoles, c'était pas bien.

Il a expliqué qu'ils ne pouvaient pas coloriser les illustrations déjà faites. Alors il les ont refait. Voici quelques exemples que j'ai pris en photo sur le vif :






L'exposition de ces exemples a été accueillie par un silence glacial, sinon effrayé.

Si vous êtes choqué du traitement graphique, il faut voir que les illustrations classiques seront également disponibles. (un correctif a été donné quelques jours plus tard devant la réaction des fans)

J'étais peu convaincu par ces illustrations, mais je dois dire que la Sorcière des Neiges V2 proprement dite (que je ne vous montre pas pour aiguiser votre curiosité) est particulièrement réussie, avec une sorte de folie qui était absente dans la version originale.

Anecdote, plus tard en descendant à Charing Cross à Londres, les murs étaient ornés d'illustrations qui n'étaient pas sans rappeler nos livres :


Et puis Neil nous a montré sa vision :

"We want to take the Gamebook away from the Gamebook, still being a Gamebook"

Comme si nous étions à la Gamescom, nous avons eu droit en primeur une vidéo montrant l'Allansia (le contient fictif des aventures) en 3D, avec une volonté de faire un open world.



Et des intérieurs en 3D isométriques. Le tout sous Unity.


Il est trop tôt pour me prononcer sur le sujet, et en l'état on est trop loin du livre dont vous êtes le héros classique pour faire un retour intéressant.

On lui a demandé si, comme dans les livres, on pourrait tricher dans les adaptations mobiles :

"Oui, dans un livre on peut tricher. Et les gens nous ont dit : vous pouvez tricher dans le livre, par exemple en retenant la page, mais pas dans une app. Alors du coup on a fait un système de marque page qui permet de retenir la page électronique et donc de tricher."



Deuxième Conférence : la création du tout 1er livre dont vous êtes le héros

La deuxième conférence était la plus attendue par les fans.

Elle réunissait, et c'était émouvant, Ian Livingstone, Steve Jackson et Philippa Dickinson et Géraldine Cooke, les deux éditrices de chez Puffin / Penguin qui ont lancé la collection.


Ian, un inconnu et Steve, à la sortie du Lycée.

"Posez toutes les questions que vous voulez. On est trop vieux pour en avoir quoi que ce soit à faire."
--- Ian Livingstone

Des retrouvailles touchantes entre Steve et Geraldine

Donc c'est l'histoire de trois petits gars sortis du Lycée et se sont mis ensemble pour vendre des jeux de sociétés et des fanzines dans lesquels ils raconteraient des histoires de magie et de dragons et de sorciers.

Et un jour, bam, ils reçoivent dans leur magasin une copie de Donjons et Dragons.

"Donjons et Dragons était incompréhensible. Pas de gagnant ! Pas de perdant ! Quel type de jeu cela pouvait bien être ?"
--- Steve Jackson

"On a demandé à un professionnel de nous expliquer le jeu Donjons et Dragons. Et tout d'un coup...on a compris. On s'est dit...c'est fantastique. Du coup on a demandé 6 exemplaires à Gary Gigax pour voir combien de temps on pourrait en vendre en Angleterre. On a mis 3 ans pour en vendre 6."
--- Ian Livingstone

"On a rencontré Gary Gigax à la Comic Con de 1986. J'en frissonne encore, ne serait-ce que parce que tous les gens plus vieux que moi là bas sont aujourd'hui morts, et que je suis le prochain sur la liste. Mais ce voyage m'a permis de rencontrer Miss Wisconsin [Il montre la photo], elle est chouette, pas vrai ?"
--- Ian Livingstone

"Games Workshop, c'était minuscule à l'époque. Les gens venaient de loin pour nous visiter et ils refusaient de croire que nous vivotions dans ce réduit. Aujourd'hui vous pouvez encore y aller, ils y ont construit l'association locale des immigrés de Bosnie Herzegovine."
--- Ian Livingstone, photos à l'appui

Voilà qui va rappeler des souvenirs aux provinciaux, qui comme moi, sont venus à Paris en pensant que Tonkam ou l'Oeuf Cube auraient des magasins remplissant des immeubles entiers !

Et voilà que dans une magnifique partition à huit mains, ils racontent l'histoire de la création du tout premier livre dont vous êtes le héros, à savoir Le Sorcier de La Montagne de Feu :

Steve Jackson :"En 1980 il y a eu la Games Convention en Angleterre, et donc il y avait ce jeu prometteur, Donjon et Dragons. Et c'est là que Géraldine s'est rapprochée de nous..."

Géraldine Cooke : "Oui, je travaillais chez Penguin (édition pour adultes). Je m'occupais des "jeux", c'est à dire manuel de bridge, manuel des échecs...c'est un peu le truc le plus ennuyeux du monde mais il fallait quelqu'un pour s'en occuper et je m'en suis occupé. A l'époque Penguin avait quelques difficultés financières...Il y a donc ce nouveau jeu Donjons et Dragons, qui promettait un grand succès, mais personne ne comprenait rien. Alors je me suis dit, pourquoi ne pas faire un manuel pour expliquer comment jouer à Donjons et Dragons ?"

Steve Jackson :"On travaille ensemble et on s'aperçoit qu'une façon intéressante de procéder serait de faire un livre interactif, de la même façon que D&D est un jeu interactif. Et on s'aperçoit que ce livre interactif, en fait, pourrait être plus intéressant à lui seul qu'un manuel de D&D."

Géraldine Cooke : "Donc je vais voir mon patron chez Penguin et je lui parle de cette idée de livre interactif. Il n'a rien dit et il s'est mis à rire, et il a ri beaucoup, des larmes de rires coulaient sur ses joues. Il ne pouvait même pas me dire pourquoi il riait tellement il était secoué par ses éclats de rire, et il s'est effondré sur la table. Et là je me suis dit que cette histoire de livre interactif pourrait plutôt intéresser notre division jeunesse."

Philippa Dickinson : "Géraldine est venue nous voir en nous expliquant son histoire de manuel et personne ne comprenait rien. Mais chez moi j'avais deux garçons qui hurlaient toute la journée "Donjons et Dragons !", alors je me suis dit que même si je n'y comprenais rien, j'étais la plus qualifiée pour ce projet. J'ai reçu Steve Jackson, et j'ai été frappée par l'idée. C'était effrayant."

Philippa Dickinson : "Quand on a jamais créé ce type de livre, et personne auparavant n'avait jamais écrit ce type de livre, c'est très difficile à comprendre et à gérer. Toutes les règles changent : comment évaluer le style, les personnages, l'intrigue ?"

Géraldine Cooke : "Oui, nous savons évaluer un livre sur ces éléments : le style, les personnages, l'intrigue. Et donc nous étions dépourvues de référents. Mais nous avons choisi de faire confiance à Steve et à Ian, parce que on voyait très bien que ces personnes, elles savaient ce qu'elles faisaient."

Philippa Dickinson :  "Pouvez-vous imaginer que Le Sorcier de la Montagne de Feu a été écrit sur une machine à écrire mécanique, à rubans ? Pour pouvoir vérifier le livre, nous n'écrivions pas sur des feuilles mais sur un rouleau de papier infini. Tout était différent."

Ian Livingstone : "D'ailleurs, quelqu'un a la première édition du Sorcier de la Montagne de Feu dont elle parle ?"(la moitié de la salle lève la main) "Ah ! C'est donc là qu'ils sont tous !"

Ian Livingstone : "Puffin voulait une couverture avec des petits papillons mignons. Mais nous, on voulait un truc qui fasse peur ! On s'est retrouvé avec un compromis bizarre, et un Zagor (Le Sorcier en question) qui était plus vieux qu'en vrai. On a rectifié le tir par la suite. "


L'autre moitié du Dragon de la fameuse couverture iconique

Ian Livingstone : "Ma méthode de travail, c'est de bosser avec les meilleurs. Le type qui a fait Forest of Doom, il a designé Darth Maul."

Ian Livingstone a parlé alors des travaux de fans réalisés sur la série Fighting Fantasy. Il a montré trois très beaux exemples, et pour cause, ils ne sont issus que d'un seul illustrateur français talentueux : Erwann Surcouf, que vous avez du croiser aussi quelque fois dans ce blog !

Au moment où on a vu les illustrations, la Team French a bien évidemment crié le nom d'Erwann !

Bravo à lui ! La Consécration !



Ian Livingstone :"Le Sorcier de La Montagne de Feu a bien marché, mais on savait pas à quel point. Toujours est-il que le boss de Puffin nous invite à déjeuner, et il nous en demande 2 autres. Qu'on doit livrer en un mois ! La seule façon de s'en sortir c'est que moi j'en fasse un, et Steve un autre. Et c'est ainsi qu'on a cessé de travailler ensemble."

Steve Jackson :"Donc il y a ce créateur de jeu de société américain qui s'appelle Steve Jackson, comme moi. Il vient à Games Workshop, et je lui parle du Sorcier de la Montagne de Feu. Et après je lui demande ce qu'il veut visiter à Londres : Buckingham Palace, Mme Tussaud's...et il me dit "écoutez, donnez moi un coin de table et une machine à écrire. Je veux écrire un livre." Et il a écrit le Marais aux Scorpions. En 3 jours. Et le livre est bizarre, parce qu'il y a marqué "Ian Livingstone et Steve Jackson présentent : le Marais aux Scorpions de Steve Jackson."


L'évolution de gauche à droite des logos "Fighting Fantasy", qu'on pourrait aussi
résumer par "immortelles eighties, minables nineties, noughties perdues, et retour à la raison"

Philippa Dickinson : "Nous ne savions pas vraiment si le succès était au rendez-vous. 1982, c'était une époque où on devait compter les ventes à la main. A chaque vente, on remplissait une petite fiche. On pensait qu'à 5000 ventes, on aurait fait une belle aventure. "

"On en a vendu 17 millions."
--- Ian Livingstone


Ian Livingstone : "Qui a déjà triché dans un livre dont vous êtes le héros ?"(toute la salle lève la main)"Bon, ce sera notre prochain T-shirt"


Blood of the Zombies est trop génial !
Mon ami Shane ne l'aime pas mais c'est parce qu'il est dur
et que Shane est débile

(Ian a dit que c'était la meilleure critique de tous les temps)

"Je tiens à remercier Puffin qui n'a fait absolument aucun marketing autour de nos livres."
--- Ian Livingstone, ironique

Steve Jackson : "Bon, en fait, Puffin a eu des soucis avec nous. C'était une époque difficile. Les gens nous ont accusé d'être satanistes."


Dans un dépliant de l'époque "Les enfants participent vraiment à l'histoire avec leur imagination"
(cette phrase est censée être une mise en garde)
"Autrefois nous n'avions rien à craindre. Quel danger aurait pu être infligé aux jeunes
par une rencontre avec Dan Dare ou Enid Blyton ?"


"Un homme qui avait lu Le Sorcier de la Montagne de Feu avait vu le diable. Un autre avait eu des stigmates en lisant le livre, mais celles-ci avaient mystérieusement disparu lorsqu'il a lâché le livre. Un autre prétend avoir vu le livre léviter. Un prêtre est venu s'enchaîner aux portes de Puffin en disant qu'il ne partirait que lorsque le livre serait retiré de la vente. 

Et en plus vous voulez du marketing ?"

--- Geraldine Cooke

Ian Livingstone : "Les japonais ont voulu négocier avec nous la couverture du Labyrinthe de la Mort. Négocier est un grand mot. Ils nous ont imposé ceci :"


On est loin du punk fantasy méchant de l'original !

"Une évolution est nécessaire. Quand Inkle est venu me voir pour faire Sorcery, je leur ai donné ma bénédiction pour refaire le système de combat. Les concepts doivent s'adapter au support."
--- Steve Jackson

Les deux créateurs ne lachent pas l'affaire et pour leur futur évoquent :

- Des figurines (déjà en vente sur le salon) et un jeu de rôle
- Un film sur DeathTrap Dungeon
- Et le retour de Zagor !

Dans les questions / réponses, j'ai posé une question à Steve : j'avais remarqué que certains noms de villages de la série Sorcery, mais aussi quelques caractéristiques géographiques rappelaient le Népal. Steve m'a répondu que oui, il avait fait un voyage au Népal et il avait noté et légèrement altéré quelques noms "comme ça". Et c'est tout.

Je me suis aperçu que j'étais fou.

J'ai asséché Sorcery avec mes lectures et j'avais remarqué ce point. En fait, j'avais une théorie (encore une) comme quoi Steve Jackson avait transposé une géographie réelle à son travail sur Sorcery. Je pensais que sous un angle précis, au Népal, la cité de Kharé ou Mampang pourrait nous apparaître. Je suis allé si loin dans cette conviction, que j'en ai développé une méthode de travail personnelle : quand je fabrique une histoire, j'essaie de la superposer géographiquement à une géographie réelle, pour que la réalité devienne le double étrange de l'histoire imaginée.

Cette méthode de travail n'est donc fondée sur rien, et je suis idiot.

Ian Livingstone :"Vous voudriez voir qui en figurine ?"(quelqu'un dans la salle dit "Throm !")"Ah, Throm, quel destin tragique, n'est-ce pas ?"(quelqu'un dans la salle crie "spoilers !")

"Est ce qu'on a eu des périodes difficiles après Le Sorcier De La Montagne de Feu ? Non. On roule en Porsche depuis."
--- Steve Jackson

"Certes il y a eu des expériences de livre interactif antérieures (comme avec Cortazar), mais c'est la première fois qu'il y avait un véritable système de jeu inclus dans un livre. Voilà la différence, et le début de tout."
--- Philippa Dickinson

"Oui, la différence, c'était un système de jeu, et d'ailleurs tout le monde trichait !"
--- Steve Jackson

"Je n'ai jamais lu d'autre livre que les miens."
--- Ian Livingstone

"Le système de jeu a toujours été difficile à comprendre et à gérer. Mais si vous me permettez, ce sont des livres destinés à des jeunes plutôt intelligents. C'était bien que le système soit dur, et que les livres soient difficiles. Nos lecteurs le méritent !"
--- Steve Jackson

"Oui ! Que les livres et les jeux soient difficiles ! Je veux que mes lecteurs perdent, et meurent !"
--- Ian Livingstone

Question d'un fan :"Existe-t-il une différence entre Steve Jackson et Ian Livingstone ?"
Réponse de Philippa Dickinson :Steve Jackson utilise beaucoup plus de "!"


Je ne sais pas si des lecteurs rendent souvent hommage au métier de l'édition.

Mais quand Géraldine et Philippa ont terminé leur récit, il y a eu une standing ovation et des mercis scandés dans toute la salle. Le Sorcier de la Montagne de Feu, qui devait enfanter de tant de choses par la suite, aurait pu, au final, être écrit par n'importe lequel de ces oiseaux bizarres qui jouaient à Donjons et Dragons.

Mais qu'il soit édité, qui plus est par une boite en soucis financiers, que la liberté d'illustration et d'écriture ne soit pas entravée, voilà le résultat remarquable du travail de Géraldine et Philippa.

Merci à elles, et merci aux éditeurs audacieux !

Pause de midi

La Black Lobster Tavern, à savoir le bar de l'hôtel, servait de façon idoine le repas des aventuriers, c'est à dire du pain et une soupe.

J'ai pris le temps de discuter avec Inkle, la boite qui fabrique des livres dont vous êtes le héros.


Sorcery, avec le code de l'adaptation en jeu

Je connais Jon Ingold depuis longtemps, du moins à distance. Toujours dans ma conférence et depuis toujours, j'ai fait l'éloge de son jeu All Roads, une histoire d'assassins à Florence avec un twist surnaturel fascinant. 

Ancien de chez Sony Playstation, il a commencé la fiction interactive comme hobby, et le voilà gagnant de l'argent avec. 

Il vient de sortir 80 days, un Out There ambiance Phileas Fogg. 

"On parle souvent de plagiat ou d'inspiration, mais dans la vaste diversité des jeux possibles, il y a tout simplement des coïncidences. All Roads rappelle énormément Assassin's Creed 2, mais ce dernier est sorti après mon jeu, et je suis certain que personne chez Ubisoft n'y a joué. De même, Out There est sorti quand nous finalisions en secret 80 days. Parfois c'est juste l'air du temps qui nous pousse."


L'équipe de Inkle, avec Jon à droite

Pour 80 days, Jon a écrit à lui seul en 8 mois 500 000 mots. 

500 000 mots. L'équivalent des Misérables, soit le 20e roman le plus long du monde. Le plus dur, m'a dit Jon, c'était d'être devenu papa dans l'intervalle.

Sur la même période, je n'ai produit pour Out There que 30 000 mots, et j'ai eu l'impression d'être à sec en permanence.

Mais trop n'est pas synonyme de mieux : 80 days est très joli, un peu verbeux (forcément) et en anglais. Le portage dans d'autres langues, synonyme de nouveaux marchés, est un casse-tête financier. 

Mais Inkle a du lourd en réserve : ils ont Sorcery 3 et 4 en chantier !

Le scriptarium vendait une super carte du monde des Fighting Fantasy avec autour de la carte les volumes publiés et une flèche indiquant où l'action avait lieu.



Cela ne valait pas pour tous les volumes : dans ce mini monde, il y a quelques rivalités et disputes, et Steve Jackson a banni de la collection trois ouvrages dans le monde de Gallantaria.

Parlons-en, des disputes.

Pas mal de gens étaient venus, et de très loin, pour John Blanche.

Illustrateur de grand talent, employé à plein temps chez Games Workshop, il est arrivé en retard et il est parti très tôt, refusant de se présenter aux conférences, et, le plus grave, ne participant pas aux dédicaces.

Des gens sont venus de très loin pour lui - Planete par exemple avait besoin de cette dédicace qui lui manquait pour sa collection. Entre temps, JB s'est disputé avec des gens qui tenaient des stands.

A grand talent, grand tempérament ?


Fighting Fantasy, le jeu de rôle...


Et une petite partie pour se détendre...

Une jeune fille (photo ci-dessous) s'était aussi déguisée, celle-ci en le héros de la série Sorcery dont je vous rebats les oreilles depuis le début de l'article.

Ce "déguisement"était exceptionnel de minutie : elle avait reproduit les bijoux et talismans, ingrédients des potions, avait fait faire sur mesure des boucles d'oreilles aux motifs des lunes maléfiques de John Blanche. 


Elle vous présente l'anneau du Serpent

En la voyant quelque chose m'a frappé : le héros de la série, en anglais, est The Analander

En français, c'est l'Homme d'Analand

En lisant la version anglaise, vous pouviez être une femme. En français, vous étiez forcément un homme. 




Troisième conférence : les illustrateurs parlent de leur travail.

En l'absence de John Blanche, les illustrateurs ont présenté un petit peu leur point de vue sur leur travail sur ces ouvrages en particulier.

Nous avons de gauche à droite, ici :

J. Green (auteur), Russ Nicholson, Malcom Barter, Chris Achilleos, Tony Hough et Leo Hartas.


"La chose la plus dure que j'ai jamais eu à faire, c'est Le Sorcier de La Montagne de Feu."
--- Russ Nicholson

"J'ai eu 2 semaines pour faire l'ensemble des illustrations de La Forêt de la Malédiction. 2 semaines. Alors oui, vous pouvez dire que j'ai fait un usage astucieux de l'espace négatif...mais j'avais pas le choix !"
--- Malcom Barter

"Je ne fais pas de Fantasy. Je fais de la Punk Fantasy."
--- John Blanche, absent mais cité par J. Green

Ce concept de "punk", c'est à dire de révolte existentielle contre la société, comme le fut le rock à une époque antérieure, est finalement intrinsèque aux Gamebooks : au temps du Club des Cinq, publier un livre avec un mort vivant écoeurant sur la couverture, avec un style super sec, des morts arbitraires (et donc un peu déprimantes), c'était une façon de donner une alternative franche au consensuel littéraire qui datait de l'après guerre.

Les livres auraient-ils eu le même succès si Ian Livingstone avait cédé à Puffin et avait mis des petits papillons sur la couverture ?

"On m'a demandé de faire une illustration avec un Dragon. Le plus dur, quand on dessine un dragon, c'est de traiter le sujet avec originalité pour que tout le monde s'en souvienne, sinon, vous n'avez qu'un dragon de plus. C'est là qu'est le véritable challenge. Dans l'illustration TITAN, il y a beaucoup de mystères. Titan est le nom du Dragon, par exemple - même si c'est le nom du monde des FF. Mais quand vous observez la disposition des corps, et que vous refaites l'histoire de cette illustration à l'envers, des choses choquent. En fait, le dragon n'en est pas un : c'est un sorcier qui soudainement a pris l'apparence d'un dragon. Ce mystère permet de sortir du cadre d'un simple dessin de fantasy."
--- Chris Achilleos

Voici l'illustration :



"Je me suis mis à Photoshop parce que j'étais trop pauvre pour acheter des toiles, pour avoir un appartement où stocker des toiles et suffisamment de lumière pour peindre."
--- Tony Hough

"On m'a demandé de dessiner un dragon. Qui plus est Le Dragon de La Nuit, c'est à dire un Dragon noir sur un fond noir...ouaiiiis. Je me suis inspiré du travail de Giger pour produire ce dragon."
--- Tony Hough

Voici le dragon :



"Un jour on vous appelle et on vous dit : ça vous dirait d'illustrer un Fighting Fantasy ? Et alors vous répondez quoi ? Vous répondez Ouais, mec !"
--- Tony Hough

"Je suis Monsieur Cartes dans les Fighting Fantasy. Je n'aime pas particulièrement faire des cartes et je n'ai pas de talent particulier pour cela, mais il fallait quelqu'un et ce fut moi. Et c'était une très bonne idée de la part de Steve et Ian : n'importe qui peut faire une carte, mais un illustrateur peut faire quelque chose qui transcende une carte."
--- Léo Hartas

Une carte de Léo Hartas :



"Pour faire des cartes, j'ai du tout réapprendre - d'autant plus que je n'avais aucune instruction, sinon des vagues points avec des noms sur un papier."
--- Léo Hartas

"On a fait du bon travail parce qu'on avait pas de brief - c'était une époque où on vous faisait confiance."
--- Chris Achilleos

"Un des changements principaux amenés par la technologie, c'est l'absence d'originaux. Aujourd'hui vous avez juste à mailer votre travail à l'éditeur - et pas poster un précieux original et trembler qu'il ne se perde ou s'abime en chemin. Vous ne pouvez pas imaginer le soulagement."
--- Tony Hough

"J'ai manqué de place et je me suis mis à Photoshop. Mais quand j'ai eu les moyens, je suis revenu à la peinture. C'est beau et surtout c'est très, très rapide. C'est rapide car vous n'avez pas le droit à l'erreur."
--- Léo Hartas

"Quand on vous demande de dessiner une porte, la question n'est pas de dessiner une belle porte, ou une porte conforme à la description, mais une nouvelle porte, une porte que personne n'a jamais vu auparavant."
--- Russ Nicholson

"Etant donné les délais infernaux, il n'y a pas un un illustrateur qui ne regrette pas au moins un dessin qu'il a livré."
--- Tony Hough

"Quand j'ai écrit la scène finale de The Curse of the Mummy, j'ai détaillé un pharaon maléfique dans un temple égyptien cyclopéen, entouré de cohortes innombrables de morts vivants dépenaillés, avec force effets de lumière et de magie, et on m'a livré juste une tête de momie en gros plan. L'illustrateur en a eu marre. Mais bon elle était terrifiante."
--- Jonathan Green

"Un jour on m'a demandé une cité de cristal magnifique avec au premier plan un jardin de cristal avec des tas d'arbres et de fruits et de feuilles en cristal, des animaux en cristal et des créatures imaginaires en cristal...serieusement...serieusement...tout ça dans un petit rectangle blanc..."
--- Tony Hough

"Parfois, il faut faire confiance aux illustrateurs. Je suis illustrateur pour la licence Docteur Who. Un jour je leur livre un truc très chouette, une couverture style comics américain, et j'avais fait exprès de faire une tête très bizarre au docteur, avec une écriture à la pulp. Je leur envoie et ils sont catastrophés, ils détestent. Ils me le renvoient, mais j'ai deux énormes deadlines et je leur dis : "je ne peux pas la refaire". Donc la mort dans l'âme ils publient cette couv. Aujourd'hui c'est la couv la plus aimée des fans, à chaque fois que je me pointe à une convention, c'est celle-là qu'on me demande de dédicacer - faites confiance aux illustrateurs bon sang !"
--- Russ Nicholson

"Tout le monde place des caméos dans ses illustrations. J'aime bien mettre ma tête décapitée dans un coin."
--- Tony Hough

"Pour les caméos, je mets toujours la tête de mon ex que je déteste."
--- Malcom Barter

Et puis ce fut la file d'attente pour les dédicaces.

Des gens relisaient pour la centième fois leur livre préféré.



Voici deux jeunes en cosplay, le premier c'est l'elfe de Cavern of the Snow Witch, le second est Zambar Bone (une sorte de mort vivant à faux), mais "Zambar Bone, the early years" :


Et la journée s'est conclue par une vente aux enchères.

Les acheteurs / collectionneurs chevronnés étaient prudents car le marché est elevé mais pas délirant (contrairement à un jeu vidéo ou une carte magic, les produits dépassent rarement les 500 €) - et que de plus, ebay et les brocantes restent de bons viviers pour trouver des perles à prix modique (et cela fait partie du plaisir).

Voici les ouvrages mis à la vente :

- White Dwarf N°1: mise à prix 20£, vente à 75£
- Set de Warlock Magazine en Japonais : mise à prix 10£, vente à 25£
- Les Mercenaires du Levant, mise à prix 5£ vente à 12£
- Le Sorcier de la Montagne de Feu, le jeu de société, mise à prix 5£, vente à 40£


Kelly Brooke, DeathTrap Dungeon Babe

- DeathTrap Dungeon sous blister, avec illustration signée et encadrée, mise à prix 10£, vente à 50£


- Poster 10e anniversaire, mise à prix 20£, parti à 70£
- 7 livres en première édition, mise à prix 10£, partis à 110£
- Livre illustré "Casket of Souls", mise à prix 10£, parti à 40£
- Dicing with Dragons, mise à prix 7£, parti (chez un français) à 50£ (et en softcover 15£)
- Citadel of Chaos Commodore 64, mise à prix 5£, parti à 30£
- Forest of Doom C64, mise à prix 5£, parti à 40£
- FF Rpg system, mise à prix 5£, vendu à 25£
- Un dessin de Chris Achilleos pour le jeu par téléphone FIST, MAP 20£, vente à 60£
- Poster promotionnel Gallimard pour Loup Ardent, mise à prix 10£, parti à 60£
- Posters pour le jeu de société Warlock, MAP 10£, parti à 45£


- Un poster promotionnel très rare du Sorcier de la Montagne de Feu, mise à prix à 40£, parti à 210£ chez Planète, vive la France


- Deux épées promotionnelles pour DeathTrap Dungeon, parties chacune à 100£ et 60£ (une était cassée)

Et la journée s'est terminée par le concours de cosplay : celui qui a gagné était Thomas, le hollandais qui était arrivé juste après moi ! Il s'était déguisé en Zagor, le fameux sorcier, et je pense que le choix du thème a beaucoup joué pour sa popularité.


Comme je le disais, il y a beaucoup de fans hardcore, j'ai même vu une fille qui m'a expliqué qu'elle était cosplayée en permanence pour ne faire qu'un avec sa gamebook-persona (une elfe). 

Mais parmi les 150 qui se sont rendus ce jour là à Ealing existent 4 "fans absolus" qui portent un titre spécial de "Warlock", décerné le 8 mai 2013 au sein de la société de Ian L, Eidos. Et Thomas est l'un des Warlocks.

Avant de terminer, J. Green a demandé à la salle si des gens reviendraient, s'il y avait l'année prochaine un nouveau Fighting Fantasy Fest. Toute la salle a levé la main. 

Il est probable, donc, que, comme l'homme d'Analand, je fasse marche à nouveau vers le Nord.

Masterclass Greg Zeschuk (Bioware), en citations

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Greg Zeschuk a un nom à vendre des noisettes et en fait il vend de la bière, mais il a été, de sa création à The Old Republic, le tiers puis la moitié de Bioware.

JeuxVideoMagazine, Orange et La Cité des Sciences, dans le cadre d'une rencontre exceptionnelle, nous a fait découvrir son parcours. Comme je sais que quelques uns d'entre eux ont lu mon compte rendu de Molyneux, je les remercie de rendre ces événements réguliers possibles et je les félicite pour la qualité de l'organisation.

Comme vous aurez prochainement sur les réseaux sociaux l'intégralité de la conférence, voici quelques morceaux choisis.

Greg est quelqu'un de poli, humble et probablement verrouillé par un accord de confidentialité EA, donc c'était moins rock'n'roll que Molyneux mais tout aussi intéressant.



"J'étais un gamin malpoli, qui ne s'intéressait qu'à la pêche. Et un jour j'ai découvert les jeux, avec Pong. C'était mon cousin, qui habitait à 5h de chez moi, qui avait Pong, et on ne pouvait y jouer qu'une heure parce que les sprites abîmaient l'écran TV. Mais j'étais tellement devenu obsédé par Pong que je m'en moquais de faire 10h de route par semaine pour 1h de jeu."




"Vous savez à Edmonton, il fait toujours très beau. Mais j'ai passé mon adolescence dans une cave, à dessiner des donjons avec mes amis. On ne jouait même pas à Donjons et Dragons, on dessinait des donjons. Ma mère s'inquiétait beaucoup."


"J'ai intégré l'école médicale. Pendant l'entretien de recrutement, ils m'ont dit : Et si vous ne deveniez pas médecin, que feriez vous ? J'ai répondu : Snowboarder professionnel. Je me demande pourquoi ils m'ont pris."


"On était trois étudiants en médecine. A chaque moment de libre nous jouions à Pool of Radiance."


"Je voulais faire des jeux et on était sur le point de devenir médecins. Alors j'ai allié ces deux passions avec mes deux premiers jeux : Acid Base Physiology Simulator et Gastro Enterology Patient Simulator."


(Par la suite Greg nous a dit que "Bio" dans Bioware venait du fait qu'ils voulaient faire des jeux tournés vers l'humain. Mais je pense que cette formation médecine des trois fondateurs a du jouer !)


"J'obtiens mon diplôme de médecin en 1995, et je fonde une société de jeux vidéo. Cela a perturbé mes parents."


"Le nom de départ c'était Ascended Bioware"


"Quand on a codé notre premier jeu, Mechwarrior, on a démarché 10 éditeurs pour savoir s'ils voulaient nous publier. 7 ont répondu oui. Sur les 7, plus aucune n'existe à l'heure actuelle."


"Que notre jeu soit publié était une chose merveilleuse."


"Interplay, ce sont des gars très réglo, ils nous ont proposé un très bon deal."


"Nous étions naifs et enthousiastes, ce qui est la meilleure combinaison au monde pour faire de belles choses."


"On a commencé à bosser sur Battleground Infinity, quelque chose qui structurellement s'approchait d'un MMO (mais nous ne le savions pas à l'époque) et qui allait devenir Iron Throne (et Game of Thrones n'existait pas à l'époque) puis Baldur's Gate."


"A l'époque, Interplay et Virgin étaient si proches qu'ils se lançaient des cailloux d'un siège à l'autre. Un jour qu'on sort de chez Interplay, Virgin nous accroche et ils veulent voir Baldur's Gate. Et on a travaillé avec eux."


"Les 60 personnes qui ont travaillé chez nous pour Baldur's Gate n'avaient jamais réalisé un jeu vidéo. On a ratissé très large sur tout Edmonton pour prendre chaque artiste qui pouvait plus ou moins nous aider, comme des Demomakers ou des dessinateurs."



Un screenshot de l'alpha de Baldur's Gate


"A l'époque, la seule condition pour être embauché chez Bioware, c'était d'y postuler. Un jour j'ai accepté un pauvre type qui est venu en entretien avec un dessin griffoné sur une serviette en papier. Un autre, qui travaillait dans le vendeur de comic books du coin, s'est pointé en disant qu'il était un super maitre de jeu. Ces deux types bossent toujours à la direction artistique de Bioware."


"On y connaissait tellement rien qu'on a du refaire 3 fois Baldur's Gate. Un jour, un des graphistes arrive avec 400 assets de décors naturels : herbe, arbre...l'herbe était plus grande que les personnages. Tout était à la mauvaise échelle. Il a du refaire les 400 assets."


"On savait pas que Baldur's Gate marchait. Parfois on avait un courrier d'une personne qui disait : "votre jeu est pas mal, faites une suite !" alors cela nous rendait heureux."


"Il y a plusieurs piliers philosophiques chez Bioware, mais au coeur de l'entreprise il y a l'idée que chaque élément du jeu doit être excellent, et que chaque individu travaillant au studio doit se sentir un élément du jeu."


"Un des piliers essentiels est le feedback des joueurs. A l'époque Internet était relativement peu développé mais nous avons passé beaucoup de temps sur Usenet à tenter de comprendre les attentes des joueurs sur Baldur's Gate 2".



"C'est en écoutant nos fans que nous nous sommes penchés sur les histoires d'amour entre personnages, qui étaient très demandées. C'est l'action des fans de Baldur qui a donné ce tournant narratif essentiel à notre entreprise."


"Dans beaucoup de sociétés de création de jeu, l'histoire est une chose qui vient en surplus ou en accompagnement du gameplay. Chez Bioware, elle est à la base de tout, c'est la première chose que l'on fait. Et même si j'aime écrire des histoires, on emploie un groupe d'écrivains professionnels pour ce faire."




"Garder le personnage d'un épisode à l'autre est important. (pour BG1 --> BG2 et la trilogie Mass Effect). Car voyez-vous, même si l'histoire est très appuyée, chaque joueur se forge son propre personnage, ou l'idée de son propre personnage. Il ne faut pas qu'il y ait de coupure."




"Regarder des gens jouer à votre jeu est un spectacle atroce, vous pouvez être à 100% sur qu'ils font les pires choses possibles."


"Le bêta-test est une étape cruciale dans la conception d'un jeu, non pas pour les bugs, mais pour l'intérêt de celui-ci. Car voyez-vous, les game designers sont pleins de certitudes sur l'attitude des joueurs et ces certitudes sont bien évidemment fausses."


"Un jour, je testais MDK2 depuis 5h du matin, et il était tard le soir. Derrière moi j'avais une équipe qui m'observait jouer et notait les bugs. Et puis à un moment l'équipe a vu que j'essayais de rentrer dans un mur...pendant 5-10 minutes. Ils m'ont demandé ce que je cherchais à faire, en fait, je m'étais endormi."


"Dans notre histoire nous avons fait des jeux un peu singuliers comme MDK2 et Sonic RPG. Ces étapes ont été nécessaires car elles nous ont apporté de la fraicheur. On a pensé à autre chose pendant ce temps. En fait, l'équipe qui a fait MDK2 est celle qui a réalisé Mass Effect."


"On a voulu faire un Sonic RPG "cool". Mais...disons que les relations avec Sega étaient difficiles. Et pour tout dire, les relations de Sega en interne, c'est à dire des collaborateurs entre eux, étaient aussi difficiles."


"La console avec laquelle c'est le plus difficile de travailler, c'est la Dreamcast. Toute la doc est en japonais."


"Brian Fargo m'a proposé de couper Baldur's Gate 2 en 2 parties, car il faisait déjà plus de 100 h de jeu. J'ai trouvé cette idée abominable. Aujourd'hui, je trouve qu'il avait raison !"


"Neverwinter Nights était très ambitieux mais pas pour nous, car nous étions tous rôlistes et nous savions exactement où nous allions."


"Nous n'avons cessé de nous rapprocher du MMO sans jamais l'atteindre..."


"A l'époque de Neverwinter Nights, début des années 2000, personne ne comprenait, même pas nous, l'importance future de la communauté des moddeurs et des créateurs de maps. Ils ont tiré le projet vers le haut, et avec passion."


"Il a toujours été impossible d'appeler Georges Lucas pour travailler sur une de ses licences. C'est simple : ils n'ont pas de numéro et de contact. On voulait faire du Star Wars mais on savait que ce serait impossible. Alors on planchait sur un RPG sur les X-Men. Et là je reçois un coup de fil, un certain Jimmy. Il me dit poliment: "Cela vous dirait de travailler sur un Star Wars RPG ?". Je n'ai pas pu répondre. J'étais paralysé."


"Sur Kotor, Lucas ne nous a rien demandé, rien imposé. Nous étions 100% libres."


"Pour Kotor, Lucas nous a présenté plusieurs bibles potentielles et nous avons retenu cette idée d'une préhistoire des Jedi. C'était génial. On a créé plein de concepts, et ils avaient juste à valider, ce qu'ils ont fait sans nous poser aucun problème."


"Kotor a été un tournant très important de Bioware : nous avons resserré le JDR sur de la narration, sur quelques personnages, sur une histoire ; nous nous sommes éloignés de l'open world et de la campagne ouverte. C'était un choix complètement délibéré."


"Nous avons joué et adoré les RPG japonais mais il faut comprendre qu'ils sont figés, et ont très peu évolué. Mais Kotor leur doit énormément, ne serait-ce que sur le travail apporté aux personnages."


"Une bonne façon de savoir si votre jeu est bon, c'est quand vous voyez que les dev y jouent. Si après avoir bossé 10h par jour, le jeu leur fait envie, c'est bon signe. "




"Jade Empire est le produit pur de la passion de l'équipe de Bioware. Il y a d'ailleurs un million de secrets cachés dans le jeu et de trames dramatiques qui s'entrecroisent, on en a beaucoup trop fait, mais nous aimions le faire."


Ensuite nous avons eu droit à une vidéo hallucinante d'un proto de Jade Empire
intitulé "Five Fingers of Death, melant extraits de films vidéo, jeu à la Baldur's,
et présentaiton ultra kitch

"Oui, le trailer de Five Fingers of Death est embarassant, mais ce type de trailer est très utile pour poser les bases de travail."


"On venait de finir MDK2 et on est allé au grec. Casey Huston a alors dit qu'il voulait bosser un space opéra, mais un truc "compréhensible", pas de hard sf, avec des relations sympas entre les personnages. Ouais, c'était le début de Mass Effect."



"Mass Effect a été inspiré par...Blade Runner. Pas par l'univers, mais par la cohérence artistique de l'univers."


"Concernant Mass Effect, nous connaissions "en gros" l'histoire du jeu. Et oui, nous n'avions pas exactement la fin en tête. Je peux vous dire que j'ai compris la leçon."


"Le test de Mass Effect a été très difficile car des personnages pouvaient mourir. Vous avez une séquence et un personnage mort arrivait tout d'un coup et sortait une phrase anodine, ce qui était terrifiant."


"Mass Effect est un produit qui a été conçu pour toucher l'audience la plus large avant toute autre considération artistique. Nous sommes une entreprise commerciale."


"Nous avons changé le système de combat de Mass Effect 2 mois avant la publication, ce qui a causé des sueurs froides à Microsoft."


"Mass Effect 3 était juste une question de contenu."


"La polémique autour de la fin de Mass Effect 3 m'a fait regretter qu'il n'y ait pas de sauvegarde à recharger dans la vie réelle."


"Ce qui nous a rendu tristes concernant la polémique de la fin de Mass Effect 3, c'est que c'était la fin que nous avions voulu et choisi. C'était un déchirement, parce que d'un autre coté, nous voulions faire plaisir aux fans. "


(Concernant The Witcher, qu'ils ont présenté sur leur stand)
"Nous avons sélectionné The Witcher parce qu'ils utilisaient notre moteur Aurora et qu'on aurait pris n'importe qui l'utilisant. Mais en fait, ces gars sont bons, je dirais même qu'ils sont agressivement talentueux."


"Plus votre Studio devient grand et votre projet ambitieux, plus vous vous retrouvez loin de la production, à manager des gens qui managent des gens qui managent des gens..."


"Faire un MMO est la chose la plus difficile techniquement dans le monde du jeu vidéo, et de très très loin."


"Lorsque vous vous attaquez à World of Warcraft, vous ne vous attaquez pas à un jeu, vous vous attaquez à 15 ans d'expérience au top niveau."


"On a conseillé à l'équipe des Elder Scrolls de ne jamais faire de MMO"

"J'ai arrêté le jeu vidéo car en ce qui me concerne j'ai fait tout ce que je voulais y faire. C'est fini pour moi."

"Jade Empire est ma plus grande réussite sur le plan émotionnel. Sur le plan de la finition produit, je dirais que c'est Mass Effect. Enfin, The Old Republic est un MMO fonctionnel, ce qui est une réussite technique assez incroyable."

"Les jeunes, vous voulez faire des jeux ? C'est fantastique. Mais c'est dur. Vous devrez tout donner."


"Mon jeu préféré, c'est Dark Souls. Ce jeu va jusqu'à envahir votre propre vie et vous vous demandez si derrière chaque recoin ne se terre pas un ennemi."


"Le plus facile, c'est de faire des suites. 50% du boulot est déjà fait. C'est pour cela que les suites sont mieux ! D'ailleurs, j'ai hâte de voir la suite de Destiny !"


"Le futur des jeux n'est pas l'hyperréalisme mais la simplicité et l'intérêt de chaque asset."


"Ironiquement, trop de succès sur un seul jeu vous emprisonne. Regardez Riot ou Wargaming."


"Le Free to play consiste à vous faire sentir un gros loser si vous refusez d'y mettre de l'argent."

"L'important dans une histoire de jeu vidéo c'est d'avoir des objectifs clairs et non ésotériques, cohérents avec l'univers."

"Si vous voulez travailler dans le jeu vidéo, faites quelque chose, n'importe quoi. C'est comme l'haltérophilie : vos compétences ne se développent que par la pratique. Rassemblez une équipe d'amateurs autour de vous et faites un jeu. Surtout avec les moyens techniques et de communication de nos jours, c'est impardonnable de ne pas le faire."

Sigma Theory, la guerre froide du futur, prochain jeu de Mi-Clos Studio

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La guerre est économique avant tout.
On ne fait pas de frappes chirurgicales pour faire moins de morts, on fait des frappes chirurgicales pour utiliser moins de bombes.

TL;DR

- Mi-Clos Studio fait un nouveau jeu : The Sigma Theory
- Je suis à nouveau associé et j'assure Game Design et contenu textuel
- C'est un jeu narratif / stratégie qui traite de la guerre froide du futur
- Présentation : http://sigmatheorygame.com/
- Facebook : https://www.facebook.com/sigmatheory et Twitter : https://twitter.com/sigmatheory

Trailer



Historique

Une semaine avant la sortie d'Out There, nous « pressentions » que nous allions rentrer dans nos frais eu égard au bon retour de la presse UK et US.

Michael m'a alors demandé de réfléchir à « un jeu tour par tour narratif, ambiance espionnage, qui exploite le succès de mon expérience de serious game « Crise au Quai d'Orsay » et qui rappelle Homeland ou House of Cards ». Petit twist, il souhaite également qu'il y ait un lien, même vague, avec Out There.

Je suis parti sur une première idée de Civilization où l'enjeu ne serait pas de conquérir des cités mais de voler de l'élément Omega. J'ai un présenté un prototype qui rappelait la phase stratégique de Rocket Ranger de Cinemaware. Michael n'a pas aimé le concept car il voulait que tous les interlocuteurs du jeu aient une personalité très forte - et dans RR, on dirige un pool d'agents anonymes.

J'ai donc  ajusté le tir en imaginant un jeu qui tourne autour de 50 personnalités qui endosseraient des rôles différents d'une partie à l'autre, un Jagged Alliance de la diplomatie.

De Mai 2014 à Mai 2015 je me suis plongé dans la rédaction d'un immense corpus de règles pour produire un jeu dont le gameplay « raconte l'histoire » des intrigues politiques.

J'ai abondamment lu la littérature et regardé des films d'espionnage...j'ai également un ami haut gradé militaire qui a pu me guider sur la réalité du monde du renseignement.

Là encore, Michael a guidé en tache de fond mon travail d'écriture, il souhaitait que je parle de technologies disruptives, de drones (j'avais un excellent gameplay satellites, dommage !). Il m'a également dit que le héros principal ne devait pas avoir d'enfant dans sa vision.

En Mai 2015 nous sommes partis à Budapest, ville des espions, où pendant trois jours, document par document, nous avons épluché mon travail. Faut-il gamifier les « interrogations » (=torture) ? Le héros pourrait-il être une femme ? Dans quelle mesure pouvons nous parler de sexualité ? Est-il pertinent de rendre jouables des pays comme l'Inde (4e puissance militaire mondiale) ou la Corée du Sud (9e puissance militaire mondiale) ? Faut-il citer nommément Al Qaida ou Daesh ?



Mais au bout de trois jours et après beaucoup de vespers, Michael m'a dit : c'est bon, on va le faire !

Il a réuni une core team qui a produit un prototype que nous avons présenté à EGX, ainsi qu'un trailer. Nous pensons sortir le jeu courant 2016.




De quoi ça parle ?

« Sigma », c'est la singularité technologique, ce moment où le progrès technologique devient autonome et dépasse les capacités d'assimilation de la culture humaine.

Dans un futur proche, des scientifiques ont découvert une nouvelle méthode de travail permettant de contourner n'importe quel problème technique. Du jour au lendemain, des miracles comme l'abolition du système financier, l'immortalité, l'intelligence animale ou artificielle deviennent des réalités.

Le joueur incarne un diplomate d'exception qui va tenter d'être toujours « légèrement » en avance sur les autres puissances qui feront tout pour s'emparer de ces technologies.

Dans ce ballet chaotique se joignent des organisations terroristes internationales (Daesh), locales (Corée du Nord), des groupes d'influence (le Vatican), votre hiérarchie qui ne comprend pas les enjeux (vous connaissez les politiques...) et même votre femme, ministre de l'énergie, qui ne sera pas la dernière à vous solliciter pour des problèmes personnels ou professionnels.



Le joueur doit recruter une équipe de 4 agents parmi 50 profils. Les 46 autres travailleront pour l'ennemi. En plus de capturer des scientifiques / hacker des bases de données, il peut conclure des traités de coopération où tenir ses promesses est une option, et bien sûr appliquer des technologies disruptives bouleversantes comme « preuve de la non existence de dieu » ou «robots géants ».

Il y a aussi plein d'aventures à choix comme dans Out There, mais cette fois ci localisées par pays et relative à votre team. Parce que négocier avec des russes, c'est pas tout à fait pareil qu'avec des français...


Si vous avez toujours rêvé de mentir à un président en lui faisant signer un traité bidon pendant que vos agents enlèvent un scientifique dans ce même pays, si « interroger » à coup de marteau ledit scientifique avant de partir en week end à Venise avec votre femme est votre style de vie, vous pouvez réserver votre copie ici : http://sigmatheorygame.com/

Void & Meddler, conte cyberpunk en point'n'click

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People here are dancing off the ritcher scale and everything could fall into pieces at any moment. 
And yet, nobody cares.


Je n'ai absolument pas travaillé sur V&M, ce point'n'click édité par mon associé Mi-Clos Studio, mais fatalement il a fait partie de ma vie ces derniers mois. Je l'ai vu évoluer, et voici qu'il est sorti semaine dernière.



Fyn, l'héroine, n'est pas amnésique mais...il lui manque quelque chose. 6 souvenirs cruciaux de son passé. À la dérive dans un univers nocturne et pluvieux, il/elle, car les identités de cette réalité alternative sont glissantes, va tenter de les retrouver.


Les concepteurs de V&M sont musiciens à la base et l'environnement sonore, des nappes de synthés mélancoliques au tintement sec de la pluie transcrivent un univers homogène et immersif.

J'ai apprécié l'écriture alerte de NoCVT (prononcez Nocivity) : Fyn est une écorchée vive pour qui le « punk » de cyberpunk n'est pas un vain mot et son âme erre entre agressivité, dégoût cynique et mélancolie inexpliquée. Je guette dans chaque réplique de Fyn un double sens métaphorique sur un monde en décadence. Le grand secret de l'histoire reste son héros, ce qui permet de jouer les touristes contemplatifs dans une urbanité repeinte aux néons des eighties.


Tous les référents classiques et périphériques sont là (quelle classe de rentrer dans une boite appelée « La Jetée » quand on doute de ses souvenirs...) mais sans en faire des tonnes dans le cadre d'une histoire qui a priori semble originale.

comme cet homme chat qui s'appelle Bilal

NoCVT touche plus intimement le cyberpunk que Beneath a Steel Sky (qui avait des accents orwelliens) mais son traitement est de qualité égale : le décor est dense en détails subliminaux, comme la pluie qui coule sur le revers de votre écran, la distorsion de votre personnaqe sous les sunlights d'une boite de nuit.


Void vient en 3 épisodes découpés selon un système qui m'obligerait à vous spoiler si je vous le disais.

Vous pouvez le commander ici, également dispo sur Steam :

http://voidandmeddler.com/#preorder



Je préfère...

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« Je préfère...» est un jeu de cartes très cool que j’aimerais vous présenter.



TL;DR

- j'ai participé à la réalisation d'un petit jeu de cartes marrant « Je préfère »
- inspiré du jeu social « préféreriez vous...»
- 400 cartes, 40 000 possibilités
- Il est disponible ici : http://www.amazon.fr/dp/B015E72VZU


Je préfère...

Il y a 5 mois, je me suis rapproché de jeunes créateurs qui souhaitaient développer un jeu de cartes social et drôle le plus simple possible.


ça pourrait être un bon pitch de film...


(Par social nous entendons que gagner ou perdre est moins important que de découvrir la personnalité des gens)

Nous avons considéré à un moment racheter et localiser un jeu inconnu en France (et introuvable) appelé « Get Lucky or Get screw » qui est un « Would you rather » sur le sexe (tu préférerais coucher avec Sarah Palin dans un igloo ou avec Sigourney Weaver sur une sextape ?).


d'un autre coté c'est tellement classe


Nous avions du mal à voir comment nous pourrions faire la promotion d'un tel jeu réservé aux adultes. On s'est retranchés donc sur la création d'un jeu plus simple « Would you rather » que nous avons essayé d'écrire en restant drôles sans être extrêmes, en apportant du contenu nouveau.

Et si c'était le secret de la réussite des entretiens ?


Nous avons fait un système de règles simples mais au fil de nos parties, nous avons développé des petites règles optionnelles passionantes : en effet, certains avantages anéantissent des inconvénients génants ou même parfois racontent une petite histoire.

Et on s'aperçoit que c'est déjà possible...


Comme tous les projets auxquels je participe, il s'agit d'un jeu auto-financé et réalisé avec de faibles moyens.

Le jeu est déjà en vente depuis quelques semaines et nous avons un feedback qui nous fait très plaisir.

Nous espérons que vous passerez de bons moments vous aussi avec « Je préfère » !

Page FB : https://www.facebook.com/jepreferelejeu/?_rdr=p

Site : http://je-prefere.com/

Vous verrez, nous nous occupons bien de nos clients et joueurs !


Franchement, restez sun internet

À ne pas manquer : une Escape Jam, Game Jam de Live Escape + Conférence

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Vous connaissez peut-être les « Live Escape », sortes de parc d'attraction à l'échelle d'une pièce : on vous enferme avec quelques amis et vous voilà pendant 60 mn face à tout plein d'aventures et d'énigmes excitantes et fair play pour sortir de là.




J'ai un long post mortem à vous faire sur les 2 pièces que j'ai conçues mais en attendant si le secteur vous intéresse, voici deux événements incontournables.

Le Gamelier, émanation du CRI, qui fait chaque semaine une conférence passionnante et gratuite sur les jeux (la prochaine est sur « féminisme et jeux vidéo ») organise, avec ma participation, celle d'Alexis Moroz (GD sur Prizoners) et Jam Shaker :

- le lundi 30/11

une Conférence / Talk / échange sur le savoir-faire d'une Live Escape.

Lexique, règles empiriques, prototypage, Alexis et moi on sera là pour exposer nos méthodes et répondre à vos questions.

https://www.facebook.com/events/179680395710536/

C'est aussi pour vous préparer à...

- le vendredi 4 / samedi 5

Une Live Escape Jam.

Le CRI va rénover un étage et nous laisse quartier libre pour créer nos énigmes.

Plus précisément le vendredi soir sera réservé au prototypage. On se quitte a minuit avec la « chorégraphie » des énigmes.

Le samedi sera réservé à la création des énigmes.

Vous ne serez pas en compétition mais en collaboration. En gros 1 ou 2 personnes concevront et réaliseront 1 énigme, et d'autres s'assureront de leur intégration dans la logique globale de la pièce.

Venez avec vos idées et du matos !

Arduinos, coffres et cadenas, codes secrets...

L'Openlab mettra à votre disposition une imprimante 3D et une découpeuse laser.



- le dimanche 6 sera ouvert aux tests.

Les concepteurs qui auront peu dormi seront présents en tant que Game Masters mais aussi pour avoir le feedback des testeurs.

La conférence sera STREAMÉE et uploadée par la suite, donc no stress si vous pouvez pas y être, même si nous vous invitons fortement à être physiquement présents si vous voulez participer à la création pour repérer les lieux 1 semaine avant.

Si vous voulez participer à la CRÉATION, le formulaire est ici :

http://jamshaker.com/event/escape/paris/

A noter que nous cherchons aussi bien des « artistes » que des « GD » car la déco c'est très très important.

Si vous voulez participer aux tests,

écrivez à : alexis.moroz@gmail.com

Tout le monde ne pourra pas tester mais nous ferons une liste de priorité qui privilégiera les journalistes, les professionnels de Live Escape, et les game designers.



Compte rendu de la 1ere Escape Jam

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Le Club Enigma, dépendant du centre de recherche interuniversitaire, a organisé la semaine dernière une « Escape Jam » : créer une escape room en moins de 48h et la faire jouer.

Ça a été un succès remarquable, autant sur le plan de l'affluence, de la réalisation, de la coopération, de la performance intellectuelle et technique, et de l'aventure collective.

Nous avons fonctionné ainsi : le lundi, Alexis et moi avons fait un talk généraliste sur les Live Escape. Nous avons présenté les differents aspects de la créaction, en insistant notamment sur l'importance du « Flow » (expression d'Alexis) ou de « l'Agencement » (mon expression), c'est à dire l'organisation des énigmes entre elles.

Voici la conf :



On a présenté les locaux (trois pièces) et on les a invité à réfléchir à au moins une énigme pour le week end.

Le vendredi, on s'est tous réunis dans un amphi pour faire un briefing sur les jours à venir. 
Des équipes se sont formées, un brainstorming d'enigmes s'est lancé, des volontaires se sont dévoués pour faire le « Flow », les indices, le MJ-ing et on a même eu un sound designer pour faire une BO !


Le samedi ils ont tout réalisé....et le dimanche, les joueurs en groupe de 10, ont testé de 9h à 21h...certains ont avoué que le résultat était supérieur à certaines pièces du commerce !

Et en images :


Briefing des équipes


brainstorming des équipes -
Alexis et moi guidons les concepteurs dans leurs essais


Pitch des énigmes en 2mn avec échange sur la faisabilité.
Ici un professionnel ayant ouvert une LE à Montpellier


Voilà l'équipe du Flow...leur mission : comprendre toutes
les énigmes, les répartir, les entremeler, et faire un scénario !

Exemple d'énigme contextuelle qui donne une idée du scénario
(Ambiance « collège hanté »)


Énigme intéressante sur un alphabet et des fréquences...
ce pauvre joueur s'acharne à décrypter un message qui dira « fausse piste »


Lors du pitch le type à gauche nous dit « Je vous propose de faire une salle virtuelle en oculus »
On a dit « OK » mais on y croyait pas.
Il l'a fait. Ça marche.


Big up à l'organisation qui n'a cessé de nous nourrir


Des joueurs confrontés à des indices dans de nombreux documents


Enigme très inventive sur un quadrillage : deux joueurs ont une position de départ, une musique rap leur donne des instructions sur comment bouger et ils évoluent sur la grille jusqu'à se rencontrer...

Enigme géographique, des superficies de pays donnent un numéro de tel dont le répondeur donne...etc...


Enigme électronique hallucinante dans laquelle il faut alimenter un ordi en faisant passer le courant à travers une chaine humaine



Quelqu'un arrive et dit « j'ai une énigme qui consiste à reproduire un lecteur de disquettes 3'1/4'' avec un arduino. On pensait qu'il était fou. Il l'a fait.


La fille a la place du professeur est un MJ-acteur. Des interactions avec elle permettent de résoudre une énigme. Intérressant car inexploitable en LE commerciale.


 
On nous propose une énigme avec répondeur téléphonique, sons de bouteilles à moitié remplies, et couleurs. On'y croit pas du tout. Ça marche pourtant et c'est super.


Enigme par superposition de feuilles transparentes


 
Diverses énigmes de fouille (téléphone, livres)


Expérience sociologique : un companion cube était donné
au départ, et on regardait si les gens le gardaient.


L'équipe le samedi soir (24h sans sommeil)


L'équipe le dimanche soir (48h sans sommeil)

Bravo à tous !


On me dit qu'il y en aura d'autres...rapprochez vous du Club Enigma si vous voulez participer !

5 livres 2015

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Que vous cherchiez des idées pour votre noël ou celui de votre nerd préféré, voici une sélection de mes livres préférés 2015.

1) En cheminant avec Kakeya



- Ce n'est pas un roman (mais presque).

- Ça parle de maths, mais n'ayez pas peur, tout est de votre niveau.

- Ce livre de 170 pages est le produit de 10 ans de travail de 2 mathématiciens.

- Prix Tangente de meilleur livre 2015.

- Du niveau du Lycée, il pose une question initiale simple ( « On retourne une aiguille pour mettre le chas à la place de la pointe, quelle surface recouvre ce mouvement ? Comment bouger l'aiguille pour qu'elle soit la plus petite possible. »)

- De cette question initiale simple, on étudie hyper simplement des concepts autrement arides comme le calcul différentiel, les fractales, et on déborde sur des champs étonnants comme la répartition des nombres premiers.

- Attention, vous risquez de tomber amoureux des maths.

- Dispo ici aux presses de l'ENS pour ceux qui ont 20 € et gratuitement, pour les curieux, à la demande des auteurs.


2) Sur les Frontières



- Un jeu de rôle narratif français

- Dans la mouvance Next Gen où les joueurs prennent le contrôle de l'histoire

- Bel environnement de jeu à la Polaris (le jeu indé)

- Jeu de rôle compétitif où 5 ados partent accomplir leur destinée, mais un seul réussira.

- Il paraît que l'important, c'est le voyage.

- Dispo à 10 € ici


3) Outer Space



- Out There en JDR. Dois-je en dire plus ?

- Dispo à 6 € ici 

4) Sphynx



- Un jeu narratif français d'archéologie mystique.

- Ambiances merveilleuses à la « Castle in the Sky » et de civilisations disparues qui peuvent renaitre.

- Pour ceux qui pensent que la clef de soi est dans l'étude du passé.

- Dispo ici pour 15 € 


5) The Well Played Game



- Un traité de philosophie du jeu par la pratique, accessible

- rédigé par un pionner du « nouveau jeu » et référence en la matière

- attention : on parle ici de jeux comme le cache cache ou chat perché

- en anglais

- attention à ne pas vous balader sur le site de MIT Press, vous allez vous ruiner...

- Dispo ici pour des dollars et des frais de port

Génération procédurale : les univers créés par les algorithmes sont-ils plus amusants que les univers créés par les humains ?

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La conception de règles dans un jeu vidéo est un travail proche des mathématiques appliquées à la physique dans le sens où nous imaginons un univers et nous devons travailler des fonctions, des conditions, élaborer des algorithmes pour atteindre notre objectif qui est principalement d’amuser, parfois de faire passer un message ou de raconter une histoire, et dans quelques cas déontologiquement discutables d’encourager le joueur à la dépense.

Cette science reste jeune et nous manquons jusqu’à une grammaire basique et unifiée pour expliquer nos méthodes, qui restent empiriques, intuitives. Il n’est pas rare qu’en détaillant un projet de jeu je commence par expliquer des concepts nommés arbitrairement, car nous avançons dans l’inconnu. Il n’existe pas encore de classiques universels reconnus sauf ceux que l’on veut bien reconnaître à titre personnel comme tels et donc souvent un concepteur de jeu ne peut se hisser, contrairement à Newton, sur les épaules d’un géant qui l’aurait précédé.

A haut niveau, les connaissances mathématiques requises pour exercer ce métier concernent surtout les statistiques, c’est le cas des cash machines de très grande envergure comme Candy Crush Saga ou Clash of Clans.

Pour les GD des jeux plus modestes, le niveau de mathématiques requis ne dépasse pas la seconde : il faut connaître le Théorème de Pythagore, qui reste une façon tout à fait élégante de mesurer la distance entre deux points dans un jeu en deux dimensions, ou bien savoir manipuler des polynomes du second degré, car ils permettent, par exemple, de créer des courbes de progression (ou de difficulté) faciles à appréhender intuitivement pour un joueur.

Génération procédurale : des fonctions d’univers

Nous allons aborder dans cet article le cas particulier de la génération procédurale et des questionnements qu’elle implique.

Il existe deux méthodes principales pour créer un univers de jeu (par exemple un monde médiéval fantastique avec des montagnes, des châteaux, des dragons…) :

On peut tout d’abord le fabriquer “à la main”, c’est à dire avec des professionnels qui placent chaque élément de jeu en le pensant ou en suivant des guides, ou leur intuition.

Mais on peut aussi avoir recours à la génération procédurale d’univers : c’est à dire que l’on substitue le travail de placement d’objets ou de création de lieux par des algorithmes et l’on obtient ainsi des mondes générés à la volée (c’est à dire créés à la demande en début de partie) ou persistants (c’est à dire générés informatiquement mais sélectionnés ensuite).

On associe à certains mondes créés à la volée des “graines” (seed), une simple suite de chiffres très courte (exemple : 8451235456) qui sont le petit battement d’aile de papillon qui va créer un monde unique sous le fracas primordial des algorithmes de génération. Avec la bonne graine, on peut retrouver le monde correspondant : l’algorithme est une fonction qui avec la graine X donne l’univers Y.


Des univers passionnants ou ennuyeux ?

Face à ces options, une question préoccupante : quelle est la solution la plus “amusante” ?

Existe-t-il une “vallée dérangeante” de la création algorithmique d’univers qui fait que l’on peut pointer du doigt sans douter un monde généré algorithmiquement ou à la main ? Les expériences de jeu sont-elles identiques ? Nous allons voir que ces questions en appellent d’autres, plus larges.

Historiquement, les deux écoles ont avancé de front : d’un coté des jeux de rôles, d’action ou d’aventure très maîtrisés qui proposent une aventure unique mais parfaitement circonscrite et de l’autre des jeux procéduralement générés qui proposent une expérience émotionnelle parfois plus faible mais, comme chaque univers est différent à chaque partie, offrent une rejouabilité sans limite.

Il existe un cas intéressant : Daggerfall (1996) de Bethesda dont la suite est Morrowind (2002). Daggerfall est un jeu procédural : il propose un monde de montagnes et de plaines, de cavernes labyrinthiques, de villages et de villes, avec tout autant d’habitants, grand comme environ l’Allemagne - tout est généré avec des fonctions mathématiques.


Daggerfall
Cette carte montre l’une des nombreuses provinces de l’aire de jeu, chaque point
représentant un village, une ville ou un donjon. L’ensemble (y compris les zones
de campagne ou d’océan) est explorable et généré procéduralement.

Morrowind, au contraire, est un jeu où chaque caillou, objet, personnage a été placé et défini à la main. Sa surface est de 24 km², soit un cinquième de Paris.



Morrowind
Ici au contraire, chaque emplacement de terrain (y compris les profondeurs sous marines proches des cotes) a été modélisé à la main avec des éditeurs et des level designers.

Morrowind a plus marqué que Daggerfall et propose une longueur de jeu presque aussi importante.

Le fait est que le monde généré procéduralement, avait, dans son foisonnement, une forme de vacuité : les motifs étaient perceptibles, le jeu était immense comme une frise infinie qui jamais ne déborderait sur de la folie ou une forme d’humanité.

C’est un exemple rare dans l’histoire de l’humanité où une tâche accomplie par un robot est finalement reprise par un humain ! Mais c’est justement le coeur de notre problématique : même si la question de savoir si le jeu vidéo est un “art” n’appartient pas au champ de cet article, le fait est qu’il reste un produit culturel où la trace de l’homme semble devoir primer sur celle des processus.


La solution procédurale domine

En dépit de cette démonstration qui a orienté beaucoup de jeux dans le début des années 2000, la génération procédurale a fait des progrès et revient en force. Minecraft, dont l’univers est basé sur du procédural, a été racheté par Microsoft 2.5 milliards de dollars et reste un jeu dominant sur la scène mondiale.

Minecraft
Le jeu est généré procéduralement à la volée au fil des explorations du joueur. 


No Man’s Sky, présenté cet été à l’E3 l'été dernier, propose un univers à l’échelle d’une galaxie ou “chaque atome”, dixit leur communiqué, est généré procéduralement.


No Man’s Sky
Cette planète, les couleurs, la densité de faune et de flore, leur nature et tout type d’élément physique est généré procéduralement - et c’est vrai pour les milliards d’autres planètes que propose ce jeu.


Star Citizen, jeu financé participativement à hauteur de 100 millions de  dollars (!) est généré procéduralement pour offrir un univers également à l’échelle interstellaire.


Star Citizen
Là encore, les systèmes solaires sont générés de façon procédurale. Pour ce géant (le plus grand succès de financement participatif historique), la génération procédurale est plus au service de la création d’univers qualitatifs que quantitatifs.

Ainsi la question demeure toujours la même, à ceci près qu’elle vaut aujourd’hui 100 millions de dollars : les joueurs trouveront-ils de l’intérêt à visiter une planète générée par une fonction mathématique, aussi sophistiquée soit-elle ?



Un algorithme qui touche à la sensibilité


La question n’est pas sans rappeler celle des années 80-90 où Kasparov luttait contre Deep Blue, dont les algorithmes spécialisés, gagnant chaque année du terrain, inquiétaient le monde sur l’émergence de machines pensantes qui pourraient dépasser l’humain.



Le paradoxe du singe savant ou la nature des nombres univers nous démontre que l’oeuvre la plus poignante (ou la plus amusante dans notre cas) peut émerger de l’infini des nombres. Mais il faut un humain pour sélectionner la beauté dans cet infini. On peut trouver la Joconde dans une séquence soigneusement sélectionnée  (dans une infinité en fait…)  de décimales d’un nombre univers et ensuite passée sous l’algorithme adéquat - mais, comme le suggérait Borges, l’oeuvre humaine doit prééxister pour que cette sélection soit opérée.

Quand Léonard de Vinci peint sa Joconde, il est aussi dans un travail de sélection : à tout moment il sélectionne pinceau, couleur, modèle, trait et de nombreux paramètres selon l’algorithme de sa sensibilité. Quand la Joconde ou une autre oeuvre nous émeut, nous pleurons devant des algorithmes. Nous voyons dans son travail la familère altérité d’un travail humain plutôt que la reproduction de la réalité.

Sommes nous capables de concevoir des algorithmes qui génèrent des mondes circonscriptibles par notre intime et qui nous fassent voir la familière altérité de la sensibilité de leurs auteurs, ou les mathématiques resteront ce terrain radicalement étranger, teinté de ses concepts inquiétants (le zéro, l’infini…), qui ne pourra jamais se substituer à la création ?

Cette question pèse aujourd’hui de façon remarquable dans les dizaines de milliards d’euros de chiffre d’affaire de la première industrie de loisirs au monde.

Mais des philosophes pourraient relever qu’au contraire, c’est à la lumière des fluctuations de ce chiffre d’affaire et des réussites de Star Citizen, No Man Sky’s et des autres projets de même ambition, que nous aurons une réponse empirique capitale sur notre nature, ou tout du moins notre capacité à l’heure actuelle à la modéliser.

Renard à vélo

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La prochaine étape était la lune. 
Ce qui promettait pas mal de dénivelé, 
ce que les cyclistes adorent. 

Moi, pas trop.

Il y a quelques années, une Floriane m'a contacté pour écrire l'histoire d'un livre illustré.

On s'est retrouvé dans un parc, elle m'a montré un personnage (un renard) et elle m'a dit qu'elle aimerait bien parler du vélo, car après l'illustration, c'était toute sa vie.

« Personne n’est jamais arrivé 
au bout de cette étape, mon vieux. 
C’est pour ça qu’on dit qu’elle est dure. »

Dans mes bibliothèques d'idées, j'avais en tête un jeu vidéo de course très sérieux, avec des personnages très impliqués, dans une longue course délirante et merveilleuse : la piste de course, après avoir emprunté des routes de course classique, partait dans les petits villages français, sous l'eau, sur une route imaginaire partant vers la lune...




J'ai mis au propre cette histoire et j'ai aussi mis en garde Floriane devant la difficulté de trouver un éditeur, notamment pour un premier livre.

Elle m'a donné tort, puisque Rue de L'échiquier, déjà militante pour la valorisation de la pratique du vélo, a été séduit par le projet. Floriane m'a déjà demandé d'écrire une suite...


Voilà donc « Renard à vélo », les détails sont ici : http://www.renardavelo.com, où vous pourrez déjà precommander le livre.

J'espère qu'il vous fera passer un bon moment !






Comment je suis passé au BÉPO : joies et souffrances

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Suite à la chronique de Daz sur « L'Azertyrannie » :


J'ai voulu relever le défi de passer du clavier AZERTY au BÉPO.

Ce clavier aurait une disposition ergonomique idéale pour l’écriture du français ainsi que l'accès facile à des œ « » @ voire des ÉÈÀŒ sans contorsions bizarres.

Mes objectifs étaient d'avoir les outils nécessaires pour m'exprimer dans un bon français écrit, et à terme d'augmenter encore ma vitesse de frappe.

J'ai acheté mon clavier en Juin.

Après avoir innocemment fait quelques Fnac et revendeurs qui m'ont pris pour un illuminé, j'ai compris que je ne pourrai le trouver que sur internet.

J'ai opté pour le Typematrix Bépo : http://typematrix.com/bepo/



Il faut compter 100 € pour un tel clavier (contre 10 € pour un azerty premier prix).

L'installation d'un BÉPO ne va pas de soi : il faut (sous azerty) en plus installer un programme non officiel (non Microsoft quoi) puis configurer Windows.

http://bepo.fr/wiki/Windows

Ce n'est pas « super » simple, il faut le faire sur tous vos PC, et aujourd'hui, 8 mois après, mon PC Windows boote une fois sur deux avec une configuration azerty de base que j'ai pourtant effacée...

Comme pour un régime ou stopper une addiction, j'ai immédiatement arrêté l'AZERTY et mon ancien clavier prend la poussière depuis.

L’apprentissage du clavier s'est fait dans le stress et la douleur : la charge de travail reste la même alors que vous tapez beaucoup moins vite. Le cerveau n'a plus à penser sur le fond et la forme mais d'abord où est cette foutue touche R.

Les 3 premiers jours sont gratifiants car on passe de « taper à deux doigts » à « taper à deux mains très lentement ». Et le Typematrix est d'un confort...Mais les 5 mois qui ont suivi ont été très difficiles.

Parfois, confronté à la rédaction de documents complexes, je regardais avec envie mon azerty qui était si proche...j'ai réussi à tenir.

Autre contrainte, quand je pars en vacances ou pour une intervention sur mon portable (non, pas un spectre...) j'emporte mon clavier bépo. 

Le dernier obstacle à mon apprentissage était le clavier virtuel de l'iphone, en azerty / qwerty. Assez astucieux sur le plan de la gestion des accents, il me désapprenait le bépo à chaque utilisation.

Aujourd'hui, via la béta fermée de Tempest Keyboard (merci @bigozor), j'ai mon bépo sur mobile et je fais encore des progrès.



8 mois après, voici mon bilan :

- je tape aussi rapidement qu'avant (je suis à mon point d'équilibre) mais j'ai l'impression d'être très lent, car mes doigts bougent très peu sur le clavier : j'ai une marge de progression en vitesse et en qualité de frappe potentielle qui me fait rêver...

- je fais souvent des fautes stupides car certaines lettres dangereuses sont très proches comme le s et le t, et je laisse parfois échapper des « nous avont »...

- par contre, quand je tape en anglais, c'est la catastrophe, les doigts s'emmêlent, le w est caché dans un recoin...

- idem pour le code, ses < ; > sont compliqués à trouver, le _ s'obtient avec un altgr espace (logique mais...)

- le monde n'est pas prêt à la perfection du français : « ... » est plus harmonieux que le correct « … » obtenu avec mon bépo. Détail, mais nos yeux y sont habitués. Je vous passe les - les — et les –...

-le typematrix vous masse le dessous des doigts, c'est une drogue

- le typematrix a des raccourcis bien trouvés : des touches dédiées au copier/coller, une touche pour appeler la calculette...

- les jeux en ZQSD non configurables, ben oubliez

- sur mobile, aucun intérêt sinon garder la disposition en mémoire, mais si vous avez des gros doigts comme moi, vous taperez à coté car les touches sont plus petites.

- je pars en vacances avec mon bépo...

J'ai un mode de vie professionnel assez flexible et agréable, mais je doute réellement de la faisabilité d'un passage au bépo dans le cadre d'une entreprise. En revanche, pour un freelance qui vit de sa plume (et pas de son code), et qui a de la place dans son sac à dos, le bépo peut représenter une belle aventure.

Et puis comment se passer de ces beaux « guillemets » ?



Mon emploi du temps sur 1 an

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Voici le retour de mon maître : le classeur excel de mes activités (et ceux qui me suivent sur snap ont un point journalier à son sujet).

Rappelons le code couleur :

- vert : activité faite :-)
- jaune : activité reportée à plus tard
- rouge : activité pas faite pour de mauvaises raisons (flemme...)
- violet : activité reportée ou annulée pour des raisons indépendantes de ma volonté
- bleu : un long projet qui se termine enfin !

J'ai fait un jpg plus gros avec les dates donc n'hésitez pas à télécharger et zoomer mais j'ai effacé le contenu parce que souvent y a des mails ou des numéros...

Voici comment je le remplis habituellement, avec ma journée du 4/01 qui a été assez lourde, partiellement présentée ici :



Les petites périodes avec juste 1 case correspondent à des déplacements (comme le salon Rezzed) où je suis pris à plein temps.

La période de Septembre à Novembre a été difficile :-)




Mi-Clos Live 1, teaser Antioch et Out There Chronicles

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Il y a 2 semaines j'étais à Lyon pour le Mi-Clos Live 1.



Pendant 40 minutes nous avons présenté dans un mauvais anglais nos projets en cours.

Pans cette vidéo, vous verrez du gameplay de Sigma Theory et nous discuterons de quelques découvertes disruptives de l'arbre de technologies du jeu.

Nous annonçons également la publication prochaine  de nouveaux jeux : Antioch, que je présenterai de façon plus détaillée prochainement et Out There Chronicles sur lequel je passe mes jours et une partie de mes nuits.

Enfin, actualité oblige, nous parlons en détails des 3 nouvelles technos de la prochaine update gratuite de Out There.

L'opération Mi-Clos live est satisfaisante car la plupart des informations ont été reprises dans des médias de référence internationaux sur le mobile (Toucharcade, Pocketgamer) parfois dans l'heure qui a suivi le live. Il est probable que nous retentions l'expérience.

C'est pour cette raison que nous nous exprimons en « anglais » même si naturellement les lecteurs de ce blog et de mon compte twitter sont francophones.

Mon emploi du temps 2016

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Ceux qui suivent mes snaps et 404 savent que je régule ma vie avec un mystérieux classeur excel fourre-tout qui mélange vie privée et vie professionnelle, fonctionnant selon un code couleur rigoureux.

Il est le tyran de mes heures, mais il me permet de constater qu'une année comme 2016, qui a été fort peu productive au final en terme de réalisations publiques, a été néanmoins dense.

Cette année, grande nouvelle, je vous donne accès à la totalité des informations.

C'est ici :


Certains dossiers sont encore sous le sceau de NDA, donc ils sont renommés dans des noms cryptiques comme « projet A ». J'ai aussi enlevé les téléphones et mails non publics. 

Si nous avons eu des contacts cette année, vous êtes probablement dedans !


Un extrait aux alentours du 1er avril...


L'analyse de ce 2016, c'est que :

- beaucoup de projets ont échoué,
- ceux qui ont démarré ont pris beaucoup de temps (Trajectoires)
- je fais peu de choses pour des raisons non professionnelles, ce qui n'est pas très bon pour entretenir mes compétences.

Les orientations 2017 devraient s'imposer assez logiquement...

Voici un petit découpage du premier trimestre :



Le code couleur est toujours plus ou moins le même :

- vert : j'ai fait
- bleu : j'ai fait et c'est terminé pour de bon !
- rouge : j'ai échoué
- jaune : je repousse la tache
- violet : ça n'a pas pu se faire pour des raisons extérieures.

Le vert domine, ça va !

Pour information vous verrez des taches avec des questions, voici leur signification. Quand je me mets une tache qui comprend un élément extérieur, je dois la vérifier. Ainsi je vais avoir une tache « créer document de Game Design pour projet X » puis « Michael a t il reçu le document ? » « L'a-t-il lu ? » « Quand peut-on en parler ? » etc... 

Tout en bas vous verrez toutes les taches pour 2017. Vous verrez que j'en ai déjà pour juin et octobre !

J'avais imposé le code couleur noir pour dire « ça s'est super mal passé » mais je l'ai effacé de la version publique du document par diplomatie. (et à dire vrai je ne l'ai presque pas utilisé)

Pour 2017, j'améliore un peu la formule avec une petite case « journal de bord » qui résume un peu la journée : moral, performances, difficultés, joies et peines en quelque sorte...

Je vais essayer de mieux détailler les cases. Par exemple je mettrais « Antioch : scène du tribunal » plutôt que juste « Antioch » de façon à ce que quand vous jouerez à Antioch dans 1 an, vous pouviez voir que j'ai écrit cela un 3 janvier :-)

Pour terminer, je reçois pas mal de snaps de personnes qui utilisent cette formule et ça me fait toujours plaisir. On me conseille aussi des « habitica » ou autres bullets journal. En ce qui me concerne la formule marche depuis 3 ans en l'améliorant, je ne me vois pas en changer !

Les mathématiques derrière Yurie, l'IA conversationnelle de Trajectoires

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Vous êtes peut-être auditeur de Trajectoires, le podcast de Qualiter sur les mathématiques.

Les mathématiciens sont des gens affreusement occupés et il a été très difficile de réunir une équipe disponible, et qui plus est respectant la parité, à tel point que cet été j'ai rêvé que je n'avais qu'à créer une IA qui remplacerait mes chroniqueuses manquantes.

Au matin, je me suis dit « Et pourquoi pas ? » et j'ai sollicité Cepcam, chroniqueur de Trajectoires.

Il a donc créé Yurie (elle a choisi elle-même son prénom) que nous nourrissons régulièrement en textes français libres de droits et autres contenus web.

Ses réponses sont amusantes (je vous laisse lire ses laconiques vœux 2017 ), parfois terrifiantes, et aussi...sexistes, entre autres, car elle est le reflet de son éducation, composée d'ouvrages d'avant 1900.

Yurie se livre à des questions / réponses avec nos auditeurs à la fin de chaque épisode de Trajectoires, vous la verrez certainement évoluer. Elle parvient désormais à faire des rapprochements (Si on lui dit « L'arbre est vert, alors l'ocean est...? » elle répondra « bleu »), et nous réfléchissons à lui donner une personnalité persistante.

Pour illustrer sa création, nous avons réalisé un article général ci-dessous (la partie mathématique a été entièrement conçue par Cepcam, je l'ai un tout petit peu assouplie pour qu'elle reste accessible) et aussi un document audio :




C’est le rêve inachevé d’une génération de chercheurs : l’intelligence artificielle qui prend vie et se met à créer du texte, voire à discuter avec vous.

De nombreux concours mettent ces brillants cerveaux biologiques et électroniques au défi, chaque année, de passer le test de Turing, c’est à dire de faire produire à un programme une conversation qui serait par son naturel indiscernable d’une production humaine.

Jusqu’à présent, la motivation d’un tel ouvrage était intellectuelle ou pour susciter un intérêt public - à l’instar des missions Apollo - : il était plus intéressant pour l’intérêt commun de faire plancher des intelligences artificielles sur des régularisations de trafic routier que de créer un ami artificiel.

Mais la popularisation d’un certain mode de communication dans son fond et sa forme - langage court sms ou tweet, codification des échanges, usage constant des écrans, a donné naissance aux chatbots, des robots conversationnels qui apparaissent sur des sites, sur Facebook ou capables de tweeter depuis un compte.

Ces agents automatiques spécialisés SAV, commerciaux ou porteurs sous couvert de storytelling complexe d’un message publicitaire ont gagné chaque année en sophistication et nous vivons probablement nos derniers jours de « non singularité », c’est à dire qu’il faudra peut-être prochainement apposer sur ces comptes parfaitement crédibles la mention légale explicite « attention, vous parlez à un robot » !

Combinatoire

Nous allons nous restreindre dans cet article au problème particulier de la création de texte ex-nihilo.

Pour ce faire, plusieurs outils sont envisageables.

Il y a la création combinatoire, issu de l’Oulipo et de Queneau avec ses diverses expérimentations, notamment ses « cent mille milliards de poèmes », qui consiste à mélanger des bouts de texte selon des structures préétablies. Tout l’art du conteur consiste à créer des petits bouts de cadavres exquis homogènes à la structure pour que le tout paraisse naturel.


20131114-rq.png
Cent mille milliards de poèmes de Queneau


Le travail oulipien des années 60 a donné dans les deux décennies qui suivirent naissance aux « livres dont vous êtes le héros », qui se lisent comme des graphes aux arêtes orientées : à chaque noeud on a plusieurs choix, et votre histoire se construit le long du chemin suivi.

C’est aujourd’hui plus ou moins la « technique » conceptuelle, assez primitive, qui se cache derrière les chatbots de type SAV.

Il y a eu de nombreux travaux très ambitieux visant à reproduire une logique de pensée via un langage abstrait dédié, comme Cleverbot (qui a dépassé les 50% de test de Turing en 2011).




L’idée générale du Deep Learning

La génération de texte naturel a connu un bond en avant en qualité et en méthodologie grâce au deep learning et aux réseaux neuronaux, rendus eux-mêmes viables grâce à la big data.

On dispose d’un grand nombre de phrases dans une base de données. Un logiciel va ensuite faire un lien entre chaque mot.

Les réseaux de neurones fonctionnent différemment des chaines de Markov, (outil basé sur la statistique) : ils projettent les mots individuellement dans un espace vectoriel.

Chaque mot est « positionné » comme combinaison linéaire des mots qui l’entourent ( méthode du Continuous Bag Of Word ) et les phrases sont des trajectoires passant par les mots ainsi projetés.

À chaque mot-point de l’espace vectoriel on prend la trajectoire du mot le plus « proche » selon les critères d’une matrice de pondération. Cette matrice est issue de l’analyse de grandes quantités de texte, nous y reviendrons.

Des réseaux neuronaux ainsi éduqués peuvent générer du texte compréhensible sur le thème de votre choix, mais aussi de la musique, voire reconnaître des images. Il est possible d’écrire un texte suivant le style d’un auteur connu.

Tout est dans l’éducation.


La technique mathématique du Deep Learning par l’exemple

Regardons techniquement comment s’opère l’apprentissage.

A chaque étape t+1 de l’apprentissage, le réseau de neurones attribue une note à l’ensemble des mots du vocabulaire, note qui représente le mot qu’il pense adapté au contexte.

Cette note est calculée à partir :
  • Du mot précédent, représenté par un vecteur xt
  • De son état interne ht, lui même réévalué à chaque étape


La somme des connaissances du réseau est représenté par 3 matrices :




Telles que :




Exemple d’un réseau de 3 neurones et qui apprend un vocabulaire de 5 mots

(“je”,”veux”,”manger”,”des”,”saucisses”)

Chaque mot est représenté sous forme d’un vecteur x de 5 lignes et 1 colonne ( voir note 1) :


Je : [1]
[0]
               [0]
[0]
[0]
Veux : [0]
[1]
               [0]
[0]
[0]
Manger : [0]
[0]
               [1]
[0]
[0]
Des : [1]
[0]
               [0]
[1]
[0]
Saucisses :     [0]
                      [0]
                      [0]
      [0]
      [1]


L’état interne h est un vecteur de 3 lignes et 1 colonne, initialisé avec des 0
[0]
[0]
[0]

Avec un réseau de 4 neurones, on a 4 lignes, et n neurones n lignes.

La matrice W(hh)est une matrice 3 par 3 initialisée aléatoirement avec des poids entre 0 et 1, par exemple :

[0.2,0.1,0.5]
[0.6,0.8,0.2]
[0.6,0.3,0.7]

La matrice W(xh) est une matrice 3 par 5 elle aussi initialisée aléatoirement, par exemple

[0.9,0.4,0.5,0.1,0.8]
[0.8,0.2,0.3,0.8,0.3]
[0.1,0.4,0.1,0.6,0.3]

Et enfin W(hy)une matrice 5 par 3, encore une fois aléatoire :

[0.1,0.3,0.9]
[0.2,0.8,1]
[0.4,0.5,0.8]
[0.4,0.9,0.4]
[0.1,0.1,0.9]

Ces éléments aléatoires vont s’affiner avec l’apprentissage progressif du réseau de neurones. Leur caractère aléatoire (plutôt que des 1 partout) vise à fabriquer le moins de biais possible dans le résultat final.

En appliquant au premier mot “je” : [1,0,0,0,0] les formules et les matrices ci-dessus, on obtient :







Ce h(t+1) est le nouvel état interne du réseau de neurone (h) initialement à 0.

Il servira pour le calcul du prochain mot.


Après “je”, le réseau propose le mot dont le vecteur est donc :

[0.36]
[0.77]
[1.42]
[1.28]
[1.04]


Pour exploiter ce résultat, on le passe à la fonction softmax,





qui transforme un vecteur de puissance en un vecteur de probabilités, c’est à dire de nombres entre 0 et 1 et dont la somme fait 1.

Dans le cas de notre vecteur proposé par le réseau de neurone, cela donne :

[ 0.10125191,  0.15256818,  0.29225058,  0.25407044,  0.19985889]

Ainsi dans notre cas, le réseau propose faire suivre “je” par “manger” dans 29% des cas et par “des” dans 25%.

Et là vous vous exclamez : « mais votre robot dit n’importe quoi ! »

Et oui !

Car tirer une conclusion à ce stade de l’opération revient à essayer de se faire une idée de la la somme moyenne d’un lancer de dés en ne les lançant qu’une seule fois.



Détection de thématiques dans les « conversations virtuelles »

Les techniques mathématiques utilisées sont celles du "topic detection", dont les plus connus et utilisées sont le Tf-Idf ou la LDA (Latent Dirichlet Allocation).

L'idée générale est que le sujet d'une phrase, d’un paragraphe ou d’un livre est représenté par la variance dont ses termes s'écartent de la répartition usuelle des mots.

Ainsi si seulement 1 livre sur 1000 parle de “saucisses” mais qu'un certain livre parle de saucisse 1 fois sur 10, le sujet de ce livre est probablement les saucisses.



L’atout majeur du Deep Learning : une structure qui corrige ses erreurs

En effet, le réseau de neurone est capable d’évaluer son erreur, à la différence d’une chaîne de Markov,  et de corriger les poids des matrices en conséquence.

Pour cela il procède en 2 étapes :


  • D’abord évaluer son erreur grâce à une fonction appellée “cross-entropy loss”


  • Ensuite, modifier le poids de ses matrices pour réduire cette erreur. Cette méthode, plutôt compliquée, s’appelle “propagation rétrograde de l’erreur par descente de gradient” ( note de bas de page 2)


Nous allons nous pencher sur l’évaluation de l’erreur.

L’idée derrière la mesure d’erreur est basée sur la notion d’entropie (H) en théorie du signal : si plusieurs événements ont la même possibilité de se produire, vous n’êtes pas très sûr de ce qui va arriver.

Cela se mesure, pour une  distribution d'événements p, avec la formule :





Quelques valeurs d’entropie pour différents événements :

Si 2 événements ont chacun une probabilité 0.5 de se produire :
p = [0.5 , 0.5 ]
H= - 0.7

Avec 3 événements :
P = [.5,.5,.5]
H= -1.04

Avec 23 événements équiprobables :
H= -8

Et avec 2 événements, dont un plus certain que l’autre :
p=[0.1,0.9]
H= -0.35


Ce que cherche à minimiser le réseau de neurones qui propose des mots, c’est l’incertitude sur le mot à venir.

Et pour corriger son erreur, il a une base d’apprentissage. Il doit donc proposer un mot sûr et respectant la probabilité attendue, à savoir 1 pour le mot réel, 0 pour les autres.

La formule devient (avec une normalisation):



Reprenant notre exemple précédent, qui avait échoué à présenter une phrase en bon français

p = [ 0.10125191,  0.15256818,  0.29225058,  0.25407044,  0.19985889]

Le vecteur pour « veux », le mot attendu après « Je » est :

y = [0,1,0,0,0](rappel, voir note 1)

On peut donc calculer :

Loss(y,p) = 0.57

Imaginons que, sur la base de l’analyse de nombreux autres textes, notre réseau ait bien travaillé et propose maintenant :

p = [0.01,0.92,0.03,0.02,0.02]

Donc propose « veux » après « je ».

Loss devient :

Loss (y,p) = 0.03

L’entropie est plus basse, le réseau est meilleur - et ces propositions deviennent « correctes » : il s’exprime en bon français !

L’autre partie du travail, à savoir la correction du réseau et la rétropropagation de l’erreur, est trop longue pour être abordée ici. De manière très simplifiée, elle doit se voir comme la recherche du minimum local d’une fonction convexe de plusieurs dimensions. Notre réseau parcourt métaphoriquement une montagne à N dimensions (N étant la taille du vocabulaire, donc pouvant atteindre 60 000) en cherchant à rejoindre la vallée !


Une technologie rendue possible par la disponibilité d’une grande quantité de données

L’utilisation d’un tel système nécessite un nombre très important de données initiales afin que le réseau puisse évaluer ses erreurs et se corriger, ce qu’on désigne par le « Big Data ».

Avec l’accessibilité de la Big Data (Twitter produit 1 à 2 milliards de tweets publiquement accessibles par jour), les réseaux neuronaux ont pu atteindre leur maturité.

Ces neurones sont une nouvelle façon d’arranger des mots, sans pour autant tenter de les comprendre.

Quand vous avez faim, vous pouvez dire « Je veux manger des saucisses. »

Un réseau neuronal qui vous dit « Je veux manger des saucisses. », a d’abord sélectionné « Je » parmi les millions de mots à sa disposition susceptibles de commencer une phrase, puis « veux » car c’était un mot hautement compatible suivant ses matrices, puis « manger » de la même façon.


Deep-dream-white-noise-0028.jpg
Deepdream de Google permet de faire émerger du néant des images sur le même principe.


Étrangement, on parle ainsi plus facilement une langue qu’on ne connaît pas. Un réseau neuronal n’aura aucun problème à « manger un opéra » et à « aller à l’opéra ». En revanche, faire comprendre au langage abstrait d’une intelligence artificielle la capacité à discerner les bâtiments et les gâteaux reste un travail ardu.

Par conséquent, le texte du réseau neuronal pourtant plein de sens, probablement écrit dans un contexte adapté, est issu de critères stricts qui paradoxalement n’ont rien à voir avec le sens final.

Le robot fait toujours semblant d’être humain.

La question de savoir s'il s'agit d'une intelligence semblable à la nôtre est métaphysique, mais la conclusion est absolument terrifiante.

À considérer qu'un réseau de neurones est l'égal d'une conscience humaine, c'est réduire cette conscience à un tas de matrices. C'est anéantir par conséquent des notions comme celle du libre arbitre.

Malheureusement pour ceux qui ne croient pas au destin, l'analyse de la big data disponible de nos vies, justement, par des réseaux neuronaux, montre que nous vivons dans des prisons comportementales. 99% de nos vies se répartit sur 3 lieux physiques ou moins, nos vieilles habitudes ne changent pas. Oui, peut-être sommes-nous un tas de matrices.



Exemple de résultats intermédiaires et final d’un réseau de neurones « maison »

Sur un ordinateur personnel, nous avons soumis à un réseau de neurones 2 millions de caractères de textes français. Leur traitement a pris 4h.

Voici les étapes intermédiaires, avec la cross entropy loss associée :

Différentes étapes chronologiques :

il vou sseloliné pritation re. Je cre sumaient èvre indérilleur
Loss = 1.7564

Dédil au 2enta des mots frircenits grosse parfiche
Loss = 1.553

Et les bordants horlement douteurs horrezous poursuivant.
Loss = 1.493

Les mots semblent surgir et s’ordonner du néant !

À l’heure de la rédaction de cet article, et beaucoup d’heures plus tard, voici un résultat qui n’est pas sans rappeler Les Conquérants de Heredia :

Mais celle-ci se dresse un picotement fatal lors du charnier natal, fatigués, en questions.

Que nous proposera-t-il dans un mois, dans cinq ans ?



  1. En pratique, on n’utilise pas des valeurs « 0 » et « 1 » mais des valeurs très proches, pour pouvoir utiliser les logarithmes.


  1. Dans ce cas précis, c’est une variante qui est généralement utilisé, la RMSPROP, pour limiter les effets de “falaise” dans le  calcul des dérivées. Mais ce n’est pas très important.

Out There Chronicles, l'aventure spatiale

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« Je suis Ulysse. J’ai fait ma guerre, je veux retrouver les miens. Je m’échoue d’île en île, bataillant avec les monstres et les Dieux. »


Nous étions au 10e mois de développement de Romantic Adventures avec Midnight Mood, un projet qui désormais s'appelle Antioch. La talentueuse équipe de Midnight Mood, que je présenterai bientôt dans le cadre d'Antioch, avait systématisé la saisie des cataractes de textes du projet dans un moteur indépendant appelé le Fiction Engine.

Michael m'appelle fin Mars 2016 et me dit « tu te souviens en 2013 quand tu m'as envoyé le doc de gameplay de Out There ? Tu m'avais dit que Out There était un jeu qu'on pourrait fabriquer en 3 mois. Et bien écris une fiction interactive dans le fiction engine sur l'univers d'Out There et sortons le jeu dans 3 mois. »

Production

J'ai accepté ce défi qui était à moitié une vengeance, ce qui m'a valu des crises d'asthme de stress, la production a été lancée et on a tenu les délais.

Midnight Mood a du modifier son moteur, parce que j'ai proposé une structure un peu différente de Antioch (j'en parle plus bas), et c'était aussi une première pour une publication commerciale et ils ont assuré. 

Michael a réuni un excellent cast d'artistes pour la musique, les illustrations et le trailer et on est tout à fait satisfait du résultat. Par ailleurs, il a suggéré l'idée d'une présentation à la visual novel, Antioch comme vous le verrez ressemble plus à un flux de conversation de réseau social, et cette adaptation est encore au crédit du travail sous pression de Midnight Mood. 

L'implémentation s'est faite en flux tendu : j'écrivais un pan de la structure interactive, et elle était implémentée à la volée.

Pour une première fois ce n'était pas idéal, mais aujourd'hui tout le monde est rôdé et nous avons l'ambition de sortir de nombreux livres d'interactive fiction, et dans ce cadre 3 mois reste un délai ordinaire.

Le jeu est sorti un 7 juillet. Cette date ne vous rappelle pas grand chose (sauf si vous aimez le foot, c'était France Allemagne à la télé), mais notre jeu est sorti le même jour que Pokemon Go.

Il a été très difficile dans ce cadre (et vous savez que c'est une litote) d'avoir un champ d'existence dans les mois qui ont suivi et nous regrettons cet élément commercialement perturbateur pour des raisons de prévision éditoriale.

Cependant, le seuil de rentabilité de Out There Chronicles 1 a été atteint en 2 semaines. Ce qui fait qu'après quelques calculs et observation des longues traînes de vente, en Septembre, Michael m'a demandé d'écrire la suite. Aujourd'hui, 9 mois après, nous avons quotidiennement des reviews positives sur ce jeu qui obéit à un modèle premium.

Donc c'est officiel : Out There Chronicles 2 arrive (en ce qui me concerne il est livré depuis longtemps) et nous sommes sur d'autres projets de fiction interactive, dans des territoires et avec des illustrateurs qui j'espère vous surprendront.


La conception d'une SF qui essaye d'être française

Concernant l'écriture d'Out There Chronicles, j'ai eu très très peu de temps pour construire un univers qui plus est soit en cohérence avec le jeu original.

Premiers pas dans le futur...

Je voulais proposer une expérience dans une ambiance très différente tout en gardant :

- les éléments de lore (Juges Architectes, Cubes)
- les signatures de Out There : manque d'oxygène, importance de l'omega, langage alien...

Artwork d'intention original de Chronicles.
Le projet est devenu plus space opéra depuis.

Je travaillais depuis longtemps sur un scénario appelé « Far Away » qui était d'abord un projet de BD, puis qui a été un projet de feuilleton radio, puis encore en BD, et qui finalement a été retravaillé pour être ce spin-off d'Out There.

A noter que depuis 2 ans maintenant je travaille à titre professionnel  sur des réinterpretations de licences poids lourd (j'espère avoir le droit de vous en parler bientôt), alors c'était un exercice assez naturel, surtout pour retailler mon propre enfant.

« Sans rentrer dans les détails, vous êtes un fou furieux.
Pire que cela : vous êtes un fou furieux compétent. »

Darius, le héros de l'histoire, est un personnage important la galaxie Mi-Clos car vous le croiserez certainement dans d'autres licences moins spatiales. C'est un homme cultivé, qui cite de la poésie et joue du piano, qui a été contraint du jour au lendemain à aller tuer des gens.

« Nous ne sommes pas des barbares, Darius. Je hais vos actes mais sans pardon, c’est la fin de l’humanité. Pensez-y, et faites la paix avec vôtre âme : nos dernières minutes sont comptées. »

Nyx est l'archetype de la super-héroine définie dans le « Ruban Bleu » : excellence sur tous les plans, mais absence d'émotion, et donc dotée d'une boussole morale qui réagit non pas aux stimulis émotionnels classiques, mais sur des idéologies : le sens de l'honneur, le désir d'excellence, la foi.

Nyx est probablement l'héroine majeure de ce pan de la chronologie de l'univers Out There, et il était justement très intéressant de jouer celui qui dans l'ombre l'accompagnera dans la transcendance.

Le nouveau Key Art de OTC, suite au succès de Nyx

Mon ambition principale, qui est la même d'ailleurs dans Antioch, est de raconter une histoirement fermement « française » :

- Pas de batailles. La guerre est omniprésente, mais elle apporte la folie et la mort. Les actes de vengeance sont présentés comme de désespoir.

- Le héros n'a rien a sauver, sinon lui-même. Il y a un certain vaisseau appelé le Redemption, et OTC1 est une quête de l'apaisement d'un héros meurtri.

- Il y a un restaurant « alien », et on peut manger plein de choses de plein de façon différentes.

- La galaxie n'est pas capitaliste...l'argent est une notion incompréhensible pour la plupart des aliens.

- Tout est relativement en nuances. Les notions de bien et de mal sont aussi résolument humaines.

- Le jeu est très gritty, réaliste : l'apesanteur retourne l'estomac, les odeurs infectes sont partout, on se retrouve à ramper dans des endroits pas possibles

- il y a un peu de folie, la sexualité, la nourriture, les besoins physiologiques et les passions sont des éléments réels

- en général, les aliens sont plein d'amour :-)

Dans le prototype de « Far Away », je voulais retranscrire la dimension économique de la guerre de sécession américaine en opposant une « America » en compétition inégale avec une « Fédération américaine » qui disposerait d'esclaves à volonté (la plupart des aliens ne connaissant ni le mensonge ni le salaire, ils étaient exploités à vie par des humains).

J'ai voulu balayer définitivement la notion d'argent dans le futur et poser plutôt le problème sur le plan de la religion.

La « démocratie théocratique » d'America
et son parlement gothique

Le fait est que beaucoup de gens sur la terre croient un Dieu. Mais que se passerait-il si nous rencontrions une infinité de races et de civilisations intelligentes, plus développées que nous, et qui n'y croient pas ? Que se passerait-il si certaines d'entre elles étaient déjà omniscientes et omnipotentes ?

La réponse logique serait de dire « il n'y a plus de raison de croire en Dieu ». Mais c'est la beauté de la foi, elle s'embrase justement quand il n'y a plus lieu d’espérer. Nyx, croyante d'une religion officiellement disparue, évolue donc sur le fil fragile de sa foi mise à l'épreuve. Son attitude promet d'être passionnante.

Il existe dans Out There Chronicles un plat (que l'on peut manger) qui s'appelle un « All American ». Il s'agit dans le lore d'un effort d'unification de toutes les planètes majeures des américains avec un plat réunissant toutes les spécialités. Cette idée existe sur la terre de nos jours : c'est le cas du plat néerlandais Rijstaffel, qui réunit toutes les spécialités de leurs colonies, une sorte de mezze indonésien.

Un restaurant du futur

Les aliens sont nombreux, l'humanité est une infime minorité, et ils ont une lingua franca comme dans le Out There original. C'est très amusant, car on doit apprendre leur langue galactique mot par mot. L'alien mime le sens et on affecte une idée au mot. Parfois on se trompe et donc on peut arriver à des sens bizzares ou meme des contresens.

Il y a une scène par exemple où un immense alien arrive devant le héros et suivant les mots affectés, on peut comprendre soit« Je veux manger avec toi » soit « J'aimerais te manger ». Il vaut mieux être très concentré avant de répondre :-)

Beaucoup de gens ont apprécié un certain alien « Endive » et c'est soulageant car j'ai pu demander à Michael qu'il revienne un jour.


La solitude dans la foule

La solitude est un thème très fort de la licence Out There.

Cependant, un visual novel impose de nombreux dialogues et des personnages. Je ne pouvais pas aborder directement le thème de la solitude au 1er degré de Out There.

Cependant, vous savez que même dans une foule, on peut se sentir très seul. Sans dévoiler l'intrigue, et au delà du conflit intérieur du personnage qui sera amené à être résolu, j'ai traité la solitude par les symboles du quotidien : quand la nourriture est bizarre, quand la sexualité n'a pas la même définition, quand on s'aperçoit qu'on est plus rien, on se sent abandonné.

C'est la solitude, dressée par l'abîme du temps, qui tourmente notre héros.

Le « Key Art » de Out There Chronicles à sa sortie,
nous voulions montrer que vous n'étiez plus seul :-)


Structure narrative

Out There Chronicles n'est pas un LDVELH classique, où vous êtes dans une situation A, vous avez le choix entre B et C avec embranchements, etc...

Nous fonctionnons en mode semi-ouvert sur un modèle très simple :

On donne la possibilité d'un choix 1, 2 ou 3, et choisir une option n'invalide pas les autres.

Ainsi, on peut etre devant 5 plats et les manger dans l'ordre qu'on veut, partir ailleurs et revenir manger, parler à quelqu'un entre deux plats, etc.

Voici un exemple de structure :

« Soyez gentils avec l’horreur sur le trône, c’est la Reine ».


Ils tournent le regard vers la créature silencieuse sur le trône.


Kyntia : « Je la trouve belle, moi. »


Jack : « Darius, vous avez une conception très archaïque de la beauté. Ne jugez pas trop l’apparence des créatures en bonne santé, car vous allez vous retrouver très seul. »


+Retire « Soyez gentils avec l’horreur sur le trône, c’est la Reine. »
+Débloque S’excuser
+Débloque Observer la reine

Midnight Mood a accepté d'adapter leur moteur à ce concept (Antioch a été pensé d'une façon différente) et ils m'ont dit que j'écrivais de façon tellement rigide qu'à terme, cette présentation pourra être copié collée dans un interpréteur avant compilation !

Je précise que Midnight Mood a été proactif sur l'équilibrage de la difficulté et du gameplay (et j'avoue que je suis très mauvais à cela, donc c'était très bienvenu).

Les illustrations

Benjamin Carré a fait les illustrations. Pour continuer sur les euphémismes, nous espérons travailler ensemble et longtemps avec lui.

Nous avons fait un appel d'offre auprès de plusieurs auteurs et voici l'esquisse que Benjamin nous a renvoyé sur la base d'une scène clef.



Non seulement on a pris Benjamin, mais son travail a été intégré intouché dans notre IF.

Michael a pris en main la direction artistique. Initialement, Nyx était un peu plus âgée, plus pâle, avec une queue de cheval. Les Zéros étaient beaucoup plus agiles par exemple. C'est un peuple que je travaille depuis longtemps et Quentin Vijoux avait fait cette illustration :


Les Zéros finalement seront :





Cela diverge de ma vision, mais Michael a une approche beaucoup plus adaptée à la culture visuelle du JV (et je manque affreusement de goût visuel).

Ceci est un artwork non retenu de Benjamin

Nous sommes sur des petits budgets pour ces projets et chaque décor, chaque personnage est un investissement. Il y a une question de la « rentabilité » d'un personnage. S'il est présent, il doit être marquant et ne pas mourir « tout de suite ».

Le fait est que si les personnages sont conservés (sans pour autant faire du one piece), pour le meme budget de production moyen, on a un univers qui s'enrichit. Au téléphone, Michael me présente le design des personnages et me dit « celui-là, il reste en vie, ok ? ».


La musique des étoiles

Siddartha est de retour.

https://siddharthabarnhoorn.bandcamp.com/album/out-there-chronicles


Out There et la fin des temps

Après la sortie d'OTC 1, il est devenu important d'écrire une chronologie exhaustive de tout cet univers fictif. Je m'y suis attelé et nous avons aujourd'hui une longue épopée qui commence de nos jours, qui couvre toute la longue période de Out There Chronicles, la période du Out There classique, jusqu'à la fin des temps, tout simplement !

C'est une licence très vivante, avec de nombreuses œuvres à venir sur cet univers et ses thématiques.

J'ai hâte de vous en dire plus.


Tout n'est pas vain

Une intervention importante du Out There original expliquait que « tout est vain ». Oui, tout est vain, un jour le dernier electron disparaîtra avec toute trace de nos entreprises, qu'elles aient été glorieuses ou médiocres. Mais j'ai écrit cela à une époque où le futur à court terme (mon futur) était assez morose.

Je suis plus optimiste aujourd'hui. Les héros de Chronicles seront amenés à plonger leur regard dans l'abysse et contempler la vacuité inéluctable d'un futur très lointain.

Mais peut-être au fil des secrets de notre univers découvriront-ils que tout n'a pas été vain.


NPC, Lore, Open World : quelques pistes de design

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Vous entrez dans l’épicerie de Belethor, à Blancherive, dans Skyrim.

Celui-ci s’exclame : « Tout est à vendre ! Absolument tout ! ». Ceux qui y ont vendu régulièrement le fruit de leurs pillages se souviennent à la lecture de ces mots du ton frénétique de Belethor (s’il savait que c’est vous qui venez pour vendre !)


Cette phrase « Tout est à vendre… » a été écrite par un auteur humain puis jouée par un acteur humain. C’est évident, pourriez-vous dire.

Et bien non, ce n’est pas une information si évidente à une époque où l’on sous-traite des pans d’univers par de la génération procédurale et où l’on essaye même d’y intégrer des IA conversationnelles.

À quoi ressemblera notre Belethor des années à venir ? C’est une question que nous allons explorer dans cet article.


Des punchlines combinatoires

Toutes les phrases de Skyrim ne sont pas strictement écrites et ne répondent pas à des schémas linéaires. Un garde méfiant pourra vous dire :

« J’ai un œil sur vous, l’orc. »

Si vous étiez Breton, il vous aurait dit de même « J’ai un œil sur vous, Breton. »

La phrase codée est donc « J’ai un œil sur vous, [Dénomination Raciale]. »

Plus précisément, le début de la phrase est contextuel. Si votre personnage est compétent en alchimie, ce même garde pourrait vous dire « Vous pourriez me fabriquer une potion, l’orc ? »

Le vrai système à l’œuvre est quelque chose comme « [Exclamation contextuelle], [Dénomination Raciale Optionnelle]. »




Mais cela reste un élément de décor. Imaginons désormais que la trame narrative fonctionne sur un système combinatoire généré procéduralement.


Wow ! Des quêtes combinatoires !

Le héros entre dans un village. On génère à la volée un personnage critique qui sera labellé « Donneur de quête. ». L’identité de ce personnage est cohérente avec sa position et sa fonction. Un orc sera un mercenaire endurci attendant à la taverne, un Khajiit attendra en lisière de la ville.


On génère ensuite le McGuffin procédural :

  • Quel est le problème ? « Un associé m’a trahi et a volé X », « Mes ancêtres ne trouvent pas le repos parce que X », « On m’accuse injustement d’avoir fait X », ...

  • Résolution intermédiaire optionnelle : Pour avancer il faut d’abord « Trouver les mots sacrés qui se trouvent à Y », « Voler la carte de l’emplacement de Z », « Convaincre Y de vous accompagner »...

  • Résolution finale : Se rendre dans un donjon et récupérer X

  • Twist optionnel : Le donneur de quête est un méchant qui vous a manipulé, vous êtes maudit par l’objet récupéré et il va falloir aller à Z pour vous en libérer, le donneur de quête a été assassiné...etc

On voit qu’il est très simple de créer un système combinatoire de génération de background de quêtes et de quêtes.


Mais ça existe déjà les quêtes procédurales :-(

Dans le cas précis des Elder Scrolls, ce n’est pas une option envisageable, car le lore est sacré et immuable. À l’instar du personnage de Jiub, des quêtes anodines et linéaires ou bien complexes, mais toujours écrites, fondent le socle d’une mythologie qui fait de Tamriel un univers familier à tous.

Cependant, il y a des quêtes procédurales dans Skyrim (et Fallout 4) : les fameuses Radiant Quest. Elles fonctionnent sur le système ci-dessus mais dans leur plus simple expression : « Tel endroit a été envahi par des méchants, tue tout le monde et reviens ».


Avantages pour Bethesda : on ne joue pas les apprentis sorciers avec le lore, ce sera pas trop buggé, c’est finalement pas si différent du reste.

Désavantages pour le joueur : C’est pas très excitant.

Pourquoi ce n’est pas très excitant ? Non pas parce que c’est ultra basique, mais parce que dans le jeu, tout le monde s’en tape.

Vous finissez la quête et vous avez votre paiement, et on passe à la prochaine. Vous ne l’auriez pas faite, aucune différence. A vrai dire, vous savez très bien qu’une seconde avant qu’on vous la donne, les donjons en question étaient vides. Vous êtes pour le jeu un gamin hyperactif qu’on occupe sans imagination à faire une tâche répétitive en lui donnant l’aspect d’un jeu.



La question à 100 millions de dollars (soit le crowdfunding de Star Citizen)

Posons donc une question fondamentale : est-ce qu’une histoire, un background, une quête générés procéduralement sont intéressants ? Le sont-ils plus qu’un travail fait par un humain ?

Il y a plus derrière cette question que l’on ne pourrait croire, mais nous y reviendrons par la suite.

Je parle des Elders Scrolls depuis le début pour une bonne raison : Arena et Daggerfall étaient générés procéduralement, sauf pour quelques points et quêtes clefs (tout comme Frontier Elite et Elite Dangerous), puis, à partir de Morrowind, Bethesda a fait appel à des level designers pour concevoir l’ensemble des niveaux.

Il y a des montagnes par millions dans Daggerfall mais celles-ci sont le produit d’une équation mathématique, tandis que dans Morrowind, beaucoup plus modeste en taille, la moindre pièce d’or posée par terre a été le choix d’un concepteur.

C’est dans l’histoire industrielle un événement remarquable : une tâche qui était faite par un robot, qui, quand l’entreprise a suffisamment de fonds, est attribuée à un humain : d’habitude, c’est l’inverse qui se produit !

Le fait est que la génération procédurale est une direction artistique perceptible : les motifs se répètent à l’infini : les mondes sont grands, mais vides de la présence créative humaine. Visitez 5 villages d’une région de Daggerfall : vous les avez tous vus.


Ceux qui se posaient la question de la pertinence de la génération procédurale ont retenu leur souffle l’été dernier à la sortie de No Man’s Sky : ce jeu serait-il l’élu, celui qui allait démontrer que la génération procédurale pouvait être plus pertinente qu’un level designer ? Bon, ben, le jeu est sorti et on s’y fait bien chier, l’élu ce sera donc pour plus tard.


La génération procédurale et les systèmes combinatoires sont des outils utiles pour le développeur fauché (=qui ne peut se payer des artistes capables d’écrire et d’implémenter un lore et une architecture de quêtes), mais il est difficile aujourd’hui de les contempler comme des approches idéales.


Les IA ou « I am sorry Dave, I am afraid I can’t do that »

C’est là qu’intervient une toute nouvelle technologie qui pèse ses millions de dollars et pour laquelle le gouvernement français lui-même a lancé en début d’année une initiative industrielle : les IA.

Dans notre cas, une IA par réseau neuronal est un outil mathématique qui est capable de générer ex-nihilo du texte en français (ou dans n’importe quelle langue). Ce n’est pas du texte combiné ou préécrit. Le texte est produit « on ne sait comment », mais ça marche, c’est la fameuse boîte noire des IA.  

Théoriquement, vous lui dites « raconte moi l’histoire d’un pays » et elle va fournir du texte sans fin sur le sujet. Ça fonctionne…plus ou moins, nous en avons même créé une petite dans le cadre du podcast Trajectoires et elle répond aux questions des auditeurs.

La promesse de gameplay que cela représente est la suivante : quand vous arrivez dans le village de Bordeciel précédemment évoqué, les personnages vont vous interpeller avec des répliques générées par ces IA.

Ce n’est pas de la science-fiction, j’ai actuellement des discussions très stimulantes avec des professionnels du machine learning qui ont cette ambition. Il est donc tout à fait possible que cela soit une technologie existante dans les années à venir.

Les deux avantages sont stupéfiants et quasiment des killer features :

  1. Tout peut-être écrit et tout est imprévisible. Vous êtes certain de vivre une expérience radicalement nouvelle, surprenante, et même déstabilisante.

  1. Chaque expérience que vous vivrez à un certain instant sera propre à vous et à votre partie, les autres joueurs vivant au même moment et avec les mêmes personnages d’autres textes générés par les IA.

Intéressant non ?

Mais pour être honnête, il y a des obstacles fondamentaux à l’implémentation d’un tel dispositif (et je passe sur « l’éducation » de l’IA à générer un texte spécifique, à rattacher des points d’ancrage à ces textes spécifiques pour les plaquer sur des schémas de quête, etc…)

  1. Il faut nourrir l’IA avec un ensemble de textes de base (un corpus) très important (l’IA existe aujourd’hui parce que la Big Data existe). Notre petite IA maison fonctionne avec 4 ou 5 milliards de caractères et elle s’exprime pas tout à fait efficacement. Cela veut dire que pour avoir un tel dispositif qui fonctionne, il faut produire à la base un nombre très très important de textes spécifiques (à l’univers de Tamriel, par exemple) qui représentent un coût très important.

  1. Une IA qui s’exprime en français ne pourra pas s’exprimer en anglais. Donc un tel dispositif PAR langue.





L’expérience collective du JV du 3e millénaire

Mais admettons néanmoins que la technique fonctionne comme dans nos rêves les plus fous.

Vous arrivez au village de Bordeciel et un haut elfe vous invite à boire et vous parle de sa vie et de sa famille, et vous invite à aller chasser avec lui, avant de se retourner contre vous, car c’était un voyou. Dans la partie que jouera un de vos amis, ce même Altmer est un paria de la guilde des sorciers, prêt à vous vendre une carte au trésor.

Je soutiens que cette expérience de jeu reste décevante car elle occulte la nature sociale du jeu. Un jeu vidéo, même solo, est une activité de groupe : une partie du plaisir consiste à partager ses histoires avec ses amis, à avoir vécu la même expérience, et que cette expérience soit le produit intentionnel d’un humain.

Pour prendre une métaphore, on a du mal à se sentir chez soi et à inviter ses amis quand la maison change tout le temps de forme et d’adresse.

La question est quasi philosophique, mais une œuvre est un pont entre l’histoire personnelle de l’auteur et du spectateur. Si demain les IA produisent des œuvres d’art de premier plan, elles auront moins à nous transmettre que des œuvres produites par des humains dirigés par des intentions et traînant une vie à laquelle on peut se mesurer. Si le contraire se produisait, cela veut dire que le produit de matrices mathématiques que sont les réseaux neuronaux sont équivalents à nous, et donc que nous sommes, sans le savoir, des produits de matrices mathématiques.

Tout n’est pas à jeter dans l’intégration IA, tant que l’on garde à l’esprit cette dimension sociale devenue nécessaire à l’époque d’internet. On peut imaginer que dans le cadre d’un MMO, une aventure éphémère générée à la volée mais partagée par quelques amis est un moment pertinent.


La fin du marqueur de quête ?

Si on doit écarter l’IA comme générateur de backgrounds, quels systèmes d’avenir envisager ? Je pense en fait à l’effacement progressif du NPC pour laisser la part belle à l’action du joueur.

Dans un premier temps, je me demande si le temps du « marqueur de quête » est révolu. Les plus belles expériences étant de nature émergente, moins on demandera au joueur de faire des choses, plus il prendra des initiatives susceptibles de créer des situations émergentes.


Un Grise-Barbe pourra dire au Dovakhiin d’aller dans un mystérieux tumulus perdu dans la neige pour aller chercher un mot de pouvoir.  (1)
Dans la situation émergente, le joueur crapahute dans la neige et découvre un mystérieux tumulus. Épée au clair, il se lance dans son exploration sans savoir les dangers et les récompenses qu’il y rencontrera. (2)

La situation (1) s’apparente à un travail. On fast travel vers la destination, on a sans cesse un curseur qui nous dit comment optimiser notre chemin. On sait déjà quelle sera notre récompense, comme un salaire à la fin du mois.

Dans la situation (2) ne serait-ce que parce que sans marqueur de quête, le joueur doit se faire une carte mentale du lieu, cela lui permet de se l’approprier. Les donjons de Skyrim vont dans ce sens avec des marqueurs architecturaux qui donnent un dynamisme à l’exploration (en général, par exemple, s’il y a un ruisseau, il vaut mieux le suivre).


Une trame dramatique crowdsourcée

Dans un second temps, il serait intéressant de systèmiser la relation joueur avec la règle générale « une action du joueur entraîne une conséquence chez un autre joueur. »

Exemple de système totalement caché : Les variables habituellement aléatoires dans un jeu (météo, spawn, loot...) dans votre partie dépendent des actions d’un autre joueur. Cas concret : dans sa partie, un joueur a un comportement généreux. La conséquence de cet acte est que dans une autre partie, un autre joueur trouve un loot plus important que d’habitude. (a)

Exemple de système semi-caché : dans Elite, si tout le monde achète la ressource d’un système, cette ressource prend de la valeur et gagne en rareté.

Exemple de système non caché : lier le système de housing et de vol. Quand vous achetez un magnifique chandelier gothique pour mettre dans votre demeure Douce Brise, une quête « vol de chandelier » apparaît dans la guilde des voleurs d’un autre joueur. Si cette quête est réussie, le chandelier aura été volé et placé dans la guilde des voleurs. (b)


N’imaginez pas forcément des systèmes online très performants pour ces actions. Elles peuvent être réalisées de façon asynchrone sans que les joueurs ne se croisent jamais ni aient même connaissance de l’activité online.

Concernant le cas (a), quelle pertinence de passer d’un processus invisible à un autre ? L’idée est de mettre un lien spirituel entre les joueurs de parties différentes. On touche à un concept presque religieux : quand est frappé d’un coup de malchance, on se dit parfois « qu’ai-je fait pour mériter cela ? ». Etymologiquement, la religion est le fait de relier « magiquement » les choses.

Ainsi, quand vous jouez de malchance dans votre loot, quand les adversaires sont injustement forts, quand les pires tempêtes éclatent et déchirent un ciel paisible, c’est qu’au même moment, dans la partie qui est reliée, une personne est en train de commettre de mauvaises choses.


La notion de moralité a été souvent introduite comme facteur éducatif, comme les variables invisibles de karma dans les Ultima, comme système de réputation, dans les Fallout, voire dans un but pas très réussi de moralisation du joueur dans les Bioshock. Mais si vos comportements moraux influençaient les parties des autres joueurs ? Se créeraient-ils des chaînes de bienveillance ou de malfaisance de parties ainsi reliées ? Ne seriez vous finalement, jamais vraiment seul dans la peinture de votre propre aventure ?

Le cas (b) a des conséquences psychologiques tout à fait intéressantes. Votre chandelier gothique que vous avez placé là façon Valérie Damidot et que vous n’aimiez pas plus que ça vous a été volé, et cet acte a été commis - même dans un jeu asynchrone parallèle - par un autre joueur. C’est la guerre ! Il prend tout de suite une valeur importante. De la même façon, si vous avez un attachement particulier avec un personnage, il pourrait être la cible d’une guilde d’assassins. Votre revendeur préféré Belethor qui doit fermer car des gens détournent ses approvisionnements.

J’ai mis des exemples compétitifs, mais des cas coopératifs (pas encore narrativement développés) sont tout à fait envisageables et déjà largements entrepris, comme le fait d’affaiblir des boss par l’action combinée de nombreux joueurs dans Dragon’s Dogma.


Une quête du sens

Allons encore plus loin. Si à chaque fois qu’on décore sa maison avec un chandelier il est susceptible d’être volé, peut-être que le joueur prudent va mettre des pièges à loups tout autour du chandelier. Peut-être même qu’il va s’installer, si le jeu lui permet, tout au fond d’une tortueuse grotte blindée de pièges et attendre avec 2 gardes du corps. Vous voyez où je veux en venir ? On se retrouve avec un systeme de level design itératif crowdsourcé.

Pour conclure, j’aimerais aller plus loin et vous proposer d’imaginer une méthode de création du lore d’un open world qui serait crowdsourcé par le gameplay.

Prenez une surface de jeu générée procéduralement ou avec des level designers, avec des rochers, de la végétation, des animaux.

Des joueurs-pionniers parcourent ces espaces non civilisés en leur attribuant des noms (Ex : la plaine du vent, le fleuve bleu...), mais aussi en nommant les essences des arbres, leurs fruits, les animaux.. Il y a au final un simple travail de « nommage », mais aussi de détermination de la qualité avec une gamification de l’équilibre. Si une essence d’arbre est extraordinaire, il faudra que les prochains fruits désignés soient empoisonnés pour équilibrer, par exemple.

Une fois ce travail de jeu-encyclopédie fait, les level designers peuvent donner vie à la civilisation en implantant des villes et en les érigeant. Le lore se construit ensuite de lui-même sur le principe de la localisation : une auberge sera faite en bois local et servira de la nourriture locale, un médecin utilisera les herbes et fruits à sa portée. Si les essences des bois sont médiocres, les maisons seront en pierre, et vice-versa. Des niveaux de vie et dynamiques de besoin (et donc autant de quêtes) apparaîtront naturellement.

Savoir que cette vieille auberge est en orme bleu de la vallée du vent, et qu’ils y servent des pintades tachetées du lac horizon ne change pas grand chose à votre expérience de jeu, à votre build, à votre cursus hororum de points d’experience, pas vrai ? J’aime à croire que si, surtout si un jour vous vous reposez au pied d’un véritable orme bleu et que tout est cohérent, tout fait vrai.

Une telle démarche me semble créer non pas un design élégant comme le voudrait un level designer ni une fonctionnalité précise comme le voudrait un simulationniste, mais un peu des deux, dilué dans l’élément essentiel qui transforme une expérience de jeu en aventure mémorable : le sens.


Mon année 2017

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Bonjour,

Comme chaque année, voici mon tableau excel d'activités pour 2017.

Le lien est ici :

https://docs.google.com/spreadsheets/d/1nwrNQGRmfEnfcy-TRw7TfWUi2MMv1p55F2EHBpvb_1E/edit#gid=1622249233

Il y avait une particularité cette année, c'est que à chaque jour je tenais un journal intime. Quelques mots décrivant les actions de la journée, le moral et le physique.

Cependant, certains de mes proches ont jugé qu'il était trop intime et donnait une vision trop négative de moi, voire qu'il pouvait être exploité, même avec de bonnes intentions, et que cela me blesse. Je suis leur conseil et je m'abstiens de le publier.

Pour ceux qui dissèquent ce type d'activités, et pour que vous compreniez ce qu'il y a écrit entre les lignes, mon année 2017 a été coupée en deux vers août.

À cette date, j'ai eu une série d'examens médicaux et on m'a diagnostiqué une maladie préoccupante. J'avais pour consigne de perdre, en deux mois, de perdre 15 kgs.

Cela a été fait et aujourd'hui mon poids est stabilisé. Je vais mieux à tous les plans.

Dans le fond, on peut lire ce journal et ces événements de façon négative :

- Je n'ai rien produit de concret, mes projets ont stagné.
- D'allant, je me fais du souci pour mes rentrées d'argent.
- J'ai eu cette maladie, qui nécessite un traitement à vie.
- Mon propriétaire m'a notifié que j'allais devoir quitter mon appartement. Mon rythme de vie ne me permet pas de créer un dossier crédible auprès d'un propriétaire ou d'une agence.

Mais ces événements précis ont également une interprétation positive :

- Un soir de juin, désespéré par mes projets qui n'avancent pas, j'écris un pilote de série que j'envoie à une maison de production. La série sera tournée lundi prochain et je suis déjà sur d'autres dossiers de séries. Je découvre de nouveaux métiers passionnants.
- Afin d'anticiper le manque de rentrées d'argent, j'ai accepté de donner des cours dans une école, et je trouve ça fantastique.
- Je vomissais tout le temps (et les gens se moquaient de mon incapacité à gérer le stress) mais depuis que cette maladie a été diagnostiquée et bien j'ai perdu 15 kg, je fais des cabrioles, je cours comme une fusée et je ne vomis plus.
- J'ai commencé à réfléchir à quoi ressemblerait un grand jardin d'une maison de province. J'ai développé une passion plantes.

Par ailleurs cette année j'ai commencé la pratique de la méditation en pleine conscience, et j'ai fait presque 150h de code en live sur twitch pour construire un grand MMO textuel. J'ai fait du camping pour la 1ere fois et j'ai beaucoup aimé. J'ai aussi fait une boule de neige de 1m50. Et j'ai fait mon 1er jeu de rôle en podcast.

À l'année prochaine :-)

FT


Un jeu de rôle pour Noël ! Et quelques informations supplémentaires...

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Nous avons fait un jeu de rôle pour Noël à Studio404.

Bien entendu, 404 oblige, on s'amuse, mais on parle aussi tech !

Jetez-y une oreille, beaucoup de gens nous ont dit qu'ils se sont bien marrés...



Oui, ils sont passés à coté du fait de sauver la Californie de la neutralité du net et de mettre à jour un nouveau Weinstein, mais ils se sont focus sur une nouvelle perle de l'entrepreneuriat à la française dans la silicon valley...

Quelques infos pour les curieux :

- La Church of IA existe, c'est ici :

https://www.wired.com/story/anthony-levandowski-artificial-intelligence-religion/

Pour un peu de romantisme, je l'ai située dans le véritable quartier d'Eden, dans la Silicon Valley.

- Le Marty Donuts, le Capital Club, le Saison et la Vicente Drive existent vraiment et vous pouvez les googler. C'est un bonheur d'avoir internet...il y a 20 ans, j'achetais des guides de voyage pour faire mes jeux de rôle !

- La tech « Prankeo » existe vraiment et est utilisée essentiellement pour du porno (Lien NSFW : https://www.reddit.com/r/deepfakes/ )

- La techno « CleverGraphs » n'existe pas...ou presque. C'est un grand enjeu de l'IA machine learning aujourd'hui :

En gros on entraine un réseau de neurones qui quand on lui dit « est ce qu'il va pleuvoir » vous dit « oui » « non » ou « ma foi ». Mais quel est le lien ou la logique derrière les réponses fiables ? On ne le sait pas : c'est le mystère de la « boite noire ». Mais on travaille activement à regarder l'évolution des neurones, et il n'est pas impossible que Clevergraphs arrive du jour au lendemain.

Pour les bien du scénario, j'ai supposé que Clevergraphs permettait de reconstituer le corpus d'une base de données à partir d'un réseau de neurones. Je pense que pour des raisons d'entropie c'est impossible.

Y-aura-t-il d'autres JDR ?

On en parle demain en réu 404 :-)

Génération Procédurale de Texte et Narration : Généralités, Opinions, Astuces et Perspectives.

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Ceci est la transcription d’une conférence donnée initialement à Game Camp France, à Lille. Pour attirer les gens, je l’avais sous-titrée « Comment se débarrasser de son écrivain et son énorme égo » Autour de cette idée provocatrice nous allons explorer partiellement le monde de la génération textuelle et voir quelques perspectives inattendues. Donc imaginons que vous soyez créateur de jeu et que vous ayiez délégué la partie narrative à un écrivain. C’est une bonne chose car c’est un professionnel, mais vous vivez l’enfer car son ego déborde désormais sur vos décisions (et j’en sais quelque chose, puisque j’en suis un). Le rôle de l’écrivainÀ quoi sert un écrivain dans le cadre de la création d’un jeu vidéo ? Fondamentalement, on pense tout de suite à : toile de fond, scénario, mythologie, interaction, dialogues, descriptions… On pense déjà moins à « l’environnement textuel ». Si vous avez un sound designer dans votre équipe, il nous viendra jamais à l’idée de fabriquer un son pour un bouton : vous demanderez à votre sound designer de le faire... Cependant, dans beaucoup de productions indés auxquelles j’ai participé (pour ne pas dire toutes) tous les textes d’interface étaient rédigés par le responsable UI, le graphiste ou le GD. Dans le fond, un bouton « OK » n’a pas besoin d’être pensé par un écrivain, pas vrai ? En vrai, pourquoi pas ? C’est son métier, sa compétence. Pour l'environnement textuel d’interface, il y a parfois des conflits entre l’expert de l’interface, qui veut un texte limpide et signifiant, et l’écrivain, qui tentera plutôt de coller à un contexte de jeu et qui tentera d’y raconter une histoire. Dans Out There que j’ai co créé avec Michael, j’ai pu mettre un bouton intitulé « Encounter Life » quand on veut explorer une planète et approcher ses habitants. La formulation est plutôt maladroite et les joueurs anglosaxons l’ont mis sur le dos d’une mauvaise traduction. En vrai, dans sa version française, elle est encore plus maladroite : « Rencontrer la vie ». L’intention n’était pas d’être limpide, mais d’être mystérieux, solennel et évocateur. Une interface est telle un verre de cristal qui soutient l’expérience de jeu qui serait un bon vin : elle doit s’effacer et accompagner son contenant pour le sublimer. Si votre jeu est narratif, donnez un peu de liberté à votre écrivain sur votre environnement textuel. Les AAA, engoncés dans leurs process, ne le feront pas. Les indés peuvent le faire, et comme seuls eux peuvent, ils le doivent. Un 2e aspect crucial de l’écrivain est celui de la « texture gameplay ». Souvent les écrivains se plaignent d’être relégués au second plan dans les JV. Il y a de quoi se plaindre en effet. Combien de fois nous a-t-on présenté un jeu, par exemple un tactical terminé à 90% et l’on nous dit « bon, tu nous fais une histoire pour ce jeu ? ». Nous aurions aimés être là dès le début, pour apporter une élégance et un liant dans la forme et le fond, plutôt que d’être un cache misère narratif... Avec le temps je ne dirais pas que quand le travail de l’écrivain est requis (nous allons tenter de l’extirper du process par la suite), ce travail est plus important que tous les autres, comme le code. Je dirais qu’il est tout aussi important, ni plus ni moins. Cependant, l’intégrer aux premiers stages de la conception peut être un atout dans l’élaboration d’un gameplay unique. Récemment, j’ai du faire le GD et le travail narratif d’un jeu d’espionnage. Si je n’avais qu’une casquette de GD, à quoi aurais-je pensé ? Aux espions, à Jason Bourne, à des courses poursuite en voiture, à des agents doubles, à des documents secrets… Ma casquette de narrative designer m’a fait me documenter beaucoup sur la géopolitique pour élaborer un scénario en parallèle : j’ai découvert les relations ambiguës des états avec le terrorisme, la cryptographie, l’importance des drones, des interprètes, des diplomates, la personnalité très particulière de chaque grande puissance… Évidemment, toutes ces idées nouvelles ont alimenté grandement mon travail de GD. En GD, la règle d’or est : « Connaissez parfaitement votre univers, les règles apparaîtront d’elles-mêmes. » Et qui connaît mieux votre univers que celui qui va en rédiger le background ? Quelques aspects de la narration textuelleLocalisation Le conseil le plus important que je pourrais donner est de ne pas écrire trop. Je pourrais développer ce conseil sur bien des plans philosophiques et artistiques, mais le fait est que le déploiement de votre jeu indé doit prendre en compte les frais de localisation du jeu. Dans nos productions qui sont très narratives et textuelles, nous circonscrivons le volume à 35K - 50K mots. En comptant 0.10 cts € / mot, cela représente disons 3500 € par pays. Bien sûr, localiser un jeu français en anglais, en russe ou en chinois est évident étant donné l’énormité des marchés. Mais en allemand, alors que la population est totalement anglophone ? En italien, où le marché est faible ? L’excellent 80 days ne comporte pas de version française. Il comporte 500 000 mots, ce qui en fait l’équivalent des Misérables de Victor Hugo. Si un jour une traduction française (ou italienne) est envisagée, il faut avoir l’espoir de recouper au moins 50K € sur le territoire concerné. Un pari délicat… Le texte comme vecteur de subtilité Beaucoup de créateurs talentueux et disposant d’une grande somme d’argent essaient de faire passer des émotions ou des sentiments complexes par de la cutscène 3D. C’est compliqué. Souvent, c’est balourd, singeant plus ou moins le cinéma qui est un art hétérogène. Ils paient le prix d’être des pionniers. En attendant, un texte simple peut transmettre des concepts difficiles à illustrer autrement, justement, que par le texte : le sentiment d’accomplissement, le bonheur, la volonté d’entreprendre, et cette chose autour de laquelle le monde entier se focalise, et qui est si absente de nos productions, qu’est l’amour. Le texte - interface Nous avons vu qu’une interface comportait du texte et que ce texte pouvait poser une ambiance. Maintenant le texte peut-être un composant d’interface à part entière, décrivant quelque chose d’une façon plus adéquate qu’un autre moyen, comme une icône. Le rogue-like ADOM par exemple vous propose de créer un héros avec une race et des statistiques. En début de partie, il synthétise les informations statistiques du joueur pour en faire une biographie. Par exemple, un personnage qui aura grandi dans les champs sera endurant. D’une façon symétrique, les Ultima proposaient une création de personnage, donc la détermination de leurs statistiques, par des mises en situation imaginaires du type « que feriez-vous dans cette situation ». Ces questions, posées par une mystérieuse bohémienne, posent une ambiance et allient pertinence et élégance. Pour plonger encore plus dans la fractalité de la signifiance du texte, la police de caractère raconte aussi une histoire : la caroline d’Oblivion nous place dans un contexte de cités médiévales et de batailles de seigneurs, tandis que l’Helvetica condensed étincelante de blanc de Skyrim nous rappelle à tout moment que nous sommes entourés de montagnes. C’est un peu comme une interprétation freudienne d’un rêve : quand on parle de texte, rien n’est innocent.
Grammaire Les joueurs américains et les joueurs français n’ont pas, aujourd’hui, les mêmes expériences de jeu, et ceci à cause de la grammaire. (Je ne parle pas des accords d’adjectifs. J’ai une remarque à vous faire sur le français : en tant qu’écrivain français je préfère largement les fleurs orange aux fleurs blanches. Car orange est strictement invariable (il ne prend pas de s au pluriel), tandis que non seulement blanc prend un s au pluriel, mais quand il s’agit d’un féminin il se transforme en blanche. Coder des fleurs françaises, c’est coder des exceptions !) Nous avons hérité des formes grammaticales des jeux des années 80 « Talk to » en anglais et « Parler à » en français. À quoi pense un américain quand il clique sur Talk To ? Est-ce qu’il donne un ordre au héros « Go talk to that guy, man ! », ou est-ce qu’il ajoute un « I try to » implicite (I try to talk to…), impliquant qu’il s’incarne totalement dans le héros ? Je ne sais pas. En français nous avons un infinitif très neutre « Parler à » dont la traduction serait en anglais « To talk to ». Nous établissons une liste d’instructions neutres : dans le fond, l’avatar subit une forme de programme. Nous avons une relation plus analytique qu’émotionnelle avec le jeu et c’est le fruit d’une grammaire complexe. Si nous utilisions l’impératif « Prends » au lieu de « Prendre », nous nous exposerions, dans les jeux à parseurs textuels, à des blocages, tout simplement parce que le français moyen maîtrise mal l’impératif. En faisant nos jeux depuis 40 ans avec nos « Talk to » et nos « Parler à » j’ai parfois l’impression que nous mangeons le même plat ou que nous faisons l’amour de la même façon depuis 40 ans. Le futur, le passé simple, la troisième personne du singulier...pourquoi ne pas utiliser ces conjugaisons, ces modes et ces temps pour nous offrir une narration unique ? Il y a encore tout à faire ! Génération procédurale
Combinatoire Une stratégie commune pour générer du texte est d’utiliser la combinatoire, si possible conditionnée. Ainsi, quand dans Skyrim un garde vous aborde en disant « Bonjour l’orc, vous pouvez m’aider à enchanter quelque chose ? », nous avons trois parties de phrase :
- Bonjour ou Bonsoir, lié au temps ingame - L’orc, lié à la race du joueur - La phrase qui suit est liée à une compétence du joueur. S’il n’en a pas, le garde pourra toujours nous parler d’un accident du genou…

Que retient-on de ce système combinatoire ? Déjà, on peut créer beaucoup de phrases avec peu de matériau de base. Notre rêve de nous débarrasser de l’encombrant écrivain progresse. Il y a un réel « wow effect » les premières fois. Le jeu réagit passivement à l’identité de notre personnage, et c’est impressionnant. Cependant, on s’adresse à des joueurs, des gens hyper capables de lire des motifs dans les feedbacks d’un jeu, c’est même d’ailleurs leur compétence principale. À ce titre il y a un systématisme transparent dans une telle application combinatoire qui mène paradoxalement à une perte d’immersion. Cela rejoint une idée plus vaste, que nous verrons plus tard, qui suggère qu’un personnage doit être écrit ou donner l’illusion de l’être, même dans un monde qui se veut systémique (puisque c’est si à la mode). Enfin, et c’est peut-être le plus délicat, l’information transmise est faible. Le garde de Skyrim est un miroir qui évalue ma progression, et rien d’autre. Dans ce cas particulier, il y a bien des moyens de l’améliorer. Au final l’exercice de la phrase combinatoire peut se condenser dans une seule règle de qualité : « Est-ce que je transmets une information nouvelle et cohérente dans le cadre d’un corpus suffisamment vaste pour ne pas lasser ? »

Sheherazade Il existe une technique basée sur l’équilibre du récit, que je nomme « Sheherazade » et qui allie des techniques de soap opéra à architectures de shows plus classiques (comme X-Files). Imaginons que vous soyez un écrivain pour un créateur de jeu vidéo fou et que ce dernier vous demande d’écrire 1 000 000 de quêtes car selon lui l’équilibre de son jeu en dépend - et que vous ne souhaitez pas passer par du procédural. Il est possible de donner l’illusion à un jeu d’avoir 1 000 000 de quêtes en en écrivant un nombre assez réduit, disons 800, et, si vous utilisez plusieurs techniques, de baisser encore ce nombre (400). X-Files (ou Star Trek) a une structure intéressante : il est composé d’un arc principal dont les épisodes clefs sont au début et à la fin, et un ou deux au milieu. Tout le reste sont des épisodes indépendants, que vous pourriez d’ailleurs regarder dans le désordre. Beaucoup de RPG sont basés sur une structure similaire. L’arc principal est la main quest, et les épisodes intermédiaires sont les side quests, que l’on peut faire dans l’ordre que l’on veut. Imaginez que vous allumiez la télévision et que la chaîne passe un épisode de The Young and The Restless. Une personne passe à côté de vous et s’exclame « Wow, c’est la saison 16 épisode 32 ! ». Vous seriez certainement stupéfait, sceptique ou amusé, car il est difficile, voire impossible, de connaître si bien les épisodes de la série pour les identifier précisément. On peut effectivement jouer sur l’incapacité de notre cerveau à mémoriser parfaitement une histoire ou une quête si l’on suit des conditions de rédaction de type soap opéra. L’idée est que si l’on boucle la 800e quête écrite, on ne se souvient plus de la 1ere. On peut donc, et oui, boucler à l’infini sur le même corpus d’histoires. Pour cela il y a 2 règles à suivre : - Il faut être absolument dans le même contexte : petite ville américaine, science fiction, médiéval fantastique. Plus on est générique, plus la technique est efficace. - Il ne faut pas être trop talentueux et ne pas créer de granularité dans la narration. Les quêtes doivent suivre les mêmes rythmes et être, à l’instar des épisodes hors arc principal, échangeables entre eux. Une offre d’emploi pour ce type de travail pourrait ressembler à « Nous cherchons un écrivain talentueux capable d’écrire les histoires les plus fades possibles ! » Est-ce qu’une série d’histoire sans granularité (hors rythme interne d’épisode) peut réellement intéresser ? Demandez aux spectateurs de soap operas. Mais il est prétentieux de croire que tous les joueurs veulent des histoires passionnantes et impliquantes - beaucoup veulent simplement se détendre, et ne pas ajouter à leurs pensées le fardeau d’aventures virtuelles. Et ce marché est probablement le plus vaste.
Turbo Sheherazade Il existe des moyens de démultiplier ces techniques, en utilisant des textes à trous dans les histoires pré écrites - donc en ajoutant un peu de combinatoire. Cela permet de réduire drastiquement un nombre déjà faibles d'histoires - on atteint ici une limite financière, car dans le fond, écrire 400 histoires ne coûte pas si cher. Puis il y a la génération procédurale proprement dite. Les techniques sont particulièrement nombreuses mais elles consistent tout simplement à générer des histoires avec des algorithmes. Une approche valable, notamment dans le cadre de traitement de licences de type série TV ou souhaitant les singer, est une approche simulationniste. De la même façon que l'on designe un simulateur de lance-missiles, il est possible de designer un simulateur de scénariste : ils ont les mêmes ouvrages de référence, fonctionnent sur des rythmes normés, et appliquent les mêmes recettes. Lorsque l'on réduit ce travail au design de quêtes à la volée, le travail est encore plus réducteur : Mcguffin, exploration de lieu, combat ou épreuve alternative au combat, récompense, twist éventuel ou conclusion. La scène du jeu de rôle indépendant est très riche en ouvrages permettant d'organiser de la génération algorithmique de quêtes de qualité - citons par exemple Eureka et Masks chez Gnome Stew. La promesse de quêtes infinies aux contours maîtrisés est séduisante mais présente au final les mêmes écueils culturels que la génération par IA deep learning que nous allons aborder ensuite. Je suis pessimiste sur leur intérêt à court terme.
Cœurs brisés Habituellement, quand j'ai une idée de jeu expérimental, je me pose les deux questions : 1 - Est-ce que c'est possible ? 2 - Est-ce que c'est amusant ? Les développeurs indépendants travaillent par passion et par plaisir. Le confort émotionnel et intellectuel de travail est important. J'ai une anecdote de mise en garde sur la génération algorithmique précédemment évoquée. Il y a quelques semaines j'ai voulu écrire une histoire d'amour sur le principe suivant : une fille m'envoyait des sms tous les matins, me souhaitant une bonne journée, m'invitant à me confier, à profiter de la vie, parfois en me taquinant, pimenté parfois d'un peu de cybersexe...et tant qu'à faire, je voulais utiliser mes techniques pour faire de ceci un « jeu sans fin ». J'ai vécu un enfer : il est très pénible d'écrire sur l'amour, un sujet particulièrement sensible, intime, par petits bouts algorithmiques. C'est un travail affreux qui vous éloigne du sujet initial et qui est absolument déprimant. J'espère que vous ne travaillerez jamais dans une usine ingrate de jeux vidéo où vous fabriquerez comme des ouvriers des petits morceaux d'amour à monter en kit. Donc quand on vient au saut quantique de la génération algorithmique textuelle, il convient aussi de se poser la question : 3 - Est-ce que je vais apprécier de le faire ? J’aime croire que l’amour que nous mettons dans le travail a une influence directe sur la qualité de l’ouvrage.
IA Deep Learning La technologie des réseaux de neurones permet de créer, à l'infini, des textes sur un sujet donné, moyennant des conditions. Avant de poursuivre, un avertissement : beaucoup de professionnels bien plus qualifiés que moi estiment que c'est une technologie d'avenir. Ils ont donc probablement raison. J'ai cependant l'avis inverse. Pourquoi développer un avis qui est donc probablement erroné ? Et bien parce qu'il vous faudra bien des arguments quand votre client/patron voudra tout miser dessus parce que ce sera la mode, à défaut d'être une solution pertinente. La technologie est tout à fait accessible, aux résultats surprenants. Vous donnez à un logiciel un corpus de textes (nous le développerons plus tard), et par la suite, le réseau de neurones vous restitue des textes similaires, à l'infini. Il y a un travail d'équilibrage pour que les textes restitués soient pertinents et intelligibles sans être pour autant des copies de tout ou partie du corpus originel (overfitting) mais le résultat est vraiment étonnant. Il faut aussi une machine hors normes : nous utilisons pour l'entrainement des neurones un PC avec 85 Go de RAM. C'est le moment d'utiliser toutes ces cartes graphiques qui minent du bitcoin à quelque chose de vraiment utile ! Pour les besoins d'un podcast de mathématiques, nous avons créée une petite IA conversationnelle qui s'est même choisie un prénom : Yurie. Elle a réponse à tout, des réponses qui suivent une logique interne mais rarement utiles. Yurie a été utilisée pour des questions / réponses, des textes de rap, des morceaux de romans, la reconstruction d'une langue proche du français (en prenant en compte dans le corpus non pas des mots distincts mais les lettres composant ce mot), et même un morceau du scénario d'une BD qui sera prochainement publiée. En faisant varier les corpus et les techniques d'entraînement, on peut créer des machines à débiter du texte sans fin sous toute forme. Y compris du lore, dialogues et quêtes liées aux JV ? Faisons un petit bilan sur les contraintes de corpus. Notre Yurie a commencé à s’exprimer en bon français à partir de 3 milliards de mots. Suivant les langues, bien entendu, ce chiffre peut varier. Mais cela nous ouvre trois obstacles majeurs : Tout d’abord il faut obtenir une quantité importante de mots, qui plus est dans un contexte spécifique : ce n’est pas en éduquant votre IA avec tous les textes libres de droits d’avant 1950 qu’elle va s’exprimer d’une façon médievale, argotique ou technique suivant les contextes. Il n’y a pas de contrôle direct sur les éléments qui seront produits. Éduquée avec des textes d’avant 1950, Yurie est sexiste : À quoi sert un diplôme ?Y : Un diplôme permet à un homme de devenir scientifique, et à une femme de devenir institutrice. On peut imaginer toutefois que l’IA produise 1 million de textes et que l’équipe d’auteurs passe son temps à les selectionner plutôt qu’à les écrire. Mais c’est perdre un grand intérêt de ce principe. On ne peut pas traduire ces textes dans une autre langue. Il faut créer une IA par langue. Donc un corpus par langue… La génération par IA permet à mon avis de faire trois degrés de production textuelle : - « Le bruit de fond » : il y a besoin pour les productions importantes, de rédiger une somme considérable de textes qui ne sont presque jamais lus ou entendus : ce sont les conversations des passants dans les open world par exemple. - Les dialogues génériques courts : un PNJ qui peut dire « oui » ou « bonjour » de 3000 façons différentes ? C’est aussi possible. - L’écriture de lore faible : besoin d’une bibliothèque renfermant un millier d’histoires de dragons ? C’est tout à fait possible. Toute production plus ambitieuse me semble difficile à appréhender techniquement aujourd’hui (mais comme je l’ai dit, je me trompe surement). Mais est-ce qu’un PNJ qui dit « oui » de 3000 façons différentes, c’est cool ?
Cool comme en 1999 Il y a une barrière culturelle qui me semble immense par rapport à l’arsenal technologique des quêtes procédurales ou de l’IA génératrice de texte : Promettre une expérience de jeu unique est une proposition qui était palpitante au XXe siècle mais qui est très incomplète de nos jours. Aujourd’hui le jeu se consomme en le jouant, mais aussi sur youtube et sur stream. Tout comme dans la consommation de shows télévisés, l’expérience de jeu est aussi en dehors du jeu, par les forums, par les réseaux sociaux, par l'interaction joueur hors jeu. Il faut donc pouvoir concilier une expérience de narration émergente et des marqueurs fixes, reproductibles. En gros : « j’ai vu ce streamer dans cette situation de jeu faire ceci et c’était cool, j’ai envie de le faire chez moi ou j’ai envie de faire un peu différemment ». Nous découvrons une version sophistiquée du plaisir qu’on les passionnés de reparler avec passion d’un match sportif auxquels ils viennent d’assister. Aux deux opposés du spectre de la narration émergente nous avons : > La promesse d’un jeu absolument figé comme un point’n’click est faible car 100% de l’expérience de jeu est consommée par youtube / stream. > La promesse d’un jeu théorique où toutes les expériences sont uniques est également aussi faible car ce que voit le joueur dans un stream n’est pas reproductible et il n’y a pas de marqueurs communs capable de générer une culture en dehors du jeu. Sans surprise, ce sont donc les open worlds classiques qui ont longtemps proposé une expérience de narration émergente optimale, où le joueur avait un grand degré de liberté dans un monde qui était le même pour tous. En aparté, je précise que quitte à avoir 3000 façons de dire oui, il vaut mieux 3000 PNJ qui ont une seule façon (unique) de dire oui que 1 (ou 3000 PNJ) qui ont 3000 façons de dire oui. Un personnage écrit, même faiblement, vaudra mieux qu’une conversation générée par une IA à ce stade de la technologie. Un personnage qui répète la même phrase est parfois lassant, mais cela le caractérise, c’est un gimmick. Plus important encore, cela laisse la trace de l’homme derrière l’œuvre virtuelle, une question que nous allons explorer maintenant.
Vacuité de l’infini Le jeu vidéo est la seule industrie à ma connaissance qui est passé de l’automatisation à l’artisanat quand il a eu les moyens: D’un Arena, Daggerfall procéduraux, les équipes des Elder Scrolls, quand elles en ont eu les moyens, ont basculé vers le level design fait à la main. Pourquoi dans les fresques sans fin de No Man’s Sky trouve-t-on moins d’intérêt que dans les villes plus limitées en espace et en diversité de certains open world. La question est philosophique. Je dirais qu’en jouant nous ressentons un lien avec le créateur du jeu : il y a un musicien, un graphiste, un scénariste, un level designer, qui avec leurs maladresses et leurs talents, nous transmettent quelque chose. Dans le fond, comme dans toute œuvre d’art, nous cherchons et nous retrouvons nous-mêmes, ou tout du moins la trace d’un frère humain.
Cependant, un monde purement procédural ne montre pas la main de l’homme. Ce caillou a-t-il été posé par un humain ou généré par une équation ? Existe-t-il une uncanny valley de la conception artistique ? C’est une opinion arbitraire : je pense que oui. Et je pense que je peux passer des heures à regarder un caillou virtuel posé par un humain, car il y a une histoire derrière. Le caillou posé par l’équation n’est pas dénué d’histoire non plus, mais il est à un degré de séparation tel qu’il demande un investissement personnel que tout le monde ne sera pas prêt à donner.
La narration issue d’un déséquilibre du Gameplay Nous avons posé un certain nombres d’hypothèses pour arriver à une étape imminente qui va les reprendre pour aller plus loin. J’aimerais juste avant évoquer quelques ultimes points. La narration émergente, par essence, est issue du gameplay. Un gameplay d'infiltration réussi, par exemple, ou de gestion de squad à la Xcom, est propice à de grandes histoires sans pour autant imposer un scénario préécrit. Je voulais parler des gameplays déséquilibrés, (apparemment) mal conçus ou idiots au regard des normes de conception. Ces gameplays sont propices à des narrations nouvelles. Imaginons un hack’n’slash standard où le héros découvre au début du jeu une arme. Il a le choix entre une épée normale et une dague rouillée. Plongé dans le meta-jeu, le joueur va se raconter une histoire, il va se dire « si je prends cette dague, je vais accéder à une narration ou une récompense spéciale, même si le jeu sera plus dur ». L’astuce ici consiste à ne rien faire de particulier, que le jeu reste absolument identique : à chaque évènement, à chaque avancée et choix, le joueur va avoir l’espoir de vivre quelque chose d’unique. Avec un simple choix, nous avons donné une dimension nouvelle au récit. (C’est peut-être une vision de fou furieux : cette idée est constamment refusée dans le cadre de mon travail). Je suis parfois consulté pour créer de la narration émergente dans les MMO. La narration dans ce contexte, comme la guerre, nait souvent sous des contraintes de pression de population ou de manques de ressources. Prenez un Eve Online like et attribuez 99% des ressources à un seul joueur. Et regardez ce qu’il se passe. Quoi qu’il se passe, ce sera intéressant...beaucoup plus en tout cas que ces jeux équilibrés aux mécaniques de progression qui sont toutes les mêmes. Vous imaginez sans mal que cette idée est toujours rejetée par les directeurs de projet… Toutes ces données :
- Narration émergente issue du gameplay et des tensions multijoueurs - Montée en force des interactions fortes temps réels entre grand nombre de joueurs (Battle Royale like) Nous permettent de considérer les interactions joueurs de la même façon que l’on considère les interactions entre objets dans une programmation INFORM : le joueur n’est qu’un maillon d’un grand jeu global dont il participe par des actions indirectes à l’écriture. À ce titre, nous pouvons dégager une idée fondatrice, celle d’un jeu sans aléatoire ni génération procédurale, mais pourtant imprédictible.
Principe fondateur L’idée est de substituer le travail de l’écrivain ou de la narration procédurale par des interactions entre joueurs.Exemple direct : Dans le cadre du housing d’un MMO, un joueur achète un objet de décoration. Exemple : un tableau. Nous introduisons une règle de gameplay qui génère à la volée une quête dans la guilde des voleurs dont l’objet est de voler le tableau. Ce tableau qui était un objet de décoration finalement assez basique va devenir l’objet d’une guerre entre deux joueurs. Si le tableau se fait voler, il est certain que le joueur volé va racheter un objet, mais peut-être poser des pièges autour, attendre le voleur avec des amis, ou même mettre le tableau au fond d’une grotte pleine de monstres… Sans intervenir, nous avons ici de la narration mais aussi une forme de level design itératif et crowdsourcé. Exemple indirect : Dans le cadre d’un RPG, le loot d’un coffre est indexé sur le niveau du joueur modulo un nombre aléatoire. Nous substituons le RNG par une valeur de Karma qui est la résultante (un peu travaillée) des actions d’un autre joueur dans une autre partie. Un joueur est égoïste, méchant, maladroit ? Cela entraînera des loots pauvres, des monstres abominables et des tempêtes chez un autre. Et les actions de ce même joueur impacteront celles d’un autre...dans une chaîne de karma positive ou négative - chaque joueur étant la divinité d’un autre. Quand on est malchanceux dans un jeu, cela a une toute autre saveur de savoir qu’on peut maudire quelqu’un de vivant pour cette situation ! Les 4 règles Pour créer un jeu qui correspondre à ces ambitions ou simplement préparer un jeu à une future transition vers une totale narration basée sur les interactions des joueurs, 4 règles : 1) Il faut enregistrer toutes les actions de tous les joueurs. Dans les exemples qui suivront, quand un joueur ramasse une fleur, c’est une action signifiante qui est notée. 2) À chaque intervention du RNG dans le gameplay, se poser la question : « comment puis-je la remplacer par une action d’un autre joueur ? » (même asynchrone) 3) À chaque intervention de la génération procédurale (ou encore plus : de l’écrivain), se poser la question : « comment puis-je la remplacer par une action passée d’un autre joueur ? » (enregistrée en 1) 4) Enfin, à chaque intervention de l’écrivain, se poser la question : « Est-ce que si je ne racontais rien plutôt que quelque chose, ce ne serait pas mieux ? » Je vais développer le point 3 avec un exemple simple J’ai créé en PHP un très humble MMO textuel expérimental (je le détaille après) dans lequel on peut, entre autres, nommer et ramasser des fleurs. Dans ce même MMO, on peut demander à un PNJ de fabriquer une maison. Il pourra sculpter la porte. Quand on doit déterminer la sculpture de la porte, il va chercher dans les actions des joueurs pour trouver quelque chose déjà passé. Donc si vous ramassez une fleur un jour, vous pouvez, le lendemain, découvrir une porte gravée qui vous représente précisément en train de ramasser cette fleur.
Le Lore émergent
L’étape qui suit donc la narration émergente est celle du lore émergent : la création d’un background mythologique, géographique, culturel, issu de l’exploitation des actions des joueurs. Il a cet avantage majeur d’être inépuisable une fois les règles mises en place mais surtout, puisqu’il découle de règles obéissant à une logique objective ou arbitraire (créant dans ce dernier cas une métaphysique interne), il a une cohérence et du sens. Par ailleurs, comme le lore émergent dépend du joueur, les assets non découverts ou les lieux inexplorés sont réellement de la terra incognita : quelque chose existe car il y a un humain derrière. Nous sommes à l’opposé du spectre de la vacuité de l’infini sans avoir fait appel à un écrivain. Établir un lore émergent ne se fait pas ex-nihilo. Il faut créer des outils procéduraux foisonnants, et injecter dans des mécaniques standard de jeu (explorer, se nourrir, construire un village, attribuer des fonctions aux PNJ) des actions indirectes qui vont créer ce lore émergent. Il y a ensuite un effet de cascade en vertu de la règle 3) ci-dessus. Si vous générez procéduralement un type d’arbre et que vous lui donnez un nom et des propriétés, d’autres joueurs seront amenés à en faire usage. Le but est de ne plus visiter une taverne ciselée par le travail conjugué d’un level designer et d’un écrivain, mais de visiter une maison dont les murs, les toits, les portes sont dans des matériaux qui ont une histoire et une traçabilité, dont les habitants sont des races hybrides d’animaux qui ont traçabilité et qui ont hérité des cris et du tempérament des animaux dont ils sont composés, et dont le menu est composé d’animaux proches qui ont les propriétés nutritives de l’écosystème où ils vivent...etc...rien de nouveau si dwarf fortress était multijoueur, mais il ne l’est pas encore. Je vais donner de petits et humbles exemples fonctionnels maintenant.
Exemples pratiques L’année dernière j’ai codé sur twitch un jeu textuel incomplet encore pour montrer ce concept : Maspero Blue. Le jeu est jouable ici : maspero.blue hélas tout en français (mais on peut le traduire à la volée avec Google) Je n’en suis pas très fier mais c’est une illustration du propos. Les joueurs explorent des lieux générés procéduralement et nomment les plantes, les animaux, les rivières… L’encyclopédie de leurs travaux est ici : http://maspero.blue/encyclopedie.php?type=plante&id=425013720195191337&new=ok&item=plantes Dans L’onglet « Maison », on peut voir une « Ferme des Pingouins » Ferme des oiseaux Ferme des oiseaux est une maison de forme allongée de couleur orange, aux murs en timide fougère, avec pour entrée une simple ouverture en forme de porte cintrée, et un toit vert pyramidal en verdillon. Cette habitation peut accueillir 4 personnes. Ici vit Farfelu un Homme-pou-pou-pou-sur-échasse. Cette habitation se trouve dans Cité des brumes. Ce qui est intéressant c’est que cette maison existe par le concours indirect de plusieurs joueurs : un joueur a un jour trouvé puis nommé « la timide fougère ». Il l’a fait parce que peut-être il voulait la manger. Plus tard un autre joueur l’a ramassée et en fait les murs de sa maison. Farfelu est un hybride d’un animal « le pou pou pou sur échasse » qui a été découvert par un joueur (toujours peut-être parce qu’il voulait le manger pour des raisons de survie). L’hybride a été généré par le jeu puis ensuite a été trouvé et invité dans le village d’un troisième joueur...et ainsi de suite. Au fur et à mesure que le jeu évolue vers des strates supérieures de jeu, la génération procédurale disparaît au profit des interactions joueurs.
Quantifier, donc maîtriser du lore Je travaille sur une nouvelle application (appelée “M2”) qui va permettre de créer collaborativement un univers mais surtout de maîtriser la densité de l’univers créé. Dans Star Wars, quand on cherche un individu, on peut pousser la porte d’un bar quelconque et soit cet individu est dedans, soit il y a bon ami ou ennemi de cet individu : tout le monde se connaît. L’univers est dense. Dans Warhammer 40K, qui s’étend sur des milliards de monde contenant des milliards d’individus dans un contexte plus âpre, il est impossible de trouver quelqu’un en poussant la première porte venue. L’univers est très peu dense. On peut imaginer un petit jeu multijoueur textuel suivant : a) Un joueur crée un personnage
b) Il a plusieurs choix : voyager, choisir une occupation, accepter une quête…(on est dans la création squelettique des quêtes procédurales vues ci-dessues)
c) Les quêtes induisent la rencontre de nouveaux ou de nouveaux personnages.
d) S’il rencontre un nouveau lieu ou un nouveau personnage il peut le nommer et le décrire, et déterminer ses propriétés par un système équilibré (comme dans Maspero) ou utiliser un asset déjà créé par les joueurs.
e) Les X choix proposés sont composés de N assets déjà établis par les autres joueurs
f) En faisant varier N (entre 0 et X), nous pouvons avoir des univers hyper denses où tout élément est relié à un autre narrativement (quand N=X) ou au contraire des univers très peu denses (quand N tend vers 0).
Nous pouvons donc maîtriser la densité d’un univers qui se créée alors que les joueurs s’amusent.
Quels autres paramètres pouvons nous maîtriser ?

Quelles densités apporteront le plus d’amusement (y-a-t-il même un quelconque lien entre amusement et densité ?)
J’espère pouvoir vous le dire un jour.
Sublimer un jeu Imaginez un nethack non procédural et sans RNG : ce serait un pur jeu d’aventure dont on pourrait gagner 100% des parties avec une solution figée. Aujourd’hui les point’n’clicks souffrent d’un déficit de ventes et donc de création. Ce sont des jeux que l’on consomme sur stream et sur youtube, à l’opposé des « jeux sans fin » dont rêvent les grands éditeurs. On m’a proposé récemment de faire une nouvelle version d’un jeu de détective semblable aux jeux de Lankhor Maupiti Island / Manoir de Mortevielle. J’ai imaginé un jeu d’énigmes pures avec des assets procéduraux, qui permet de faire bouger le genre très classique du point’n’click d’enquête vers une forme de rogue like sans statistique : « La Villa sur la Mer ». Vous êtes sur une île grecque pour 3 jours et un meurtre a eu lieu. Chaque personne présente a plus ou moins un mobile mais aussi plus ou moins un alibi, ainsi qu’un agenda caché et quelques aventures annexes vont se jouer (histoires d’amour et de vengeance). Le joueur, que l’on découvre pendant la partie avec une dissociation de la personnalité, fait paradoxalement partie des suspects. Comme dans un rogue like classique, vous ne pouvez pas reprendre une ancienne sauvegarde : si vous n’avez pas résolu l’enquête au bout de trois jours, c’est un échec. Et si vous recommencez le jeu, les lieux et leur agencement, les personnages, les mobiles...le meurtrier...vont changer. Ainsi vous n’avez pas à retenir des assets d’énigmes comme dans un jeu d’aventure classique (Ex : le majordome est le fils caché de la victime) mais, tout comme dans un rogue like procédural, des méthodes pour réussir (Ex : déterminer l’heure du crime et vérifier où était tout le monde à ce moment là). Nous créons ainsi un jeu d’énigme classique qui pourtant permettra à un streamer de dire : « Je me suis bien entraîné, je suis paré à vaincre ce jeu ! » comme il pourrait le dire aujourd’hui de Dark Souls mais moins d’un jeu d’énigmes. En insufflant une approche procédurale à un jeu d’énigmes classique, nous lui donnons une nouvelle dimension possiblement viable commercialement. Nous avons beaucoup à découvrir et à réinventer dans ce secteur fascinant. J’espère que la lecture de ce rapport vous donnera de belles idées pour faire de beaux jeux qui nous étonneront et nous émerveilleront.

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